Comme la plupart des amateurs de film, vous ne savez peut-être pas que les prochaines semaines verront la fin des projection de films sur pellicule.
Le cinéma a beaucoup évolué depuis son invention; de la révolution du parlant, de l'apparition de la couleur, la quadrichromie, le technicolor, le panoramique, le son stéréo, puis Dolby Surround, le DTS, les projections IMAX 3D... mais tout ce temps (soit plus de cent ans), la technique de base pour vous présenter un film, elle, n'avait pas changé; une pellicule (un positif) représentant 24 images/secondes, projetées sur un écran à partir d'une lampe et traversant une lentille.
Ce n'est maintenant plus le cas dans la plupart des cinémas, qui doivent avoir fait le passage au projecteurs numériques d'ici la fin d'août, date à laquelle les distributeurs de films cesseront de fournir les films sur pellicule.
Avec le passage complet à cette nouvelle technologie, c'est certes la fin d'une ère pour le cinéma, mais c'est aussi la fin d'une profession; la fin des projectionnistes de films.
Or cet aspect me touche particulièrement, puisque outre le fait que j'ai été impliqué activement dans le milieu du cinéma entre 1998 et 2003, j'ai surtout pratiqué cette profession de projectionniste, une des activités professionnelles que j'ai le plus aimé dans ma vie. C'est donc avec un pincement au coeur que je constate la disparition de cette profession cet été.
Les nouveaux projecteurs lisent le film sur un disque dur (expédié et programmé par le distributeur), mais l'ensemble doit toujours être projeté sur écran par une lampe, d'où le système de ventilation toujours imposant. Un terminal (écran-clavier) permet de contrôler la projection.
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En parallèle à l'évolution technologique que représente cette nouvelle manière de projeter un film au cinéma, il est important de noter que les distributeurs de films (qui économisent une fortune en impression et conservation de pellicule et en transport et transferts) avaient tout avantage à pousser les cinémas à s'adapter au plus vite. Ils ont été aidé par les grandes chaînes de cinéma américaines, dont certaines profitent de ce passage pour éliminer les encombrants syndicats de projectionnistes et ainsi diminuer leurs coûts d'opération et faire disparaître des salariés spécialisés*.
Ce passage obligé a forcé les cinémas à entreposer leurs vieux équipements devenus désuets; des tonnes de métaux et de matériel désormais inutiles. Pour avoir monté et utilisé ce genre d'équipement pendant des années - et en avoir pris grand soin - cette image est plutôt triste pour moi, d'autant plus que l'installation originale de ces équipements là (spécifiquement) représentaient en 1998 l'aboutissement d'un vieux rêve personnel.
J'ai probablement utilisé cette table de montage des centaines de fois entre 1998 et 2001.
C'est peut-être mon âge qui s'exprime ici - car je ne suis habituellement pas réfractaire au changement - mais je n'arrive pas à éprouver d'excitation devant ces écrans diffusant des primeurs informatisées, alors que chaque réception des bobines de 20 minutes de films sur pellicules à monter sur plateaux m'enthousiasmait à toutes les semaines. J'ai aussi pu voir la qualité de l'image - saisissante dans certains cas comme Ice Age 4 - mais qui semble également un peu froide, trop clean. Suis-je un trop vieux cinéphile, déjà?
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Pour les nostalgiques comme moi, une photo en reprise; celle d'une vieux projecteur à pellicule, en pleine action (photo que j'avais publié dans le cadre d'un billet sur une visite à l'intérieur d'un cinéma il y a trois ans).
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* Au Québec et au Canada, il ne restait pratiquement plus de ces syndicats, puisque d'une part, les restructurations des chaînes avaient déjà vu disparaître la plupart d'entre eux, et que d'autre part, un consensus informel permettait de payer à un salaire préférentiel l'expertise des projectionnistes expérimentés.
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