dimanche 31 janvier 2010

Journée mémorable au Carnaval Boréal 2010

Je vous avais annoncé ma participation au Carnaval Boréal en fin de semaine.
L'événement semblait prometteur et j'ai pas mal réussi à assister à toutes les activités au programme, de l'ouverture au concours d'écriture "sur place".
Sans vouloir revenir sur l'ensemble de la journée, je mentionnerai que j'ai été étonné de voir le degré de participation, et le rythme des interventions. On se serait cru à un "vrai" congrès Boréal: Plusieurs activités parallèles, foyer de discussion, fil Twitter, page Facebook, l'ensemble était animé et condensé.
J'avais douté du bien fondé d'un événement aussi court que quelques heures, mais après trois heures et huit activités, mes neurones surchauffaient, mes verres de contacts étaient secs, j'avais les jambes engourdies, bref, je trouvai déjà que le congres virtuel était plus physiquement exigeant que ce que j'avais pensé. Je ne pense donc pas qu'un congrès virtuel de deux jours pourraient être envisageable - du moins pas à ce rythme!
Il faut dire qu'à l'origine, j'avais imaginé être capable de suivre et participer au congrès, et faire autres chose en parallèle! Ha! J'ai rapidement changé d'idée.
À quelques reprises en cours de congrès, j'ai pris une minute de pause-lecture-intervention pour juste regarder se dérouler tout ça sous mes yeux. Le déroulement même du Carnaval était fascinant à observer: Voir l'activité dans les onglets représentant des salles virtuelles de discussion, me retrouver à toutes fins pratiques "seul" avec Christian dans le foyer alors que la première heure de programmation battait son plein, constater les erreurs d'insertions de réponses ou de liens html, les corrections rapides de Christian - y compris un glitch dans une des galeries, j'avoue que le processus lui-même était une activité intéressante en soi.
Les premières heures, très achalandées, ont été également les heures de rodage. Chacun - y compris moi - devait s'habituer à se balader d'un onglet à l'autre, d'une discussion à l'autre, rafraîchir les pages, consulter le fil RSS pour suivre les discussions auxquelles on assistait ou participait, bref, apprendre à assister à un congrès virtuel. L'ensemble du congrès s'est déroulé exactement comme un congrès en personne (mis à part l'aspect virtuel et le fait que je me trouvais au Guatemala au moment d'y participer).
À un moment, j'avais sept onglets de navigation d'ouverts, seulement pour le congrès lui-même; La page d'accueil, la table ronde de l'heure, un salon et la cérémonie d'ouverture qui se terminait, le foyer, le fil RSS permettant de suivre en temps réel les commentaires publiés sur toutes les pages du site et, à ce moment-là, le fil Twitter du Carnaval, par curiosité (en animation, en plus!).
Il faut saluer la conception intelligente du site/blogue, avec son interface pratique, facile d'utilisation et sans babiole inutile. L'outil s'est avéré parfait pour cette expérience innovatrice.
Les statistiques compilées par Christian confirment les impressions que j'ai eu pendant la journée; que les activités les plus populaires et les plus développées ont été les tables rondes planifiées avec des participants qui s'étaient (un peu, on imagine) préparé d'avance.
Pour ma part, j'ai adoré l'expérience, même si j'étais plutôt fatigué à la fin de la journée. J'espère que le succès de ce congrès virtuel encouragera les organisateurs (ou l'organisateur, hehe), à récidiver l'an prochain.
Malgré la fatigue, j'ai tout de même participé au concours d'écriture sur place, qui comportait deux avantages sur le concours traditionnel que Julie présente dans les congrès Boréal. Le fait de taper son texte au clavier avant de le publier sur le site permet à l'auteur de travailler un peu plus vite (je parle pour moi) et d'avoir, au final, un texte déjà saisi à l'ordinateur. Aussi, cette formule permet aux lecteurs de voir les produits bruts réalisés en une heure - ce qui est peut-être un inconvénient, maintenant que j'y pense, puisque vous pourrez voir les défauts et manques de la nouvelle que j'ai écrite (mais que je me promets d'améliorer par un minimum de relecture-révision).
Heureusement, les nouvelles du concours ne sont pas les seules archives disponibles, puisque l'avantage majeur de ce congrès virtuel, c'est que si vous l'avez raté, vous pouvez tout de même retourner assister en différé à toutes les activités, en lisant les discussions et commentaires actuellement sur le site. On nous assure que le site sera encore ouvert pour quelques mois, alors ne vous gênez pas pour aller voir ce qui s'y ai discuté.
(Ça sera probablement plus reposant que d'y avoir assisté en direct, alors que les commentaires entraient au rythme effréné de plus de 200 à l'heure).
Pour ma part, j'y retournerai certainement, ne serait-ce que pour visionner les bandes-annonces sélectionnées par Christian, puisque je n'avais pas une connexion/bande passante nécessaire pour les voir et les commenter en direct lors du congrès.
Voilà donc pour ce congrès virtuel: un succès sur toute la ligne en ce qui me concerne. Et comme à la fin d'un congrès en chair et en os, j'étais épuisé mais content, à la fois fatigué et plein d'énergie, à la fin de la journée.
Merci à Christian, une fois de plus, qui a rendu la chose possible. Et merci à tous les autres d'avoir embarqué dans cette belle initiative.

vendredi 29 janvier 2010

Cinéma, Casablanca, Citizen Kane, Guatemala

Depuis mon départ pour l'Asie, je dois avouer ne pas avoir vu beaucoup de films au cinéma. Trois mois à l'étranger n'aident pas nécessairement à garder le contact avec le 7e art. Certes, il y a des cinémas dans les grandes villes - et j'en ai profité pour voir quelques films à Bangkok et Kuala Lumpur - mais comme j'avais l'habitude de voir deux ou trois films par semaine dans la première moitié des années 2000, le rythme de voyage n'est vraiment pas le même.
Par la suite, sans trop que je ne m'en rende compte, j'ai plus profité de spectacles live et de festival pendant l'été que de cinéma. Puis vint l'automne, et un nouveau départ. Et le Guatemala n'est définitivement pas le pays idéal pour voir des films en salles. Antigua, mon premier port d'attache, ne comporte pas de cinéma au sens où on l'entend habituellement. Xela, mon autre point d'attache de ce séjour comporte un cinéma multi-écrans, à 40 minutes à pied de chez moi, et dans une zone plus industrielle, de l'autre côté de la Minerva, un des coins les plus louches de la ville. Le soir venu, le dernier endroit que je veux traverser, c'est bien La Minerva, et le chemin du cinéma à chez moi comporte aussi d'autres zones peu recommandables après le coucher du soleil.
De toute manière, tout ça pour dire que la vie, parfois, a ses bons côtés, mais que rien n'est parfait et que la période de novembre 2008 à février 2010 aura été une période assez maigre côté cinéma.
Question de ne pas souffrir d'un manque trop aigu, j'ai donc loué plusieurs films. Demeurer sur la rue Beaubien a cet avantage: un des meilleurs clubs vidéo de Montréal se trouve à quelques coins de rue de chez moi. J'ai donc passé mon automne dernier à louer des DVD, à la fois de films récents, de films moins récents mais qui m'avait passé sous le nez en salles, ou de vieux films que j'ai toujours voulu voir mais n'ai jamais pris le temps.
Et, bien sûr, un des plus grands plaisirs du 7e art: revoir des films qu'on a aimé.
Ce fut le cas de deux classiques, que j'ai revu avec autant de plaisir qu'à chaque visionnement. Et ceci est assez rare, malgré tout, au cinéma. Il n'y a pas tant de film que ça qui peuvent réellement supporter de multiples visionnement en procurant toujours autant de plaisir.
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Puis, tout récemment, en me baladant dans Antigua, au Guatemala, j'ai vu un café-bar qui m'a rappelé un de ces films - un de mes films favoris de tous les temps.
Il s'agit de Casablanca, de Michael Curtiz, sorti le 23 janvier 1943.
Casablanca, c'est un merveilleux petit film dont le scénario fin et bien écrit, superbement tricoté et qui se déroule via la caméra d'un réalisateur favorisant des mouvements de caméras fluides et un sens du timing qui impressionnent encore plusieurs décennie après sa sortie. Casablanca est aussi un mélange de genres particulièrement bien dosé; romance, aventure, drame, espionnage, suspense, le tout dans un décor qui apparaît aussi exotique à chaque visionnement.
De plus, Casablanca, pour un voyageur comme moi, ça évoque aussi le rêve, et l'idée d'aller un jour visiter cette ville devenue mythique un peu grâce au film. Casablanca c'est aussi Bogart en très grande forme, des personnages subtils, complexes et bien développés et un degré d'humour bien dosé et des dialogues savoureux. Enfin, Casablanca est aussi - pour le véritable amateur de cinéma - une superbe leçon de cinéma. Les premières 40 minutes devraient faire l'objet de visionnement dans tout bon cours de cinéma, tellement tout ce qui fait qu'un film peut être bon se trouve dans ces 40 minutes. Une pure perfection, comme peu de films réussissent à l'atteindre.
Voilà. Si jamais vous n'avez pas encore eu le plaisir de voir ce chef d'oeuvre, allez-y. Le soir où j'ai loué Casablanca pour le revoir (et le faire découvrir du même élan), j'ai eu encore bien plus de plaisir qu'en allant voir pour la première fois une des inepties qui polluent trop souvent nos cinémas. Parfois, avoir raté des occasions de voir des films en salle a eu ses bons côtés, et Casablanca était l'un d'eux.
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Par une étrange coïncidence - ou bien j'avais l'esprit ouvert à ce genre de choses - à peine quelques jours plus tard, après être arrivé à Xela, dans l'ouest du Guatemala, j'ai vu une demeure qui m'a rappelé un autre de ces classiques que j'ai revu en location à l'automne.
Je parle ici de Citizen Kane, de Orson Welles, sorti le 1 mai 1941.
Je pense que j'avais oublié à quel point ce film était bon. Si le film de Welles n'apparait pas aussi complexe dans son scénario, il n'en demeure pas moins un habile mélange de drame, de suspense et d'humour noir, ainsi qu'une belle leçon de réalisation.
Il y a tellement de bonnes petites idées dans ce film que j'en étais béat d'admiration après ce nouveau visionnement. Il faut dire que je n'avais pas revu Citizen Kane depuis fort longtemps et qu'à l'époque, je n'avais pas remarqué plusieurs de ces petites idées qui débordent les effets habituels de réalisation et la simple manière de raconter une histoire. Il serait long et fastidieux d'énumérer le genre de choses auquel je fais référence, mais si vous voyez le film, remarquez par exemple tout le plan d'ouverture, sur la maison de Charles Foster Kane (Xanadu) et tentez de voir avec quelle maîtrise des moyens de l'époque, Welles arrive à filmer toute cette scène en ne faisant apparaître la lumière qu'à un seul endroit sur l'écran, malgré les changements de perspectives et points de vue. Et l'effet fonctionne encore à merveille 60 ans plus tard! Je note que le film a aussi son degré d'humour particulièrement intelligent, et pose une critique sociale assez intéressante pour être encore d'actualité - et pertinente - près de 7 décennies plus tard. L'habile jeu de la fausse course à l'énigme, à laquelle seuls les spectateurs attentifs auront la réponse, est une touche qui complète un scénario intelligent. Enfin, pour ceux qui, comme moi, admirent des réalisateurs qui tentent des choses nouvelles au cinéma, aimeront les nombreuses insertions d'images d'archives et autres effets innovateurs du genre, qui auront pavé la voie à des cinéastes inventifs.
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Citizen Kane a été un échec au box office lors de sa sortie en salles. Il n'est sortie à nouveau que quelques années plus tard pour être plu apprécié du public. En 1998, l'American Film Institute (AFI) nommait Citizen Kane meilleur film de l'histoire du cinéma. Lors de la publication de son nouveau classement en 2007, l'AFI nommait toujours Citizen Kane comme film numéro un de l'histoire.
Citizen Kane, comme Casablanca, est un film tourné en noir et blanc, et chacun des deux réalisateur fait un usage du noir et blanc qui est magistral. Alors que Welles utilise plusieurs scènes très contrastées, qui ressemblent presque à un effet de bande dessinée, Curtiz joue sur plusieurs niveaux de gris, avec les brume, les nuages, la fumée, et fini par nous montrer une ville qui nous semble presque en couleur.
Dans son classement de 2007, l'AFI a nommé Casablanca comme 3e meilleur film de tous les temps.
Pour ma part, j'ai toujours un peu préféré Casablanca à Citizen Kane.
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Photos:
1. Riki's Bar, La Escudilla, Antigua, Guatemala.
2. Casa Anonima, 3a Calle Zona 1, Quetzaltenango, Guatemala.
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mercredi 27 janvier 2010

Les chiens de Xela


J'avais prévu, il y a plusieurs semaines, de publier un petit billet photo sympathique sur les chiens de Xela.
C'est que, voyez-vous, il y a des dizaines de chiens à Xela. Des chiens domestiques, bien sûr (dont plusieurs chiens de garde), mais aussi un grand nombre de chiens errants, des vagabonds qui se baladent dans leurs quartiers de prédilection et qu'on rencontre et apprend à connaître.
Ils ont beau être itinérants, ils vous regardent avec un mélange d'espoir et de méfiance et font partie intégrante de la vie à Xela.
Un journal local, le Xela-Who, a même consacré la Une et un éditorial de son numéro de novembre dernier aux chiens de Xela. Ce sont des vedettes!
Ainsi, après plusieurs semaines, j'avais pris trop de photos pour pouvoir choisir les six ou sept que je pourrais inclure dans ce billet. J'ai donc décider d'en publier près de vingt dans un petit album spécial à la place d'un billet.
Voici donc ce petit album photo en hommage aux chiens de Xela.
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mardi 26 janvier 2010

Guatemala: La violence et le Canada (2)

[Note: Pour connaître le contexte de la publication de ce billet, je vous invite d'abord à lire le premier billet de cette série de trois. La raison principale de la publication de ce billet est d'informer les canadiens des agissements de leurs pairs et de leur gouvernement. Comme visiteur canadien au Guatemala, c'est le moins que je puisse faire.]
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Certains lecteurs me reprocheront d’avoir écrit une fiction pour faire croire que le Canada, par ses lois et ses institutions, et les canadiens, par leurs investissements et leurs firmes de courtage, étaient responsable de violences au Guatemala. On me reprochera peut-être l’absence de faits, les suppositions, l’imagination et la paranoïa, on me reprochera de laisser planer des accusations non fondées sur une industrie et des institutions publiques.
Dans le présent billet, je mets donc mon chapeau d’auteur de fiction de côté.
Et je vous présente des faits.
Fini la fiction... mais du même coup, fini la possibilité de se cacher.
Voici donc des faits.
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Goldcorp
Goldcorp inc. (Goldcorp) est une compagnie canadienne fondée en mars 1994. La compagnie est cotée à la bourse de Toronto et la bourse de New York. Goldcorp détient à 100% une compagnie guatémaltèque appelée Montana Exploradora. Cette compagnie possède la mine d’or Marlin, qu’elle dirige depuis 2006, depuis que Goldcorp a acheté la compagnie Glamis Gold. Goldcorp est une des plus grandes entreprises minières d’or du monde.
Dans son rapport annuel de 2008 (1), Goldcorp montre un chiffre d’affaires de 2,419 milliards de dollars (US), un chiffre d’affaires en progression de 46% sur deux ans. En 2008, Goldcorp a dégagé un bénéfice net de 1,475 milliards de dollars (US) , montrant une progression à ce niveau de plus de 200% sur deux ans. À son bilan de la fin de 2008, Goldcorp affiche un actif de 19 milliards de dollars (US).
Si vous êtes actionnaire de Goldcorp – via vos placements chez un courtier ou dans vos REER – vous êtes l’une des personnes ayant reçu une partie des 128 millions de dollars (US) de dividendes versés par Goldcorp en 2008 sur une base mensuelle.
Parmi les investisseurs-actionnaires de Goldcorp (données de mars 2008), le Régime de pension du Canada détenait pour 293 millions de dollars en actions de Goldcorp. (11)

La Mine Marlin.
Goldcorp, via sa filiale Montana Exploradora, dirige la mine Marlin, dans les régions de Sipacapa et de San Miguel Ixtahuacan, département de San Marcos, au Guatemala.
La loi sur les mines du Guatemala (de 1997) stipule que la compagnie doit payer à l’état des redevances de 1% sur les produits commercialisés issus de la mine. De ce montant, la moitié doit être versé aux municipalités propriétaires des terrains et sous-sols où se trouve la mine.
Les données officielles du gouvernement du Guatemala (2) montrent que de novembre 2005 à décembre 2008, Montana a touché 4,456 milliards de quetzales (557 milliards US) et a donc versé 44 millions de quetzales (5,5 millions US) à l’état pour cette période.
Selon Rosa María De Frade, députée de la commission de l’énergie et des mines du congrès, Goldcorp a le droit d’opérer au Guatemala via sa filiale en versant un impôt corporatif de 18% de ses profits locaux. (2)
Afin d'exploiter une mine d'or et d'argent, il faut soustraire des roches excavées les autres minéraux. Un des processus implique l'utilisation de cyanure.
Montana Explorada a payé 13 millions de quetzales (1,6 millions US) pour un permis d'importation de cyanure au Guatemala. En 2009, la compagnie a importé 260 millions de kilogrammes de cyanure (13).
Le processus libère donc l'or et l'argent, mais aussi, selon les sols, du plomb, du cuivre, du mercure, du zinc, du sélénium et de l'arsenic (13).
Selon Magali Rey Rosa, du mouvement écologiste Escuela Ecologista Savia, ni Montana Explorada ni le gouvernement guatémaltèque n'a informé la population de quels métaux et quels métaux lourds se trouvent dans les résidus de l'exploitation de la mine Marlin (13).

La population de San Marcos contre Goldcorp.
Le 4 novembre 2004, un journal national publiait les résultats d’un sondage selon lequel 95,5 pour cent de la population vivant à proximité de la mine Marlin, dont la grande majorité était composée d’autochtones, s’opposait au projet minier. Le même jour, dans le même journal, James Lambert, alors ambassadeur canadien au Guatemala, publiait un article vantant les avantages de l’activité minière pour quelque 200 communautés autochtones au Canada (3).
Le 11 janvier 2005, après un barrage de 40 jours, des centaines de résidents qui s’opposaient à la mine Marlin ont fait face à 700 militaires et 300 policiers. Un résidant a été tué et dix autres (y compris des policiers) ont été blessés. En juin de la même année, des communautés autochtones de la région de Sipacapa touchées par le projet ont tenu un référendum sur l’exploitation minière. Par une écrasante majorité, les citoyens ont voté contre l’exploitation minière (3).
En mars 2005, la municipalité de San Miguel Ixtahuacan (39 000 habitants, dont la plupart sont des paysans mayas – des Mam) s’est objectée au développement minier sur leurs terres, mentionnant qu’ils ne tiraient que peu ou pas de bénéfices de la présence d’une mine.
Avant même les débuts de l’opération de la mine, plusieurs manifestations ont eu lieu, entraînant le mort de deux manifestants. (4)
Et effectivement, le 18 juin 2005, et en respect de la constitution du Guatemala et du code municipal du Guatemala, 13 cantons de Sipacapa ont préparés des référendums sur la présence du projet minier. Onze de ces cantons ont rejetés le projet, un l’a accepté et un canton ne s’est pas prononcé. La compagnie opérante (alors Glamis Gold) a refusé de reconnaître ces résultats (5). Goldcorp maintient cette position encore aujourd’hui.
L’aire occupée par la mine Marlin comprend une zone d’extraction de 142 hectares de roches pulvérisée et l’opération de la mine a dû éliminer 289 hectares de boisé. (2)
La Prensa Libre rapporte (2) que des habitants de la région touchée, se sont plaint de la présence de la mine canadienne, et parlent de rejets d’eaux acides dans la rivière Tzala et d’assèchement des puits dans une région touchant directement 10 000 habitants.
Les plaignants ont été entendus par le Tribunal Latino-Américain de l’eau, qui a condamné les actions de Montana Exploradora pour dommages à l’environnement et aux populations de San Miguel Ixtahuacan et Sipacapa. Le verdict a été rejeté par l’Association des mines du Guatemala. Le tribunal a aussi reproché au gouvernement du Guatemala de ne rien faire pour corriger la situation des opérations minières à hauts risques et à d’avoir enfreint la convention de l’organisation internationale du travail. Le tribunal a enfin reproché au gouvernement guatémaltèque d’avoir ignoré les consultations publiques prévues par sa propre constitution. (2)
La réponse de Goldcorp: « Nous refusons de donner légitimité à ce tribunal. Par contre, nous reconnaissons la légitimité des institutions du Guatemala, dont le ministère publique et son appareil judiciaire, qui ont déjà rendu un verdict selon lequel il n’y a aucune contamination de la part de Montana » (2).
Mario Tema, un militant maya de Sipacapa s’est rendu au siège social de Goldcorp, à Vancouver, en 2007, où se tenait la réunion annuelle des actionnaires. Il a pris la parole puis rapporte: « Après mon intervention à la réunion, un actionnaire m’a approché et m’a dit : "Je m’en fous de ta cause, la seule chose qui me préoccupe c’est l’argent dans mes poches" » (10).
En mars 2007, la police et des forces de sécurité privées ont repoussé des manifestants en utilisant des gaz lacrymogène lors d'une manifestation pacifique devant la mine Marlin de Goldcorp (14).
Goldcorp a aussi déposé une plainte contre le biologiste italien Flaviano Bianchini après que son étude ait démontré que la mine Marlin avait pollué les eaux environnantes avec des métaux lourds issus du processus d'extraction. Bianchini a quitté le Guatemala après avoir reçu des menaces de mort (14).
En mai 2009, une grande manifestation a eu lieu devant les bureaux de Goldcorp à Guatemala City. Les plaignants reprennent les mêmes arguments, la compagnie rejette les arguments, mentionnant que les manifestants n’ont aucune preuve scientifique concernant les fissures dans les maisons ou la contamination de l’eau. Craignant encore la répression, ils affichaient des bannières disant: « Nous sommes des paysans, pas des délinquants » (6).
Fin 2009, la Mission internationale de vérification des violations des droits humains des peuples autochtones a compilé près de 200 témoignages de victimes de répression ou d’impunité, dans le contexte des extractions minières et des expulsions forcées de populations. Après avoir visité une série de communautés dont Sipacapa et San Miguel Ixtahuacán, la Mission de vérification a annoncé qu’elle émettrait un communiqué aux autorités étatiques pour que celles-ci réagissent face aux violations « claires et évidentes » des droits humains (12).
Le 22 janvier 2010, le ministère de l'environnement du Guatemala dénonçait un déversement de 83 mètres cubes de déchets industriels à la mine Marlin observé le 24 décembre 2009 ayant contaminé les sources d'eau du ruisseau Quivichil. Montana Exploradora a expliqué qu'il s'agissait d'un accident et que suite à des tests effectués par l'entreprise, aucune contamination ou autre impact environnemental n'avait été noté. Le ministre a refusé ces conclusions car les relevés du ministères de l'environnement montrent toutefois que les cours d'eau situés près de la mine contiennent 10 % de plus de cuivre que la limite acceptable, 300 % plus d'aluminium, 30 % plus de fer et 680 % plus de manganèse que les limites permises par la loi (13).
Malheureusement pour les habitants de la région, la Loi sur les eaux résiduelles ne prévoit que des sanctions administratives. La Loi sur les mines, quant à elle, ne prévoit aucune sanction concernant les dommages environnementaux causés par l'exploitation des mines.

Au Canada.
En décembre 2009, des dirigeants d'une communauté guatémaltèque demandent au gouvernement du Canada de « faire enquête sur les violations des droits de la personne prétendument commises par la société Goldcorp Inc. à la mine Marlin » (7).
« La mine divise notre ville, harcèle ceux qui protestent et nous fait craindre pour la santé de nos familles », a affirmé Maudilia López Cardona, coordonnatrice de la coalition Front de défense de San Miguel (Frente de defensa San Miguelense FREDEMI). « Est-ce que c'est ça le développement économique? Est-ce que Goldcorp pourrait faire ça au Canada? » demande-t-elle (7).
Le Point de contact national (PCN), un comité interministériel présidé par le ministère des Affaires étrangères et du Commerce international canadien, reçoit les plaintes déposées par les communautés qui ont subi des préjudices de la part d'entreprises canadiennes poursuivant des activités à l'étranger. Le mandat limité du PCN lui permet d'émettre des recommandations non contraignantes aux sociétés en application des Principes directeurs ou d'offrir de faciliter une entente entre les parties. Le droit canadien actuel ne possède pas de mécanismes contraignants en vertu desquels il pourrait traiter de telles plaintes (7).
Dans sa plainte de treize pages, la coalition guatémaltèque exprime ses craintes au sujet de la contamination toxique et de l'épuisement de leurs sources d'approvisionnement en eau potable, des impacts sur la santé des citoyens de la localité, notamment des éruptions cutanées et d'autres maux semblables à ceux détectés à la mine San Martin de Goldcorp au Honduras et des dommages aux structures de maisons situées à proximité de la mine en raison des détonations et de la circulation de poids lourds. Une enquête récente menée par des spécialistes des mines et des géologues a découvert que les ondes de choc provoquées par les détonations de Goldcorp ont probablement causé les dommages aux structures de nombreuses maisons à San Miguel Ixtahuacan (7).
En mai 2007, déjà le Réseau canadien sur la reddition de comptes des entreprise publiait un rapport accablant intitulé: Affaires douteuses : Le soutien du gouvernement fédéral aux entreprises minières, pétrolières et gazières canadiennes à l’étranger.
Le rapport dénonce l’utilisation de fonds publics investis dans des entreprises du secteur minier opérant à l’étranger. « Des entreprises extractives canadiennes ont été impliquées dans des controverses partout dans le monde, de la Californie au Soudan en passant par le Guatemala et ailleurs. Or le gouvernement canadien fournit de l’aide au secteur extractif souvent sans assurer la population qu’un projet ne sera pas nuisible à l’environnement et ne violera pas les droits de la personne. Dans certains cas, le gouvernement a soutenu des projets après que des abus bien documentés en matière d’environnement et/ou de droits de la personne aient été révélés. » (3)
Les fonds publics proviennent de plusieurs sources, tels le régime de pension du Canada, l’ACDI, le soutien des ambassades, des programmes d’assurance et de garanties de prêts, etc.
Avant cela, même, en juin 2005, Amnistie internationale rapportait que le Comité parlementaire permanent des affaires étrangères et du développement international avait produit un important rapport sur la responsabilité sociale des entreprises et l'exploitation minière dans les pays en voie de développement.
« Le rapport a été élaboré en raison du nombre élevé de plaintes internationales concernant les lourdes violations aux droits humains infligées par des compagnies minières, pétrolières et gazières canadiennes dans leurs opérations à l'étranger. Le rapport souligne le besoin de législation qui rendrait les compagnies transnationales canadiennes responsables de leurs actions outre-mer. » (8)
Quatre ans plus tard, soit en mars 2009, le gouvernement canadien a répondu aux recommandations émises et cette réponse du gouvernement est jugée insatisfaisante car elle ne prévoit aucun mécanisme de plaintes efficace et aucune possibilité de sanction.(8).

Actuellement au Parlement
Un projet de loi est sur la table. Il s’agit du projet de loi C-300, qui est un projet de loi d’initiative parlementaire qui a été déposé par le député John McKay, du Parti libéral, le 9 février 2009.
Plusieurs groupes se battent pour l’adoption finale de ce projet de loi au Canada, afin de responsabiliser les entreprises canadiennes qui opèrent en toute impunité à l’étranger. Alerte Mines Canada, Développement et Paix, Amnistie Internationale et Oxfam (9) font partie de ces groupes. Les intérêts privés sont toutefois fortement représentés. Fasken Martineau, qui figure parmi les trois plus grands cabinets d’avocats au Canada, a déjà fait des représentations contre le projet de loi.
Alors que 137 membres de la Chambre des communes ont voté en faveur de l’adoption du projet de loi C-300, 133 députés (tous des conservateurs sauf un) ont voté contre. Le projet doit maintenant être révisé et soumis au Sénat.

Et vous?
Voilà. Des faits.
Qu’en ferez-vous?
Vous, simple lecteur de ce blogue, vous ne pouvez rien faire d’autres que des pressions politiques auprès des sénateurs et députés pour que ce projet devienne une loi et que cette loi soit appliquée pour prévenir les abus des compagnies canadiennes à l’étranger.
Vous pouvez aussi écrire au Ministre des finances, responsable conjoint du Régime de Pension du Canada (RPC), pour lui demander de retirer les fonds publics investis dans Goldcorp. Les investissements du RPC sont gérés indépendamment du régime, par l’office d’investissement du RPC, une société d’état.
[Fait : En 2006, le ministre des finances a louangé l'Office d'investissement du RPC pour être devenu signataire des Principes pour l'investissement responsable des Nations Unies, qui fournissent un cadre de pratiques exemplaires pour la prise en compte des questions environnementales, sociales et de gouvernance d'entreprise dans les décisions d'investissement. Fait: Parmi les investissements de l’offfice d’investissement du RPC (données de mars 2008), le Régime de Pension du Canada détenait toujours pour 293 millions de dollars en actions de Goldcorp (11)].
Évidemment, sur une base personnelle, vous pouvez vous débarrasser des actions de Goldcorp que vous avez peut-être dans vos placements ou dans vos REER et en profiter pour informer votre courtier qu’il contribue lui aussi aux activités de Goldcorp.
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Références :
(1) Données financières issues des rapports financiers publics de Goldcorp, consultés sur www.goldcorp.com le 25 janvier 2010.
(2) La Prensa Libre, édition du 13 septembre 2008.
(3) Tiré du rapport du Réseau canadien sur la reddition de comptes des entreprises, mai 2007.
(4) MiningWatch. Two Killed So Far Protesting Glamis Gold in Guatemala, 21 mars 2005.
(5) Rights action report. (www.rightsaction.org), site consulté le 25 janvier 2010.
(6) La Prensa Libre, édition du 23 mai 2009
(7) Rapport de Mining Watch – Mines Alerte Canada, décembre 2009.
(8) Amnistie internationale : www.amnistie.ca, site consulté le 25 janvier 2010.
(9) Oxfam : www.oxfam.org, site consulté le 25 janvier 2010.
(10) BBC News - BBC radio 4, propos recueillis par Bill Law, 21 août 2008, www.news.bbc.co.uk
(11) www.stockwatch.com
(12) Projet d'Accompagnement Québec-Guatemala, Revue de l'Actualité, Hiver 2009
(13) La Prensa Libre, édition du 22 janvier 2010.
(14) The Daily Estimate, propos rapportés par Bill Lemus, édition du 9 juin 2009 (www.dailyestimate.com)

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Photos:
1. Publicité de Goldcorp, Guatemala City. ("Développement = travail = meilleure qualité de vie")
2. Manifestation à Guatemala City. La Prensa Libre, édition du 23 mai 2009.

3. Fissures dans une maison située près de la mine Marlin. www.mimundo.org
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Le Guatemala par l'affichage (2)

Je profite d'un moment pour vous divertir un peu - avant la publication d'un billet long et beaucoup plus sérieux - en continuant mon exploration de la culture locale par son affichage parfois amusant.
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S'il est souvent difficile de trouver un nom de rue ou d'avenue dans des villes comme Antigua ou Xela, parfois, on en fait beaucoup trop, comme ici, sur la 12e avenida de la zona 1.



Saks! Que dire de plus... Je regrette de ne pas avoir noté s'il se trouvait sur la 5e avenue!



Affiche demandant du personnel. Le poste consiste à servir les clients d'un bar laitier dans un centre commercial. Culturellement intéressant de noter les éléments suivants: Il s'adresse aux femmes seulement. On exige des cartes de santé (dont pulmonaire), les antécédents pénaux et policiers, trois lettres de recommandation en plus des habituels identifications et copies de diplômes. Ceci explique en grande partie les incroyables files d'attente devant les bureaux de la RENAP (état civil) et de la police.



Pour ceux qui, passant le long du Hiper Paiz (supermarché croisement entre un Walmart, un Costco et un Loblaw), n'auraient pas remarqué que l'affaire est grande, on a préféré mettre des lettres assez grandes pour attirer l'attention.



Quand votre dépanneur du coin voit son affiche commanditée par des produits contre les maux de digestion, ça ne donne pas envie d'y acheter quelque chose à grignoter, non?



Tiens, un bureau de comptable... :-)



Les affiches politiques sont omniprésentes dans les pays latinos, et comme elles sont souvent peintes sur les murs de béton, elles ont une allure permanente, même des années plus tard. Si j'aime bien celle-ci, c'est que la grosse flèche bleue nous indique surtout où trouver du pain sur le coin de rue suivant.



Affiché à l'entrée de mon auberge. Ooops, j'ai une carte de crédit sur moi... ah, et dire que je prends une cerveza chaque soir... En tous cas, je ne fume pas et n'ai pas d'animaux dans mon backpack. deux sur quatre, ils me tolèrent :-)
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lundi 25 janvier 2010

Invitation au Congrès virtuel Carnaval Boréal 2010



Quelle idée amusante et originale.
On dirait même que la chose a été conçue en fonction de mes besoins, moi qui est rarement au Québec lors des congrès!
Je parle de la tenue d'un congrès virtuel de science-fiction et fantastique à la fin janvier.
Ce congrès, appelé Carnaval Boréal, se tiendra donc sur le web, pendant une journée, le samedi 30 janvier.
Comme il s'agit d'un congrès, il y aura des tables rondes et des salons, en plus d'un concours d'écriture (sur place, hehe) et d'une soirée de bande-annonces.
J'imagine que l'événement ne sera pas aussi achalandé que le plus récent congrès auquel j'ai eu la chance d'assister, mais au moins, par le froid qu'il fera dans certaines coins du globe samedi prochain, j'aurai l'occasion de participer au Congrès dans le confort d'une petite auberge de l'ouest du Guatemala.
Pour ceux qui ne voudraient que jeter un oeil avant et pendant le congrès sans s'inscrire ni intervenir dans les discussions, le congrès est ouvert et publique et, superbe conséquence du virtuel et du parti-pris blogue-texte des organisateurs, les archives du congrès virtuel seront disponibles par la suite pour qui a raté l'événement en direct!
Un horaire prévisionnel est déjà en ligne, des ajouts et modifications suivront probablement juste avant l'événement. Pour les curieux, on mentionne aussi un premier événement - ce mardi soir - auquel vous pouvez assister en direct ou en différé afin d'avoir un aperçu de quoi auront l'air les activités du samedi.
Je vous invite donc à vous joindre à moi, comme participant ou spectateur-lecteur, pour le Carnaval Boréal 2010.
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Guatemala : La violence et le Canada (1)

[Note: Ceci est le premier d'une série de trois billets sur le même thème. Cette série m'a été inspirée par des rencontres et des lectures dès mon arrivée au Guatemala en décembre 2009. Comme canadien en visite au Guatemala, je ne peux ignorer la réalité guatémaltèque face au Canada.]
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Introduction : Violence, Guatemala… et Canada
Quand on lit des nouvelles, dans les médias de masse, à propos de la violence dans les pays en développement, on a tendance à mettre l’ensemble de cette violence dans le même panier, celui de la délinquance dû à la pauvreté. S’il est vrai que pauvreté engendre délinquance, il n’est pas nécessairement vrai que toute délinquance civile mène à la violence et à la guerre civile.
L’histoire de la guérilla au Guatemala est assez simple en fait. Après le coup fomenté par la CIA, en 1954, il y eu des années de régime militaire et de répression contre les indigènes et les paysans. Après un temps, avec plus rien à perdre, les gens se sont révoltés et ont commencé une révolution armée. Quand je dis « plus rien à perdre », je pèse mes mots; les témoignages de viols et de meurtres commis contre les communautés paysannes sont légion ici. Les histoires d’horreur se suivent les unes après les autres. Ainsi, sachant qu’ils se feraient peut-être tuer pour rien, ils ont décidé de se battre, au risque de faire tuer pour quelque chose.
La guerre civile, au Guatemala, c’est encore – 14 ans après la fin du conflit armé – une plaie ouverte. On parle de plus de 200 000 morts pendant ce conflit, dont 93 % serait tombé sous les balles de l’armée, de la police et des patrouilles de la mort. (Chiffres de la mission de l’ONU au Guatemala – Voir aussi à ce sujet le film documentaire When the mountains tremble, de Pamela Yates, 1983).
Les accords de paix prévoyaient plusieurs choses pour les mayas, ayant acceptés d’abandonner la lutte armée. Parmi ces choses, un tribunal devait se pencher sur les crimes commis contre eux pendant la guerre; cette institution existe encore aujourd’hui et on rapportait récemment la première condamnation d’importance dans ce dossier. Le sentiment ici est que tous ces crimes demeureront impunis. Un autre gain était une loi protégeant les communautés contre l’installation sauvage d’entreprises utilisant les ressources naturelles de leurs terres en leur donnant un droit constitutionnel d’être consulté sur les questions des terres et de l’environnement concernant l'implantation d'entreprises.
Aujourd’hui encore, pourtant, cette reconnaissance des mayas sur leurs terres n’est pas respectée.
Aujourd’hui encore, il y a de la violence commise contre les mayas du Guatemala sous forme de menaces, d’intimidation et d’assassinats.

Et aujourd’hui, je vais vous dire pourquoi ça vous concerne.
Ça vous concerne parce que le Canada est directement responsable pour une partie de cette violence et ce pillage des ressources naturelles du pays au détriment de la population du Guatemala. Oui, oui, le Canada.

Contexte: Le discours de la droite économique
Vous connaissez déjà l’éternel discours réducteur des tenants de la droite économique: ce discours est présent dans tous les pays gouvernés par des gouvernements de droite, US et Canada inclus. Ce discours prétend que si vous ouvrez vos frontières, et permettez l’investissement étranger dans votre pays, vous en profiterez, car il y aura des retombées et de l’emploi créé par ces investissements. Ainsi, les tenants de la droite sont toujours favorables à l’ouverture des marchés sans conditions, et à l’offre d’avantages généreux aux entreprises pour qu’elles viennent investir chez vous.

Dans la réalité, au Guatemala, voici comment… ça pourrait se passer.
Appelons ça…une petite fiction économique sur le Guatemala, la violence et le Canada.

Petite fiction économique sur le rôle du Canada dans la violence au Guatemala
Imaginons une vaste étendue de terre, occupée par des agriculteurs, des terrains vagues, de la forêt, deux rivières, et quelques villages. Vous, canadien, fondez une entreprise pour profiter de l’ouverture des marchés et de l’offre fiscale alléchante du gouvernement du Guatemala. Vous voulez vous y installer et désirez y faire de la prospection minière pour y exploiter une mine d’or ou d’argent, puisque l’on croit que le sol de cette région est riche en minéraux recherchés.
Le gouvernement du Guatemala trouve ses appuis dans les grandes entreprises actuelles – locales et étrangères. Afin de conserver ces appuis, le gouvernement actuel est donc – comme tous ceux qui l’on précédés avant lui – très à l’écoute des demandes et besoins de ces entreprises. En installant votre mine ici, vous aurez une oreille attentive au parlement en plus de profiter de conditions fiscales avantageuses.
Vous investissez donc – et en théorie, ces investissements sont censés être avantageux pour le pays qui vous accueille. Pourtant, vous offrez des emplois à des conditions misérables, et vos équipements de prospection et de forage demandent beaucoup d’eau pour leur système de refroidissement. Vous détournez ainsi l’eau d’une des rivières, ajoutez quelques produits chimiques pour améliorer l’efficacité du système, et rejetez le résidu, sans traitement, après usage. Les intenses vibrations de vos explosions et forages causent des fissures dans les maisons du village le plus proche.
Dans les villages du voisinage, les paysans organisent une consultation publique et votent à 95 % contre l’installation de votre entreprise et votre mine sur leurs terres. Vous menez votre cause en cour suprême et faites valoir par vos avocats que la loi donne le droit aux communautés d’être consultées, mais n’oblige personne à accepter le résultat de cette consultation. Vous pouvez donc poursuivre l’exploitation de votre mine.
Vous faites soudainement face à deux problèmes. Le premier vient du ministère de l’environnement, puisque certains paysans prétendent que vos résidus contaminent la rivière qui est leur principale source d’eau potable. Le Guatemala est un pays pauvre et ses ministères les moins nantis n’ont que peu de moyens. Vous vous présentez donc avec quelques avocats spécialisés aux audiences sur l’environnement et démontrez à coup d’études et de rapports maison que vous n’êtes pour rien dans la contamination de la rivière. Que cette contamination arrive au moment où vous avez débuté vos activités près de la rivière est une coïncidence. Devant les quelques chiffres – vous leur avez fournis, ils n’ont pas les moyens d’engager des consultants privés - que le ministère apporte aux audiences, les juges concluent que vous n’êtes coupable de rien.
Le second problème vient d’une rumeur de syndicalisation des employés, qui ne semblent pas satisfaits de leurs conditions de travail. Évidemment, il s’agit de condition de misère, qu’aucun canadien n’accepterait. La loi du travail du Guatemala donne effectivement le droit aux employés de se syndiquer. Vous avez entendu parler d’entreprises de "sécurité" qui se chargent de ce genre de problèmes, alors vous les engagez. Qu’ils fassent de l’intimidation et des menaces aux leaders syndicaux ne relève plus de votre conscience. Qu’ils fassent du lobby pour faire retarder l’accréditation et vous permettre de faire faillite entre temps et repartir la mine sous une autre dénomination, c’est limite, mais c’est légal, alors pourquoi vous sentiriez-vous coupable?
Une fois ces problèmes réglés, vous exploitez donc la mine.
Ayant réalisé que vous auriez à défendre votre image au Canada, vous avez lancé quelques projets d’investissement "désintéressés", comme une petite école de campagne et un petit hôpital. Comme il s’agit d’aide internationale, vos avocats ont monté les documents de ces investissements et les ont soumis à l’ACDI (l’Agence canadienne de développement international), qui a financé les projets en grande partie à même les fonds publics canadiens. Vous pouvez donc dormir sur vos deux oreilles, puisque vous êtes un bon citoyen corporatif, vous en avez même la preuve avec cette école et cet hôpital.
Vu le salaire ridiculement bas que vous versez à vos travailleurs, sans aucun avantage social accompagnant celui-ci, et compte tenu de l'explosion des cours de l'or, vous dégagez rapidement de très bons profits. Étant donné l’ouverture du Guatemala envers les entreprises étrangères, vous profitez d’un régime d’impôts au taux de 15 % de vos profits. Au Canada, vos actionnaires n’en reviennent pas du profit que vous dégagez par actions. Vous êtes un succès, on vous vante, et vous versez de généreux dividendes à tous les trimestres.
Les choses vont bon train, alors vous agrandissez. Autre consultation publique, qui se prononce contre, mais vous connaissez la procédure, et la loi et le gouvernement sont de votre côté. Pour agrandir, vous avez besoin de fonds, alors vous faites une autre émission publique d’actions – puisque vous êtes désormais coté à la bourse. Les courtiers se jettent sur ces actions recherchées, vu le dividende alléchant que vous versez.

A ce stade-ci, au Canada, vous recevez des prix des chambres de commerces et des institutions regroupant les grandes entreprises. Vous êtes cités en modèle dans des revues pour l’excellence de votre gestion et pour votre vision. Bref, vous êtes un success story dont on devrait s’inspirer.
Pendant ce temps, au Guatemala, les maisons sont fissurées et les gens ont peu de moyens pour les réparer. La contamination de l’eau favorise l’émergence de maladies infantiles. Certains membres des communautés se sont fait convaincre qu’il est mieux pour eux d’avoir un emploi, même à des conditions misérables, que pas d’emploi, ce qui divise certaines familles – les retombées économiques de la droite… mais attendez, ces retombées économiques, elles sont où exactement? Les pauvres salaires sont utilisés pour réparer les dégâts, acheter de l’eau propre, traiter les maladies des enfants…
Comme il n’y aucun programme social digne de ce nom au pays, l’argent des impôts (le maigre 15 %) est allé à l’administration générale du gouvernement. Le reste des retombées économiques promises par les tenants de la droite, il est allé où, sinon dans vos poches (sous forme de généreux bonus vu votre excellente performance de gestionnaire), dans les poches de vos actionnaires (dividendes), dans les poches des courtiers (commissions) et autres professionnels vous entourant (vos avocats méritent bien leurs honoraires, avec les dossiers dont ils se chargent ici). Voilà la réalité.

Réalisant cela, les gens des communautés où est installée votre mine commencent à se révolter, à former des petits groupes de discussion pour protester contre cette mine qui ne respecte pas leurs décisions communautaires, cette mine qui utilise et contamine l’eau de leur rivière, cette mine qui rend les enfants malades et détruit les maisons… Bref, un mouvement de protestation sociale se met en place, et des leaders communautaires émergent. Les manifestations contre votre mine, contre votre entreprise, se font de plus en plus pressantes.
Une action s’impose: vous faites appel à votre sous contractant, la compagnie de "sécurité" privée, pour s’occuper du problème. Après quelques semaines, les leaders sont clairement identifiés, et lors d’une manifestation particulièrement virulente devant les portes de vos installations, des coups de feu sont tirés, des manifestants sont blessés, deux sont mortellement touchés. Heureux hasard pour vous, les deux morts sont justement deux des leaders les plus écoutés et les plus actifs de la communauté. Leur mort fera certainement réfléchir l’ensemble des manifestants.
La compagnie de sécurité explique aux forces de l’ordre que les manifestants ont perdu le contrôle, qu’ils ont foncés dans les installations, ont volé des armes aux employés de la sécurité et sont ensuite entre-tués dans leur délinquance. Vous n’étiez pas présents, et de toute manière, l’affaire s’est déroulée entre la compagnie de sécurité et les locaux, ça ne vous regarde donc pas vraiment.
Comme il y a eu des dommages, vous émettez tout de même un communiqué de presse, expliquant qu’une manifestation a tourné à la violence près de vos installations au Guatemala, et que malgré quelques dommages à vos installations et le décès accidentel de deux manifestants – visiblement touchés par des balles perdues issues des armes qu’ils avaient dérobées – les choses sont rentrées dans l’ordre. Vous déplorez même quelques dommages à la petite école que vous aviez fait construire pour la communauté.
Les agences Reuters et Presse Canadienne recopient cette déclaration dans un communiqué officiel et les médias de masses diffusent la nouvelle partout au Canada.
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Au Canada, en se levant le matin et prenant un bon déjeuner, un lecteur anonyme lit la nouvelle en question et secoue la tête. « Et que ce n’est pas drôle, les pays pauvres, où la violence et la délinquance règnent. Ces gens là ne s’en sortiront donc jamais? S’ils travaillaient et s’éduquaient aussi, au lieu de se tirer dessus, ils seraient moins pauvres et moins violents, non? »
Évidemment, ce lecteur anonyme ignore quelques détails sur la situation. Il ignore les faits, puisque seul votre communiqué, votre version, a fait l’objet de la nouvelle. Il ignore également que les deux leaders assassinés par votre sous contractant en sécurité étaient parmi les plus éduqués de leur communauté; l’un était enseignant et l’autre était vice-président d’une coopérative locale faisant la promotion du commerce équitable.
Ce lecteur anonyme, il ignore aussi que lorsqu’il a eu les résultats trimestriels de son REER par son courtier – enfin en hausse après une période maussade – et qu’il était si content de voir ces résultats, il ignore que ces résultats sont en grande partie dû à la hausse de valeur des actions de votre mine que son courtier lui a fait acheté lors de votre dernière émission d’action pour financer l’agrandissement de votre mine au Guatemala.
Il ignore également que Exportation et Développement Canada, dont le budget dépend de fonds publics, a financé le démarrage de vos activités au Guatemala sous forme de prêts et de garanties de prêts.
Ce lecteur anonyme n’ignore peut-être pas que sa mère, à la retraite depuis de nombreuses années, touche mensuellement la pension de vieillesse du gouvernement du Canada. Mais il ignore certainement que le Régime de Pension du Canada a investi plusieurs milliards de dollars dans le secteur des mines coté en bourse, dont plusieurs millions sous forme d’actions dans votre entreprise.
Vous remarquez que des groupes locaux, au Canada, commencent à soulever des questions sur vos agissements. Vous vous engagez dans une campagne de relations publiques, et vous continuez à contribuer généreusement aux campagnes politiques et aux groupes de lobby défendant vos intérêts au parlement canadien. Après tout, tant que les lois canadiennes ne vous empêchent pas de violer les droits humains à l’étranger, d’ignorer les lois sur l’environnement et sur le travail, vous ne courrez aucun risque. L'aventure se poursuit, votre succès continue.

Conclusion : …Et vous?
Voilà comment les choses… pourraient fonctionner dans la réalité.
Mais évidemment, il est plus simple (et simpliste) de croire que les meurtres et la violence qui anime le peuple du Guatemala est dû à la pauvreté et à l’ignorance. Cette petite fiction n’aurait d'ailleurs pas dépareillée le chapitre d’un roman de Jean-Jacques Pelletier (si elle était mieux écrite, bien sûr).
Êtes-vous de ceux qui pensent que ce genre de chose est exagérée? Ou êtes-vous de ceux qui ne voulez pas savoir? Ou êtes-vous de ceux qui crient à la paranoïa dès qu’ils lisent quelque chose dont l’ampleur les dépasse?
J’imagine que comme je l’ai été avant vous, vous êtes plutôt de ceux qui, comme mon lecteur anonyme fictif, ne savent tout simplement pas que c’est ça qui se passe. Que leur argent, leur régime de retraite et leur gouvernement financent la violence au Guatemala, financent la répression, financent le viol des droits humains et financent les assassinats.

Bon, et bien maintenant vous savez.
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[L’auteur de ce texte est un auteur de fiction. Ce texte est donc une fiction. Toute ressemblance avec des compagnies minières canadiennes installées au Guatemala relève de la coïncidence fortuite. La réalité suivra dans un billet à part.]
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Le Guatemala par l'affichage (1)

Comme je le fais maintenant presque à chacun de mes voyages, je m'amuse à photographier des affiches, annonces et panneaux qui montrent que parfois, une culture offre un humour bien involontaire à ses visiteurs.Quelques exemples guatémaltèques ont attirés mon attention.



Rien de plus rassurant en arrivant dans une ville inconnue que de voir, dès sa première soirée, une affiche annonçant fièrement le commerçant d'armes à feu. Ça enlève toute idée d'aller voir du côté du restaurant italien affiché dans le même édifice.



Sérieusement?



Malheureusement, cet édifice n'abrite plus de cinéma, mais plutôt une épicerie.



"Tous les mardi, consultation avec des médecins cubains".
Ah, si on pouvait avoir ça chez nous aussi!



Dangereux le Guatemala? Pas si vous vous abritez derrière un bon rang de fil barbelé rasoir... Ah, tant qu'à y être, mettons aussi un cable électrifié à haute tension, juste au cas.



Firme de notaires et d'avocats. J'aime bien la voiture stationnée devant, qui donne le ton. Assez différente des voitures d'avocats de chez nous.



"Boucherie..." - "Hygiène et poids exact" - "Viande de haute qualité"
C'est fou ce que l'on prend pour acquis chez nous...
Ici, on fait référence à la viande vendue au mercado central, qui traîne là on ne sait combien de temps à la température ambiante, et qui est pesée avec une balance à la main et des rondelles artisanales comme contre-poids.
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à suivre...

dimanche 24 janvier 2010

Mi camino Maya: Zaculeu


Tel que mentionné dans mon billet précédent sur mon aller-retour à Huehuetenango, je m'y suis rendu pour pouvoir atteindre le site archéologique de Zaculeu, à quinze minutes de Huehue.
Zaculeu - qui veut dire Terre Blanche en Mam - est un site un peu particulier dans l'univers des ruines mayas d'aujourd'hui. En effet, le site de Zaculeu a fait l'objet d'une restauration en 1946-47 sous la coupe de la United Fruit Company, alors propriétaire du terrain où se trouvaient les ruines.
Le problème, évidemment, c'est que personne à la compagnie n'y connaissait quelque chose à l'archéologie, et que la restauration - plus une opération de solidification qu'autre chose - a été faite sans trop de subtilité ni considération pour les structures d'origine.
On a essentiellement recouvert les structures existantes d'une épaisse couche de plâtre, sans considération pour les constructions originales ni les décorations ou la couleur résiduelle.

Aujourd'hui, le visiteur qui débarque du chicken bus de Huehue à Zaculeu passe devant quelques kiosques vendant es churascos, des tortillas ou de la viande cuite sur charbon et arrive directement à la billetterie, opérée par un employé qui vend des billets aux locaux en famille pour 5 quetzales par personne... et aux rares étrangers pour 50Q l'entrée. Le visiteur se retrouve alors directement sur le site, qui est maintenant situé en bordure de la route régionale.
On sait peu de choses de Zaculeu, car, contrairement aux Quiché, les Mam n'ont à peu près rien laissé comme littérature de l'époque de l'apogée de leurs cités après la conquête. Zaculeu a été occupée à son apogée entre l'an 1300 et l'an 1500 et c'est de cette époque que datent les structures encore debout sur le site.
En terme d'édifices, on peut aujourd'hui y voir quelques pyramides, un palais et un jeu de balle.
Passé le choc de voir tout recouvert de plâtre et de ne voir qu'ici et là des pierres de la construction d'origine, il est tout de même agréable d'imaginer de quoi avait l'air ces pyramides à l'époque pré-colombienne.

Le jeu de balle - de la variété fermée, comme à Iximche - est d'assez bonne taille, mais c'est peut-être la structure qui a été le plus "abimée" par la restauration; on a peine à y voir la construction originale tant le plâtre a été appliqué de manière épaisse et inégale.

J'avais lu que l'endroit était idéal pour un pique-nique alors j'avais acheté des tortillas et des galletas à Huehue et j'ai profité d'une tienda in situ pour acheter quelque chose à boire. Les enfants de la dame de la tienda semblaient assez impressionnés de voir un blanc à Zaculeu. J'en ai conclu qu'il n'était donc pas anormal que je sois le seul gringo sur tout le site ce jour-là... J'ai également profité du peu d'ombre disponible - près des arbres en bordure du site - pour déguster mon repas, sous le regard attentif des enfants en question, qui n'ont manqué aucun moment de ce repas, à part peut-être quelques secondes pendant lesquelles la mère leur a parlé et pendant lesquelles j'en ai profité pour prendre une photo du moment.

L'ensemble des ruines de Zaculeu se compose donc de la partie restauré avec incompétence, d'une partie non restaurée et d'une partie jamais excavée. Le contraste entre les structures restaurées et les non restaurées est assez étrange, mais pas inintéressant. Ce que l'on sait de Zaculeu nous vient en fait des textes Quiché ayant survécu à la conquête espagnole. Il faut dire que d'après ces textes, les Quichés auraient conquis la plupart des terres Mam de l'époque (nous parlons des environs de 1400), pour les perdre plusieurs décennies plus tard (aux environs de 1475). Les Mam auraient donc repris le contrôle du secteur de Zaculeu... avant l'arrivée des espagnols.
Pendant ma visite, j'ai noté le nombre de familles locales qui étaient venus sur le site simplement pour marcher ou pique-niquer... et le nombre de gens qui ne respectent pas les indications de ne pas grimper sur certaines structures. Évidemment, comme plusieurs édifices ne sont plus recouverts de matériaux originaux, on peut grimper sur la plupart des grandes structures de Zaculeu. Une famille en particulier a eu beaucoup de plaisir à tenter d'escalader la paroi du jeu de balle, le père aidant les enfants à tenter d'atteindre le haut de l'édifice.

C'est à ce moment que j'ai remarqué à quel point le travail de restauration avait été mauvais sur cet édifice à comparer aux autres (où il a été moyen, mais tout de même pas si mauvais, on dirait que le jeu de balle n'est pas du tout une construction originale mais a été érigé entièrement en plâtre).


Je me suis ensuite dirigé vers l'extrémité nord-est de la plaza principale du site et j'ai grimpé une structure non identifiée qui domine la plaza pour avoir une vue en plongée sur la plaza et sur la pyramide principale de Zaculeu. Je note au passage qu'à part quelques identification sommaire, il n'y a aucune information disponible sur le site lui-même, ce qui est asses rare sur les sites archéologiques. Une note laconique indique que les deux petites structures au centre de la Plaza I sont des "tombas", mais rien n'indique que l'on a découvert quelque chose à l'intérieur ni que l'on a excavé ces tombes.
Après Takalik Abaj et Iximche, Zaculeu me fait réaliser à quel point les sites mayas du Guatemala sont sous-exploités. Je ne parle pas simplement d'archéologie, mais aussi d'accès. Par comparaison, j'ai réussi à visiter neuf sites mayas au Mexique en à peine quelques jours (en janvier 2007) alors qu'il semble que chaque site visité au Guatemala (j'inclus le magnifique Tikal en 2005) demande un effort considérable pour s'y rendre.


En terminant ma visite de Zaculeu, je grimpe la pyramide principale du site pour avoir une belle vue en plongée de l'ensemble des ruines. Je prends une photo de la pyramide sur laquelle j'étais un moment auparavant et note que la reconstruction ne paraît pas si mal, vue de loin. J'imagine que les structures n'étaient pas dans un si mauvais état lors de leur "découverte" dans les années 40... Et bien sur, les éléments ont causé une certaine érosion sur le plâtre ajouté il y a maintenant plus de 50 ans.

On sait par les écrits espagnols que les conquistadors ont d'abord fait face au puissants Quiché avant de s'attaquer aux Mam, plus au nord. Après un massacre des mayas Mam par les espagnols à Malacatancito (situé près de la route entre Huehue et Xela aujourd'hui), les mayas se sont réfugiés à Zaculeu, où, après plusieurs semaines de siège, le régnant de Zaculeu d'alors, Caibal Balam, a fini par déposer les armes face aux espagnols.


Malheureusement pour moi, au moment de ma visite, le musée du site était fermé - la même chose s'était produite à Iximche. Je n'ai donc pas pu voir si on a découvert des artefacts lors des fouilles de Zaculeu, ni avoir plus d'information sur le site et son historique.
Je me suis donc contenté de marcher parmi les ruines restaurée, et de prendre quelques photos de plus... croisant ici et là quelque autre visiteur.

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Le centre-sud du Guatemala n'a aucun autre site d'importance - à part Quirigua, situé à l'extrême est du pays alors que je suis basé à l'ouest. Pour visiter d'autres sites mayas au Guate, il faut se rendre au nord, plus au nord encore que Tikal, mais à ce que j'ai lu dans les journaux et les livres, la plupart des sites ne sont pas excavés, ou sont partie de projets actuels en archéologie et sont difficile d'accès. Zaculeu sera donc mon dernier site archéologique du Guatemala pour ce séjour-ci.
Espérons que le gouvernement du Guatemala saura préserver cette incroyable richesse culturelle et rendre plus accessible certains de ces sites. On parle d'El Mirador comme une immense cité qui ferait passer Tikal pour un village, mais on parle aussi de l'état alarmant des ruines et de la présence de plus en plus accrue de narcotraffiquants dans le secteur du Péten. Qui sait si je ne me pointerai pas dans le secteur dans quelques années?
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A Huehue

Huehuetenango, ou Huehue (prononcer "Ouéoué"), est une petite ville à quelques heures au nord de Quetzaltenango. Il y a un site archéologique près de Huehue, alors je m'y suis rendu ce samedi pour visiter le site en question.
Comme pour Takalik Abaj, le site lui-même est intéressant même si mineur - et ne vaut peut-être pas l'effort des 5-6h de transports aussi nombreux qu'inconfortables mais nécessaires pour l'atteindre de Xela -, mais c'est la route pour s'y rendre qui est la véritable aventure du jour.
Quelques photos sur mon... expédition... à Huehue, donc.
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Minerva, Xela, je prends un chicken bus pour Huehue et remarque que contrairement à la plupart des pilotos, celui-ci n'a pas décoré son bus avec des iconographies religieuses. Un conducteur athée! Peut-être qu'il conduira mieux, vu qu'il ne mets pas sa vie entre les mains d'un Dieu? Hehehe, ne vous inquiétez pas, il conduisait autant en maniaque que les conducteurs croyants.



Il y a une épaisse couche de smog sur Xela depuis plusieurs jours maintenant, et si je n'étais pas venu habiter ici plus tôt (en décembre), j'aurais pu croire que la ville est toujours recouverte d'une couche de smog. Ici, près de Cuatro Caminos, on peut voir ce smog, toujours présent dans la vallée au-dessus de Xela. On peine à voir le volcan Santa Maria...



Huehuetenango est une petite ville quelconque, un peu bordélique à l'arrivée (le terminus, une affaire aussi louche que La Minerva, est situé à 2 km du centre-ville). Le centro est tranquille, il y avait un petit marché de livres usagés devant l'église et la mairie. L'église est une affaire petite mais imposante, néoclassique avec des colonnes grecques massives.



Le seul autre édifice notable de Huehue est sa mairie, qui comporte une sorte de tour centrale pompeuse mais qui agrémente bien la vue dans le parque.



Ayant besoin de me rendre vers Zaculeu, j'ai emprunté un autre chicken bus, et celui-si avait une citation intéressante à partager avec ses passagers. (Ma traduction: "Je n'ai pas ce que je désire, mais j'aime ce que j'ai" - Jeu de mot car le verbe désirer et aimer est le même... autrement dit: "Je n'ai pas ce que j'aimerais avoir, mais j'aime ce que j'ai").



Comme j'avais lu dans le journal que les chicken bus de Huehue étaient en piteux état, j'ai voulu vérifier moi-même et ma foi, basé sur celui-ci, les journaux n'ont pas tort, les bus sont maganés...



Je n'ai pas pu résister à prendre cette scène en photo. Nous nous étions arrêté à Cuatro Caminos, sur le chemin du retour, et un groupe de touriste s'était arrêté à la station d'essence - voir leur bus de luxe au fond, au centre. J'ai tout à coup remarqué leur excitation de voir un vrai chicken bus en route, ils se sont précipités vers la route pour prendre des photos et des vidéos (deux ont des caméras vidéo). Ils ont pris plusieurs clichés - et seront fiers de montrer qu'ils ont vu un vrai chicken bus... Je ne sais pas si, une fois à la maison, ils remarqueront le gringo au chapeau rouge qui les regardait et les a pris en photo! (Je ne pense pas qu'ils auraient été aussi excités par un chicken bus s'ils avaient, comme moi, fait 5 heures de route dans ces véhicules aujourd'hui...)
L'affaire n'est pas sans me rappeler une photo que Suze avait prise à Antigua en 2005 d'un groupe de touristes qui prenaient un mariage en photo à la sortie de Le Merced.
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samedi 23 janvier 2010

Traverser La Minerva (Vidéo)

Voici un petit vidéo de moi-même en train de traverser le mercado la Minerva de Xela.
J'en ai parlé à l'occasion, de ce marché chaotique et achalandé (ici et ici, entre autres billets)...
Prière de noter que j'avais camouflé ma caméra et qu'ainsi, les mouvements et le cadrage sont loin d'être raffinés.
J'ai ajouté quelques notes ici et là sur ce que l'on voit et entends, mais il y a bien plus que ce que j'ai noté. je vous invite à remarquer les fruits - abondants dans cette portion du mercado - ainsi que les transports en charriots à deux roues, une constante de la Minerva peu importe l'heure à laquelle on traverse le marché.
Une fois encore, je filmais pour pouvoir montrer l'ambiance, l'esprit du lieu, les sons et les sollicitations, alors on excusera la réalisation improvisée.

Mot croisé guatémaltèque

Je suis cruciverbiste à mes heures, c'est-à-dire que je suis un amateur de mots croisés, un passe-temps que j'ai hérité de mon père, grand cruciverbiste devant l'éternel. Je me souviens encore de certains samedi après-midis, alors que j'étais plus jeune, à passer des heures à tenter de résoudre les puzzles alors publiés dans l'Actualité, une fois par mois, et réalisés par Hannequart. On ne parle pas ici de petits mots croisés résolus en quinze minutes sur le coin d'une table, mais de mots croisés de compétition, que nous prenions parfois plus d'un mois à terminer, travaillant parfois sur deux ou trois en même temps. Il faut dire qu'Hannequart avait l'habitude de faire de chaque définition  une énigme en soi.
De cette époque m'est aussi venu l'habitude de jouer au verbicruciste amateur également. Si le cruciverbiste résout des mots croisés, le verbicruciste en conçoit. Voici donc - pour mon père et pour les amateurs de ce genre de choses - un petit mots croisés de mon cru, sur le thème du Guatemala.
(Cliquez sur l'image pour obtenir un fichier grand format).

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[Note: pour ma part, je reconnais un bon verbicruciste au faible nombre de cases noires de la grille. Il est facile de créer un mots croisés ardu à résoudre si on le remplit de cases noires. Celui que je propose ici n'est pas trop mal réussi, mais a deux ou trois cases noires de trop à mon goût, ce qui ne fait que prouver mon amateurisme à ce jeu - On m'excusera, mais j'ai dû travailler sans dictionnaire, ce qui complique la vie, croyez-moi.]

jeudi 21 janvier 2010

Sushi, sake... et skype

Je pensais éventuellement faire un petit billet sur l'avancée technologique qui me permet de plus en plus de rester en contact et de publier plus de choses pendant mes séjours à l'étranger.
En janvier 2000, lors de mon départ du Québec pour Vancouver, mon ordinateur de l'époque (sur Win98) avait une webcam et nous arrivions parfois à établir un contact visuel manière vidéophone avec des délais, des coupures et des saccades.
Aujourd'hui, avec des logiciels comme Skype, la chose paraît presque normale, pour peu qu'on dispose d'une connexion internet le moindrement fiable.
Si la chose est absolument agaçante dans les cafés internet (les gens parlent fort et ça dérange tous les autres usagers), dans le confort de sa chambre d'auberge de Xela, c'est autre chose.
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Plutôt que de faire un long billet sur cet autre petit miracle qui me fait apprécier notre époque technologique, je mentionne donc simplement que j'ai passé une très belle soirée ce soir, avec Martin, Sophie et Suze, une soirée de sushi, de sake et de skype :-)




J'étais à 3800 km de là, mais j'y ai passé la soirée.
Et ceci n'est pas qu'une phrase, puisque dans ma mémoire, je me souviendrai de cette soirée, je me souviendrai des blagues de Martin, du visage de Sophie prenant son dernier negiri... Je me souviendrai que - grâce à une fonction de partage d'écran - nous avons regardé tous les quatre ensemble, des photos de Megan... Je me souviendrai de Laïka qui ne voulait pas que Suze parte... Je me souviendrai que j'étais là.
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