jeudi 28 novembre 2024

Frida et Diego (3): La Casa Azul et les portraits de la SEP

Troisième et probablement dernier billet sur la présence de Frida Kahlo et Diego Rivera à Mexico lors de ce séjour de 2024.

La maison familiale des Kahlo, où Frida est née, a grandi et a habité une grande partie de sa vie avant d'y décéder, est située dans la colonia Coyoacan (qui était un village dans la jeunesse de Frida). Elle est appelée Casa Azul ("maison bleue") à cause du bleu spécifique que Frida a fait peindre sur ses murs quand elle s'y est installée avec Diego. Il s'agissait du même bleu qu'elle avait utilisée pour sa casa-estudio de San Angel.

La Casa Azul est probablement le lieu le plus visité de Mexico si je me fie au fait que c'est le seul endroit en 45 jours ici où j'ai non seulement dû réserver mon billet d'avance, mais le faire plus de 10 jours d'avance, tellement l'endroit est populaire auprès des visiteurs (il affiche complet 10-12 jours d'avance constamment depuis que je suis à Mexico).

La visite vaut l'attente. Et le prix du billet (le site le plus cher que j'ai visité pendant ce séjour également). Pour le lieu (c'est beau, ça respire l'appréciation de la beauté et de la nature comme maison), pour la signification du lieu (studio où Frida a réalisée plusieurs de ses oeuvres), les inspirations, les objets de la vie courante de Diego et Frida, et, évidemment, pour l'émotion ressentie devant ces objets, ce lieu mythique de Mexico, et pour porter ses respects devant l'urne contenant les cendres de la célèbre peintre.

On entre à la Casa Azul avec joie, on y découvre plein de détails, on lit des lettres, on profite de chaque coin, on ne veut rien rater, on ignore la foule (car évidemment, comme c'est populaire, il y a foule), on refait une partie du trajet, on prend des photos souvenirs, et des heures plus tard, on dirait qu'on ne veut toujours pas quitter l'endroit.


Lors de notre visite, les décorations d'el Dia de Muertos étaient encore de mise, malgré que la fête était passée quelques jours plus tôt. La Casa abrite aussi le Museo Frida Kahlo, qui propose diverses expositions entre ses murs.


Détail de la décoration en façade de la maison, Calle Londres, Coyoacan.


Frida et Diego étaient des grands amateurs de culture précolombienne. Dans la vaste cour, on retrouve donc une pyramide, avec des artefacts et sculptures précolombiennes originales.


Cour intérieure, avec une note pour les visiteurs.


Studio de Frida. On remarque évidemment la chaise roulante, elle qui a éprouvé des problèmes physiques toute sa vie durant, problèmes qui se sont aggravés dans les dernières années passées à Mexico.


Cette portion de la visite était vraiment fascinante. Exposition de quelques oeuvres de Frida Kahlo, avec en avant-plan des pièces et objets dont elle s'était inspirée pour réaliser ses tableaux.


Autre tableau avec la sculpture qui en a inspiré le personnage central.


Art précolombien dans la cour.


L'Altar de Muerto était encore sur place pour la visite. Notez l'horloge en pierre au plafond de cette pièce extérieure.


La vaste cour comporte son lot de plantes et de sentiers, et arbore une partie de la collection d'artefacts précolombien de Diego Rivera.


Vue du patio central.


Autre sculpture préhispanique dans le jardin.


Altar de Muerto.


Patio. Les couleurs primaires et vives évoquent à la fois la culture aztèque et les édifices coloniaux espagnols.


Une rallonge (réalisée par l'architecte et peintre John O'Gorman, celui-là même qui a réalisé les casas-studios pour le couple) a été construite quand Diego et Frida ont repris la maison familiale afin d'avoir plus de place pour y installer le studio de Frida et qu'elle puisse se déplacer plus facilement malgré ses problèmes physiques.
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La visite de la Casa Azul aurait complété ce tour d'horizon de l'omniprésence de ce couple fascinant à Mexico et de l'amour que porte à ces deux icônes de l'histoire et la culture mexicaine la ville et les habitants de Mexico.

Puis, voulant profiter encore du talent incroyable de Diego Rivera, nous sommes allé visiter la SEP (Secrétariat d'Éducation Publique, autrement dit, l'édifice abritant les bureaux du ministère de l'éducation). Entre 1923 et 1929, Diego Rivera y a réalisé des séries de murales monumentales recouvrant quasi tous les murs des deux cloitres de cet immeuble, devenu une référence en la matière à Mexico.
Et quelle ne fut pas ma surprise d'y apercevoir ceci:


Un homme debout, un homme assis, sur une des murales du mur d'un escalier de côté du premier patio, à l'étage supérieur. L'homme assis est un autoportrait de Diego Rivera.


Puis, sur une des murales historiques sur les combats sociaux de l'histoire du Mexique, on retrouve le portrait de Frida Kahlo, utilisé ici par Diego Rivera pour un de ses personnages de jeune femme engagée socialement. La murale est datée de 1928. C'était l'année de leur rencontre.
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mardi 26 novembre 2024

Tlatelolco - cité Aztèque méconnue

Je suis allé faire un tour du côté de Tlatelolco l'autre jour. Si je dis ça de manière un peu désinvolte, c'est que dans la plupart de mes voyages, quand je vais visiter un site archéologique, je dois prévoir du temps de déplacement, de visiter le site, le retour, planifier tout ça, chercher les transports, bref, généralement, à quelques exceptions près, les sites archéologiques précolombiens en Amérique demandent une journée pour s'y rendre et les visiter, et parfois plus. 

Ma visite de Tenochtitlan à mon arrivée à Mexico, site majeur que j'ai pu visiter en pleine ville, accessible par le métro à quelques stations d'où je me loge, m'avait déjà impressionné par la facilité d'accès à comparer aux nombreux sites mayas ou incas visités dans mes voyages antérieurs. Évidemment, comme je fais des recherches aussi avant de voyager, je m'y attendais quand même.

Tlatelolco, je n'avais que peu entendu parler - et le site m'était totalement inconnu avant de lire sur la région de Mexico en préparation de ce séjour.

Tlatelolco était une cité Mexica (Aztèque), donc même civilisation et culture que Tenochtitlan, mais située plus au nord, et fondée un peu plus tard (vers 1330) par quelque noble dissident de Tenochtitlan. C'est à Tlatelolco qu'a eu lieu une des dernière bataille lors de la conquête, entre les troupes espagnoles et les aztèques alors menés par Cuauhtémoc, leur dernier leader (encore célébré comme un héros à Mexico).

Je suis donc allé faire un tour du côté de Tlatelolco l'autre jour. Comme ça, en fin de journée. C'est que le site archéologique, où on a excavé les vestiges de l'ancienne cité aztèque, se trouve aujourd'hui dans la ville de Mexico - bien qu'au nord du centro - et comme il y a une station de métro à proximité, l'accès au site est d'une rapidité et d'une facilité déconcertante.

Même si cette cité était vaste et populeuse, le site lui même demeure modeste, car la plupart des structures ont été démolies par les espagnols, et le reste est encore enfoui sous les immeubles de Mexico. Comme pour Tenochtitlan, les vestiges de Tlatelolco ont été (re)découvert quasi par hasard lors de travaux d'aqueduc dans ce secteur de la ville et les archéologues ont entrepris leurs travaux à partir de ce qui était disponible pour les excavations.

De Tlatelolco, il ne reste donc qu'une douzaines de structures, basses pour la plupart, mais le site demeure fort intéressant à visiter.


Sur cette photo, on voit une grande partie du site archéologique, en plus d'apercevoir en arrière l'église coloniale Santiago - très clairement érigée à partir des pierres des édifices aztèques lors de leur démolition - et on peut aussi voir des immeubles à logement des années 60-70 complètement au fond. L'endroit est ainsi appelé «Plaza de las tres culturas», puisque s'y mélangent la culture aztèque, la culture coloniale espagnole et la culture contemporaine mexicaine.


En avant-plan, une partie du Templo mayor de Tlatelolco. Comme pour Tenochtitlan, la pyramide principale était consacrée à deux déités, et le temple avait donc deux côtés distincts - un double-temple en quelques sorte. Une structure typique de la culture mexica, et qui se distingue définitivement des temples mayas, par exemple.


Une des structures comporte plus d'une centaine de pierres qui arborent un symbole en spirale (on en voit 3 sur cette photo), je ne suis pas arrivé à savoir pourquoi ni ce que représentent ces spirales.


L'esprit Vagabond devant le Templo Mayor de Tlatelolco. Selon les archéologue, ce temple était plus élevé que celui de Tenochtitlan (probablement érigé quelques années plus tard aussi).


In situ, à Tlatelolco, il n'y a pas beaucoup d'artefacts visibles, à part les vestiges des grandes structures. Cependant, on peut encore apercevoir certains glyphes sur trois des côtés du Templo calendarico. Il est ainsi nommé car ces glyphes sont issus du calendrier pré-hispanique utilisé par les aztèques.


Comme à Tenochtitlan, on peut remarquer que les plus grandes structures comportent plus d'une étape de construction - la version plus haute du Templo mayor, par exemple, est érigée carrément par-dessus le temple précédent, donnant ces séries d'escaliers quand on n'a accès qu'aux vestiges inférieurs de la structure.


Quelques ruines plus basses, avec l'église Santiago. Elle a été érigée sur le site même, après la bataille décisive remportée par les espagnols et dédié à Santiago - certains soldats espagnols ayant rapporté avoir aperçu une apparition du saint pendant l'affrontement, ce qui leur aurait donné la victoire.


Même si le site archéologique se situe devant l'église, quand on contourne la plaza de las tres culturas, on peut encore apercevoir les restes d'autres structures excavées derrière l'église et près des immeubles à logement environnants.


Plan rapproché d'un glyphe du Templo calendarico. Les cercles à gauche montrent des chiffres (ici: huit), reliés au calendrier qu'utilisaient les mexicas.


C'était l'Esprit Vagabond (d'autres glyphes sont visibles sur cette photo), à Tlatelolco.

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lundi 25 novembre 2024

Mexico par l'affichage

Ça faisait longtemps, il me semble, que je n'avais pas regroupé quelques observations (parfois humoristiques) sur l'affichage à l'étranger. 

Évidemment, il n'y a rien de particulièrement drôle pour les capitalinos dans la plupart de ces photos, puisque l'humour vient toujours du décalage entre les cultures dans ce genre d'observation, mais dans chacun de mes voyages, ça m'amuse toujours de noter ce type de détails. Et quand il ne s'agit pas d'humour, ces observations démontrent toujours un élément culturel intéressant.


La rue, ou le boulevard indiqué par ce panneau m'a rappelé à quel point lors de ma jeunesse le poste de lanceur au baseball majeur était dominé par les latinos; en une affiche, on a deux des grands lanceurs des ligues majeures de ma jeunesse.


Trop belle coïncidence, non? Beetlemania?


Pas humoristique, mais amusant, que la ville - comme toutes celles plus touristiques du Mexique - ait aussi installé son nom (Ciudad de Mexico) dans un parc où à peu près aucun touriste ne passe.


Publicité de crème glacée qui dit: «L'argent n'achète pas le bonheur, mais il achète beaucoup de crème glacée». :-)


Hehehe, pas CDMX, mais la ville de Hugues Morin (HM)? Quoi? Comment est-ce possible? Haha... En réalité, il faut savoir que Mexico est divisée en grands arrondissements (eux-mêmes divisés en colonias (quartiers), et même si ce sont les quartiers qui sont les délimitations connues de la ville, les arrondissements ont leur mairie, leur logo, etc. La plupart ont désormais leurs initiales en lettres colorées comme les villes touristiques dont je parlais ci-dessus. Ici, en plus, je joue sur la possibilité d'inverser mes propres initiales (HM) car je me trouve en réalité derrière le signe de l'arrondissement Miguel Hidalgo (MH). :-)


Ok, celle-là surprend la première fois qu'on la voit, mais c'est évidemment une excellente idée côté sécurité (et surtout sentiment de sécurité): les premiers wagons du métro sont réservés exclusivement aux femmes et aux enfants de moins de 12 ans. Une ligne et un panneau font une démarcation sur les quais de toutes les stations du métro. Ça révèle une culture qui est totalement absente chez nous.


J'adore les noms de rues en voyage. Ici, la rue des amours! Pourquoi on n'a pas ce nom de rue au Québec?


Capté la fin de semaine dernière: «Ici, on vend des plantes carnivores».


Autre nom de rue, celui-là révélateur qu'on ne nomme pas les rues au hasard ici: la rue Pitagoras croise la rue Diagonal, ça ne s'invente pas.


Pas humoristique mais historique: les plus vieux panneaux de noms de rues que l'on peut encore apercevoir sont faits d'azulejos montés sur des poteaux en ciment.


Un banal signe d'interdiction de fumer? Il faut lire avec attention: «Espace 100% libre de fumée dans le Centre Historique»... cette affiche est sur une rue. Dans le centro historico, il est interdit de fumer, même à l'extérieur, dans les rues.


Celui-là étonne un peu le Québécois qui croyait que toute l'affaire était en faillite/fermée depuis un bout. Évidemment, Sears Canada est fermée, mais il semble que la société fasse encore des affaires rentables au Mexique, du moins.

Plus étonnant que le précédent, non? Et pourtant, en affaires ici!

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dimanche 24 novembre 2024

El Palacio de Bellas Artes

J'avais mentionné vouloir revenir sur cet édifice lors d'un billet antérieur... voici donc.

El Palacio de Bellas Artes est à la fois un musée d'arts et une salle de spectacle. Construit au début 20e siècle, l'édifice adopte une architecture Art Nouveau à l'extérieur et Art déco à l'intérieur, un mélange élégant (que l'on retrouve d'ailleurs dans quelques immeubles historiques de Mexico datant de la même époque).

La meilleure manière d'apprécier l'ensemble est donc de visiter le musée, ce qui permet d'admirer la décoration et l'architecture intérieure par la même occasion. Comme le musée comporte plusieurs étages, il est divisé en diverses expositions, dont une sur l'histoire et l'architecture de ce bâtiment absolument remarquable.

Bonus: l'intérieur des balcons et mezzanines du lobby, sur 2 des étages de l'édifice, est recouvert de murales emblématique de l'histoire (et de l'histoire de l'art) mexicain.

On entre au Bellas Artes et trois heures plus tard, on n'en sortirait pas encore tellement la visite qu'on peut y faire offre des richesses (architecturales et artistiques) à admirer. L'édifice à lui seul vaudrait déjà le prix d'entrée régulier, les murales également, et les expositions temporaires aussi... alors imaginez le délice quand on vous laisse entrer gratuitement! (Comme plusieurs musées et sites d'intérêts à Mexico, Bellas Artes est gratuit une journée par semaine pour tous, incluant les visiteurs étrangers).


Sis juste à côté du grand parc Alameda Central, avec une grande plaza piétonnière permettant de profiter de sa façade, l'immeuble est définitivement mis en valeur par la ville de Mexico. Dès qu'on approche de ce bijou d'architecture, on ne peut que le remarquer et être admiratif.


Il n'est pas étonnant de découvrir que l'architecte à l'origine de ce projet est italien. Les détails dans la structure, les décorations extérieures, les sculptures monumentales, les bas reliefs, tout rappelle les grands monuments d'Europe et particulièrement de Florence.


Haut de la façade, avec le nom, et la coupole centrale surmontée par une victoire.


Vue en plongée sur les portes de côté.


Si l'extérieur impressionne, l'intérieur - l'art déco à son meilleur - m'a jeté par terre (figurativement, mais j'étais pas loin de tomber au sol en tentant de capter le mieux possible toute cette beauté avec ma caméra).


Vue du lobby central, à partir du 2e plancher. On peut voir que l'édifice est vaste, l'espace central aéré, et on peut apercevoir sur les murs de côté et sur le mur du fond des 2 étages une série de murales. 


Pour donner une idée de l'échelle, on voit les visiteurs admirer une grande murale occupant tout un mur. Il s'agit de la murale de Diego Rivera dont il a été question dans ce billet-ci. À l'étage supérieur, d'autres visiteurs parcourent une exposition temporaire.


Lignes claires, utilisation du marbre et du métal, coupoles laissant pénétrer la lumière du jour.


On reconnait ici une magnifique idée: une représentation (art déco !) de Chaac, le dieu de la pluie chez les Mayas.


Un pilier vue d'en bas, avec le dôme central au plafond.


Vue en contreplongée des coupoles du plafond.


Cette vue de face (et de haut!) d'El Palacio de Bellas Artes a été captée grâce à un secret local: de l'autre côté de la Calle Juarez, il y a un grand magasin, et quand on monte au 6e étage, on y trouve un café, qui comporte une petite terrasse, de laquelle on a cette vue imprenable sur un des plus beaux édifices de Mexico.


Détail d'une sculpture en façade.


On ne se fatigue pas de prendre des photos du plafond! (on se fatigue un peu le cou, en fait).


Vue globale du Palacio et de son environnement immédiat, incluant une partie du parque Alameda central (à gauche sur la photo). Les lecteurs attentifs reconnaîtront peut-être, à droite du Palacio de Bellas Artes, de l'autre côté de la rue, le Palacio Postal.