samedi 12 octobre 2013

Parallèle Espagne-Québec

Introduction
Lors de mon récent séjour en Espagne, je n'ai pu éviter de faire quelques parallèles politiques entre la situation là-bas et celle qui règne au Québec. En fait, l'actualité politique espagnole ne m'a pas laissé le choix, un gigantesque scandale de financement occulte du parti au pouvoir au profit d'entrepreneurs a éclaté alors que je commençais à peine mon voyage. J'ai donc suivi l'affaire dans les médias pendant mes déplacements de l'été et y jette un coup d'oeil de temps en temps depuis mon retour.
Si je reviens sur ça aujourd'hui, ce n'est pas seulement parce que le parallèle est intéressant en soi - et prouve que contrairement à ce que certains chroniqueurs du ROC voudraient bien laisser croire, la situation au Québec est loin d'être unique à la province, mais assez répandue dans le monde; l'Espagne étant un exemple qui a surgit publiquement. Il y a aussi le fait que nous soyons en campagne municipale et que pour Montréal et les environs, les questions d'éthique/intégrité dominent l'actualité en plus d'occuper une place importante auprès des électeurs qui suivent la politique un tant soit peu.
Enfin, avec ce qui s'est passé depuis le début de cette campagne municipale (le veggiegate, suivi des robocalls à Montréal, puis le fantôme de la corruption à Laval), plusieurs pourraient être portés au cynisme (j'y ai déjà succombé par le passé), mais je continue à croire qu'il est plus constructif de s'informer correctement au lieu de mettre tous les intervenants dans un même panier.
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L'affaire Barcenas en quelques mots
Résumer l'affaire Barcenas, qui secoué l'Espagne l'été dernier et continue de faire des vagues, n'est pas une mince tâche, mais disons, pour simplifier, qu'il s'agit de révélations-chocs effectuées par l'ex-trésorier du Partido Popular (PP), le parti au pouvoir à Madrid, Luis Barcenas. L'ex-trésorier a révélé les détails d'une comptabilité parallèle du parti où on retrouve du financement illégal, des contributions d'entrepreneurs, un salaire caché au Président de l'Espagne Mariano Rajoy, ainsi que des sommes de plusieurs millions d'euros cachées dans des comptes bancaires suisses.
À une époque où l'Espagne subit la pire crise économique de son histoire, avec un gouvernement qui impose des mesures d'austérité sévères, l'affaire a fait scandale dès la publication des premières révélations.
La réaction de Rajoy et du PP a d'abord été de refuser de commenter l'affaire, puis, des semaines après les révélations de Barcenas, de tout nier en bloc. Un procureur mène donc une enquête assez large sur les affaires et le financement du PP. Depuis le début de cette affaire, les médias rapportent quasi quotidiennement des nouvelles révélations; nombreux salaires au noir versés aux dirigeants du parti, détournement de fonds dans la rénovation du siège social du parti à Madrid, importants contrats offerts à des entrepreneurs ayant largement contribué (illégalement) au parti, etc. Le PP a d'abord réagit en attaquant la crédibilité de Barcenas, Mariano Rajoy réaffirmant son intégrité et condamnant toute personne ayant agit illégalement dans cette affaire. Mais avec le temps - et la pression qui s'accentuait - Rajoy a annoncé une enquête interne "profonde et exhaustive" de toute la comptabilité du parti, en plus de discuter avec l'opposition de nouvelles lois anti-corruption, question de donner une image d'intolérance face à la corruption.
La dernière révélation à ce jour (11 octobre) concerne un important contrat de nettoyage et de collecte de déchets dans la région de Toledo, qui a été accordé à un entrepreneur ayant versé un pot-de-vin de 200 000 euros au PP, contribuant ainsi illégalement au financement de la candidate du PP aux élections dans cette région, candidate qui est justement la secrétaire générale du PP.
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Parallèle avec Québec
Même sans les détails de l'affaire, vous aurez compris qu'il était facile d'y voir là un parallèle avec les nombreux scandales politiques ayant été révélés sur le Ministère des Transport, le financement présumé illégal et les "cadeaux" aux ministres du PLQ dans divers dossiers, les scandales de financement et de corruption d'Union Montréal, ainsi que ceux de Laval, sans oublier le salaire secret de Jean Charest au PLQ alors qu'il était Premier Ministre. Et l'enquête du procureur - qui appelle des témoins à collaborer - rappelle évidemment notre Commission Charbonneau.
Par contre, une différence fondamentale dans ce parallèle, c'est qu'en Espagne, le scandale touche le parti au pouvoir fédéral, ce qui a eu pour impact immédiat une montée/réaction en faveur de la souveraineté en Catalogne, où les gens sont dégoûtés des agissements du gouvernement de Madrid dans cette affaire. L'option souverainiste québécoise n'a évidemment pas eu cette opportunité.
Enfin, en Espagne, contrairement à ce qui s'est produit ici - c'est le procureur qui a démarré le tout avec son pouvoir d'enquête, et le gouvernement formé par le PP n'a pas eu le choix de réagir. Ici, on se souviendra que malgré les très nombreuses révélations des médias, le gouvernement Charest a traîné deux ans avant d'instaurer une commission d'enquête, et a d'abord tenté d'en faire une structure sans réel pouvoir. Il contrôlait donc l'agenda de cette commission en parallèle avec l'agenda électoral.
Pendant ce temps, en ville
Jean Charest a contrôlé l'agenda politique sur ces scandales, ce qui lui a permis - entre autres - de limiter les dégâts aux dernières élections provinciales pour le PLQ. Nous avons vu depuis que son successeur est aujourd'hui aux prises avec les premières vagues directes touchant son parti.
Mais si le PLQ avait le contrôle de l'agenda provincial, ce n'était pas le cas des partis municipaux, qui font face à des élections à date fixe. Plusieurs administrations se sont donc retrouvées en pleine campagne après les révélations de la Commission Charbonneau.
À Montréal et Laval, la plupart des partis touchés n'existent plus... malgré quelques fantômes du passé, qu'il surgissent sournoisement comme ce fut le cas à Laval la semaine dernière, qu'il s'agisse simplement de candidats ayant prêté allégeance à un nouveau parti, ou encore qu'il s'agisse des vieilles méthodes qui sont difficiles à éliminer...
Pour le moment, donc, tentons d'éviter le cynisme et de mettre tous les candidats dans le même panier de corruption; il y en a certainement dans le lot qui sont comme vous et moi, découragés des agissements de ces voleurs et qui, s'ils sont élus, vont réellement entreprendre des changements positifs pour nos villes. Il est donc important de bien s'informer (et tenter d'éviter la désinformation comme le cas du veggiegate) avant de faire notre choix.
Les Espagnols eux, ont plus de risques de devenir cyniques; la situation économique du pays est très difficile, et le gouvernement Rajoy a été élu en 2011 avec un mandat de 4 ans.
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Sources:
- Sur l'affaire Barcenas, on peut consulter le dossier du quotidien El Pais (47 pages d'archives à ce jour).
- Sur le Québec, on peut consulter le dossier sur la Commission Charbonneau de Radio-Canada, ou encore consulter le site de la Commission.
- Sur les élections municipales, Radio-Canada et La Presse ont chacun dossier.

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