lundi 11 février 2013

Le chemin de fer anglais

Plusieurs lecteurs savent déjà que je suis une sorte de geek de métro.
Sans être un geek de train, j'avoue que c'est mon moyen de transport préféré, et que le rail m'a toujours intéressé. J'aime les trains, j'aime les gares, un peu comme j'aime les avions et les aéroports. Ça fait non seulement parti du voyage, mais ça représente le voyage. Arriver à la gare pour y prendre le train est toujours excitant; un départ, une nouvelle ville à découvrir, un nouveau paysage à voir, et tout ça dans un relatif confort qui dépasse de loin celui des autobus ou des voitures, et qui règle générale, est aussi bien plus rapide. Enfin, contrairement à l'avion, le train a l'avantage de vous mener généralement au centre-ville, et de ne pas être doublé de ces ennuyantes (bien que nécessaires) procédures administratives et sécuritaires qui sont maintenant le lot des vols domestiques comme internationaux. Le train, vous y montez bagages et billets en main, puis vous partez.
L'Europe est un paradis pour les amateurs de rail. C'est d'ailleurs lors de mon premier voyage en indépendant en Europe, en 2003 que je suis littéralement tombé en amour avec ce moyen de transport. Le chemin de fer anglais découle de cette longue tradition de transport efficace de passagers par rail, une tradition que nous n'avons pas en Amérique, ou que nous avons si peu développé, et essentiellement négligé.
J'étais donc bien content de pouvoir expérimenter le transport par train lors de mon récent séjour au Royaume-Uni. Et même si je ne suis pas un geek de train, j'avoue y être suffisamment intéressé pour prendre des photos ici et là, surtout des gares, qui sont souvent des édifices fort intéressants, autant par leur architecture que leur achalandage ou leur position.
Voici donc un petit reportage photo sur les gares anglaises, accompagné de quelques commentaires sur mon expérience du rail anglais.


Les stations sont souvent en plein coeur du centre-ville, ce qui rend le train extrêmement pratique et on a souvent, à la sortie des gares, une vue splendide sur la ville [Liverpool]. Le rail anglais a été privatisé sous Thatcher, par contre, et cette privatisation, qui devait évidemment amener son lot de concurrence et donc, des meilleurs prix pour les consommateurs (air connu et souvent mensonger de la droite), eh bien cette privatisation n'a pas tenue ses promesses; le Royaume-Uni est l'un des pays les plus chers d'Europe pour le transport ferroviaire. On me dira que plusieurs éléments du coût de la vie y sont élevés également (c'est vrai), mais ce n'est pas le cas pour tout (les épiceries offrent de la très bonne qualité pour moins cher qu'au Canada, par exemple. Le transport par bus n'y est vraiment pas cher non plus à comparer avec l'Amérique du Nord).


La plupart des gares datent de plus d'un siècle, ce qui donne toujours un aspect intéressant d'un point de vue architectural, même aux couloirs ou aux voies les plus "ordinaires" [Manchester]. Le problème majeur des trains anglais est relié à leur privatisation, puisque comme pour l'aviation commerciale (privée), le système de tarification qui s'est développé est un cauchemar pour le consommateur, aux prises avec des grilles tarifaires incompréhensibles, des réductions ad lib, selon le trajet (et non seulement la destination), la date de réservation, l'utilisation ou non d'internet pour réserver, le site de réservation, etc. Bref, quand vous montez dans un train, personne n'a payé le même tarif pour le même service. Tous mes déplacements Leeds-London et London-Leeds se sont faits à des tarifs différents - et à part un seul trajet, ils se sont pourtant tous effectués sur le même trajet, avec la même compagnie. Pour un touriste, qui n'est pas habitué à tous les tenants et aboutissants de ce système complexe, ça prend du temps et de l'énergie pour se retrouver dans ce gigantesque casse-tête et éviter de se faire avoir en payant le triple ou le quadruple pour un trajet qui peut être effectué de la même manière mais plus économiquement.


Une constante dans les gares; la grande horloge [York]. On peut aussi voir un autre essentiel, en contrebas: le tableau annonçant les départs et arrivées. Une voix (généralement féminine) annonce également tous les départs et arrivées via les hauts parleurs de la gare. Le train anglais avait une réputation de ponctualité enviable (ils ont inventé le trainspotting, c'est dire). Ce ne semble plus - malheureusement - être le cas. Pour ce que mon expérience relativement limitée peut révéler, les trains anglais sont généralement fiables, et généralement à l'heure. Il y a des cas d'exception, certaines lignes étant opérées avec un peu moins de minutie, d'autres étant plus connues pour leurs troubles récurrents. Une émission humoristique à la télé britannique, qui s'attarde à l'actualité, blaguait toutefois que si un train était anglais, c'est qu'il était certainement en retard. Ceci dit, les retards que j'ai expérimenté - à part quelques exceptions - ne représentaient pas des heures, mais plus souvent qu'autrement quelques minutes à peine.


Plusieurs gares sont plutôt petites [Helsby], et souvent, quelques trains régionaux les desservent, alors que la plupart des trains ne s'y arrêtent pas. C'est pourquoi, par exemple, ça prend une heure pour se rendre de York à Leeds via Harrogate, mais que l'on peut effectuer le trajet York-Leeds en 20 minutes via un autre service. C'est aussi pour cette raison que le trajet Leeds-London ne prend que 2h30, puisque le train ne s'arrête qu'à trois ou quatre gares en cours de route et conserve donc une vitesse moyenne assez élevée.


D'autres gares sont particulièrement grandes [St.Pancras, London], ce qui est souvent impressionnant. On apprend par contre à l'usage, ce que j'appelle la "culture des gares", un peu comme on apprend celle des aéroports, et après quelques expériences, même les plus vastes stations ferroviaires deviennent des lieux rassurants et facile à utiliser. Ici, je note qu'il y a des trains/rails au bout, sur les deux étages, et qu'il y a aussi des services au milieu de la gare (droite sur la photo), dont un train à grande vitesse Eurostar qui effectue le service vers Paris et/ou Bruxelles via le tunnel sous la Manche.


La plupart des stations sont établies depuis très longtemps et donc, dans des édifices historiques [Chester]. Pour le visiteur, le symbole du rail anglais (à droite sur cette photo) permet d'identifier la gare de loin. Sur cette photo, prise lors de mon arrivée à Chester, on peut voir qu'il est encore tôt (10hAM), et que le soleil est encore bas. Cet hiver, le soleil était toujours bas, bien plus bas que ce à quoi je suis habitué (même Chester, au sud Liverpool, est à une latitude d'environ 53 degrés). Pour arriver à Chester assez tôt pour profiter de la courte journée hivernale, j'avais dû me lever autour de 6hAM ce matin-là.


D'autres gares sont plutôt ordinaires [Harrogate], ce qui découle généralement d'une absence d'édifice historique (destruction, rénovations majeures) ou du déplacement de la station, qui se retrouve alors dans un édifice plus moderne. Et si les voies de la plupart des gares de ville sont recouvertes de grands dômes en demi-cercle (voir Manchester ci-haut, par exemple), ce n'est pas le cas des villes plus petites et des villages, où les voies sont extérieures (comme ici, à Harrogate).


En explorant une bonne partie du Yorkshire et des environs, pendant plusieurs mois, j'ai donc pu expérimenter toutes sortes de déplacements par train. Direct, express, run de lait, avec multiples correspondances, etc. Cette photo [Doncaster] d'un train constitué d'un wagon-locomotive unique a été captée une minute avant notre départ pour Lincoln. Leeds-Doncaster avait précédé, et le retour allait impliquer une correspondance supplémentaire.


Je l'ai souvent mentionné dans des billets précédents, la saison impliquant des journées courtes, plusieurs de mes trajets ont été effectués en tout ou en partie après le coucher du soleil (ou avant son lever). Ce fut le cas de mon retour ce jour-là [Newcastle-Upon-Tyne], alors que le soleil est couché bien avant que je ne prenne mon train. Le Transpennine express que l'on voit sur cette photo (et qui allait me mener directement à Leeds sans correspondance) est l'un des trains que j'ai le plus emprunté lors de mon séjour. Il offre un service rapide d'est en ouest et du nord au sud sur la plupart des grandes villes de Liverpool à Scarborough et de Manchester à Newcastle-Upon-Tyne avec de multiples correspondances à Leeds et York, en faisant le réseau le plus utile de mon séjour.


Parmi les dizaines de gares que j'ai pu voir et visiter, certaines n'étaient pas très achalandées [Knaresborough]. Remarquez, quand on sait que dans ce cas précis, ça m'aura pris de nombreuses tentatives pour réussir à me rendre à cette gare, on ne s'étonnera pas qu'il y ait peu de monde qui y utilise le service. Knaresborough est située sur un service qui s'apparente en fait au train de banlieue, puisque la petite ville est à environ 40 minutes de Leeds sur ce tracé et est desservie par un train régional qui fait donc des arrêts dans toutes les gares en cours de route.


À l'autre bout du spectre, on retrouve des gares très achalandées [Waterloo, London]. Dans ce cas-ci, je n'ai même pas utilisé les services de cette gare, puisque j'y étais pour acheter des billets pour Hampton Court pour le lendemain, mais que les prévisions météo (tempête de neige) avaient déjà incité les dirigeants à annuler tous les trains du lendemain sur cette ligne. J'ai quand même noté avec nostalgie que c'était de cette station que j'avais pris un train London-Bruxelles à la fin mars 2003, entamant le long trajet qui allait me faire parcourir plusieurs pays pendant les trois mois qui allaient suivre, lors de ce premier voyage en indépendant.


Je reviens sur les pratiques tarifaires, pour souligner le problème majeur que le système anglais pose pour le voyageur indépendant. Partout ailleurs en Europe, un trajet donné coûte à peu près le même tarif que l'on achète son billet la veille ou le jour même. Dans le système en place au Royaume-Uni, les compagnies offrent souvent des tarifs beaucoup plus intéressants si vous réservez des jours (voir des semaines dans certains cas) à l'avance. Résultat: si vous ne voulez pas payer 4 fois plus que vous ne pourriez autrement, planifiez longtemps d'avance vos déplacements. Pour un voyageur qui aime improviser et réagir aux imprévus (comme la météo, par exemple, surtout en hiver), cette obligation de réserver des jours/semaines à l'avance est un inconvénient majeur. Dans les cas de Londres et Édimbourg, par exemple, je n'ai pas eu le choix d'y aller à certains moments, malgré le mauvais temps, puisque l'alternative était beaucoup trop chère pour mon budget. (Et comme le rail anglais est déjà bien plus cher - même avec les tarifs à rabais - que tout ce que j'ai pu expérimenter sur le continent européen, ça limite la liberté de mouvement et d'exploration; il y a des endroits où je ne suis pas allé pour cette raison-là).
Pour revenir aux gares, une chose qui étonne parfois le visiteur, c'est la relative absence d'art urbain dans les édifices. On retrouve certes quelques oeuvres ici et là, mais plus souvent qu'autrement, c'est l'absence qui règne de ce côté [Victoria, London].


Parmi les heureuses exceptions à cette absence, on peut admirer quelques sculptures [St.Pancras, London]. Celle-ci est particulièrement intéressante, puisqu'il s'agit d'un poète (John Betjeman) qui était un grand amateur d'architecture victorienne et qui a contribué à sauver cette station de Londres alors qu'on prévoyait la détruire dans les années 1960 pour faire place à un nouveau développement. La station a depuis été restaurée, puis complètement rénovée en 2007 (pour accueillir l'Eurostar), et à cette occasion, cette sculpture en hommage au poète a été érigée au second plancher. Ce que l'on ne voit pas sur cette photo, c'est qu'on a également gravé à ses pieds plusieurs citations issues de sa poésie.
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à suivre.

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