samedi 18 février 2012

The Artist

Un des films les plus émouvants de 2011 est The Artist, et il se trouve que c'est également l'un des plus originaux de l'année. En effet, alors que le 3D est en train de devenir la norme plutôt que l'exception et qu'une majorité de films reposent plus sur les effets spéciaux que sur un scénario intelligent, The Artist arrive à contre-courant de tout ça, car il s'agit d'un film en noir et blanc, et muet de surcroît!
L'histoire se déroule justement au moment de l'invention du parlant, et raconte la descente aux enfers de George Valentin, une vedette du muet à Hollywood, qui n'arrive pas à accepter la nouveauté et à faire le passage au parlant. En parallèle à sa propre déchéance, il assistera à la montée fulgurante de Peppy Miller, une nouvelle venue dont il a collaboré à la découverte en début de carrière.
Bien que réalisé et scénarisé par des français, le film a été tourné à Los Angeles, et en anglais. Évidemment, la langue de tournage importe peu, puisque les dialogues (minimaux) passent par des diapositives intercalées aux scènes du film, comme ça se faisait à l'époque du muet.(bien que l'on distingue par le mouvement des lèvres des acteurs qu'ils s'expriment en anglais).
Douglas Fairbanks... et George Valentin
The Artist exploite donc une idée particulièrement originale (un film muet en 2011), en plus de mettre en scène un pan de l'histoire du cinéma. Les caractéristiques physiques et les films dans lesquels jouent George évoquent directement la carrière de Douglas Fairbanks, une des grandes vedettes du muet (qui n'a eu l'opportunité de jouer que dans quatre films parlants). Mais comme il s'agit tout de même d'une production réalisée au 21e siècle, le film se permet à la fois une réflexion et un hommage au cinéma muet. Le réalisateur se permet surtout de jouer avec les conventions du genre, puisque contrairement aux premiers films de Chaplin et Fairbanks, nous pouvons faire du son ou jouer sur certains retournements qui ne fonctionneraient pas avec le cinéma parlant traditionnel.
Ainsi, le cinéaste ne se prive pas pour jouer avec son film, au plus grand plaisir des spectateurs. Je retiens à titre d'exemple cette scène succulente où le personnage rêve qu'il s'entend jouer et que les accessoires font des bruits alors que lui-même n'a toujours pas de voix.
Les deux interprètes principaux, Jean Dujardin et Bérénice Bejo, sont merveilleux dans leurs rôles respectifs, et c'est particulièrement remarquable à une époque où les spectateurs sont habitués à un différent type de jeu de la part des acteurs, dans les films contemporains. L'apparente facilité de leur jeu rend d'autant plus admirable leur performance. Quand à la présence délirante du chien, elle a déjà été fort remarquée, et avec raison; il devient un personnage à part entière.
Le parti-pris des créateurs pour le cinéma muet, à une époque où le 3D prend de plus en plus de place et est utilisé par des réalisateurs renommés comme Spielberg ou Scorcese, fait inévitablement penser à la trilogie de passage du muet au parlant de Charlie Chaplin (City Lights, Modern Times et The Great Dictator), dans laquelle le génie de Chaplin lui assure ce passage avec succès, tout en rendant hommage au muet, en exprimant son amour pour ce cinéma, mais sans demeurer aveugle à la nécessité d'adopter le changement.
Si le George Valentin de The Artist avait pu voir la fin de The Great Dictator, il aurait d'ailleurs entendu le conseil de Chaplin: "You must [speak]. It's our only hope." Il est impossible que les créateurs de The Artist aient parsemé le film de ce genre d'hommages par hasard et la subtilité avec laquelle ils le font est également remarquable.
The Artist est donc un film à voir (et revoir) et ses nombreuses nominations aux Oscars sont amplement méritées.
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