Les lecteurs de ce blogues reconnaîtront la voix de mon ami Leandro, dont j'ai parlé à quelques reprises lors de mes séjours équatoriens de 2004, 2005 ou 2007. C'est toujours à cet ami quiteno que je fais appel pour avoir des nouvelles sur place ou des opinions de citoyen ordinaire, puisque mon ami est à la fois une personne avec qui j'ai gardé un contact constant depuis que l'on s'est rencontré en 2004, et un jeune diplômé d'université éveillé à ce qui se passe dans son pays et dans le monde.
Jeudi soir, en apprenant que l'Équateur était en état d'urgence, mon premier réflexe a été d'écrire à Leandro pour avoir des nouvelles et être rassuré sur sa situation et celle de ses proches. Lors de ce premier échange, déjà, Leandro m'apprenait quelques détails que je n'avais pu lire dans nos médias.
Vendredi matin, alors que je préparais mon billet sur la situation telle qu'elle m'apparaissait, j'ai écrit à nouveau à Leandro pour lui poser plus de questions et obtenir sa permission de publier le résultat de cet échange de courriels.
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[30 septembre 2010]
Hugues Morin: Allo Leo, comment ça va ce soir?
Leandro Cahuasqui: Eh bien, ici en Équateur, tout est à l'envers... mais je vais bien, merci de t'en inquiéter.
HM: Que se passe-t-il dans la ville? Nos médias parlent de la tentative de coup d'état mais pas de ses impacts sur les gens de chez vous.
LC: Aujourd'hui, en fin d'après-midi, par mesure de sécurité, les gens ont fermé leurs commerces pour éviter d'être victimes de vols et les banques ont également fermées leurs portes après que 4 succursales bancaires aient été attaquées. Les voleurs ont profités de l'absence de police, c'était un peu comme Noël pour eux sans la police...
Il y a des rumeurs d'un décret de couvre-feu pour éviter ce genre de conflits, mais je ne pense pas que ça soit le fait de beaucoup d'Équatoriens. En réalité, nous sommes avec le président Correa, comme l'a rapidement démontrée le regroupement de citoyens à la Plaza Grande appuyant le président.
Avec les nouvelles d'appui des pays comme la Colombie, le Pérou, l'Argentine, la Bolivie, le Venezuela et le Brésil, je ne pense pas que les hauts gradés de la police arriveraient à réaliser un coup d'état, ils n'auraient jamais le courage d'aller au bout contre le président, et encore moins d'affronter ces autres pays.
HM: Est-ce que l'on en sait plus sur pourquoi ça a dégénéré comme ça?
LC: les revendications de la police sont justes, mais ce n'est pas la bonne manière de faire valoir leur point. On ne revendique pas avec des combats et affrontements violents des droits qui sont justes. Les policiers se battent pour des avantages et droits sociaux et économiques qui leur auraient été enlevés par une loi votée hier. Par contre, aux informations, on nous apprend que ces avantages et droits ne leur auraient pas été enlevés, mais auraient changés de forme, comme être payé mois par mois au lieu d'une fois l'an, par exemple...
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[1 septembre 2010]
HM: En tant qu'Équatorien, trouve-tu que la situation était très dangereuse?
LC: Dangereuse, non. À l'origine, ce sont des policiers qui manifestaient pour revendiquer leurs droits.
HM: Crois-tu aujourd'hui que la situation s'est améliorée, où qu'elle risque plus de se détériorer rapidement?
LC: C'est déjà beaucoup plus calme. Aujourd'hui, on dirait que tout est rentré dans l'ordre. On voit des policiers dans les rues, les commerces et les banques ont rouvert leurs portes. C'est revenu au calme, mais sans que les policiers n'aient abandonné leur objectif. Hier à Guayaquil, ceux qui ont volé les commerces locaux sont des gens qui ont profité de la situation et qui sont probablement des voleurs de toute manière, mais aujourd'hui, tout l'Équateur semble fonctionner normalement.
HM: Crois-tu possible que Lucio Gutiérrez soit en partie responsable de cette tentative de coup comme on a pu le lire dans les médias? Après tout, il est devenu président après un coup d'état en 2000, non?
LC: Lucio Gutiérrez est une personne qui semble vouloir à tout prix à nouveau être président, de n'importe quelle manière. Toutefois, je ne pense pas qu'il soit complètement derrière ça, bien que de plus en plus de médias, ainsi que le président, l'affirment. Par contre, je me dis que si Lucio n'a rien à voir avec ça, pourquoi ne s'est-il pas prononcé contre ces actions hier soir? Évidemment, je dois être réaliste, car le voleur ne crie jamais: J'AI VOLÉ!
HM: Qu'est-ce que tu penses du président Rafael Correa et de ses politiques?
LC: La Patrie appartient à tous, en avant avec le président Correa*. Le président est un très bon président dans tous les aspects de sa politique, mais parfois, il est arrogant avec ses ennemis politiques. En même temps, s'il n'avait pas un caractère ferme et énergique, il ne réaliserait pas grand chose.
HM: En terminant...
LC: La journée d'hier a vu un échange de coup de feu entre l'armée et la police, pour délivrer le président. Ce furent des minutent terribles, de voir des frères équatoriens s'affronter en défendant chacun leur idéaux.
HM: Merci beaucoup mon ami, encore une fois, pour ton temps et ton aimable collaboration à mon blogue.
Je souhaite bien sûr à Leandro et à tous les équatoriens que cette crise se règle le plus pacifiquement et démocratiquement possible.
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* Pour montrer son appui au président, Leandro cite ici textuellement un des slogans électoral de Rafael Correa: "La Patria ya es de Todos, Arriba el Presidente Correa.". Ma courte traduction ne fait pas justice à la finesse du ya (déjà), signifiant aussi que la Patrie appartient déjà, aujourd'hui et toujours, à tous (la population).
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Photo: Leandro, en compagnie de notre ami Evelyn, admirant le centre-ville de Quito en juin 2007.
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