jeudi 9 août 2007

El Che - y Bolivia... et moi.

"La Paz, c'est la Shangai des Amériques!"
- Ernesto Che Guevara (Otra vez) - ma traduction.

En lisant ca, j'ai eu un sourire. On dirait non seulement que La Paz avait aussi fait une forte impression sur Che Guevara, mais aussi que La Paz, malgré que mon arrivé en ces lieux se soit produit plus de 50 ans après la première visite du Che en Bolivie, ait conservé cette particularité culturelle.
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Un mot sur le Che et la Bolivie, donc.

Lors de la révolution gauchiste de 1952, prenant place en Bolivie (et allant assez loin en terme de réforme agraire), Ernesto Guevara débutait son second voyage en Amérique Latine, voyage qui allait le mener de son Argentine natale au Mexique et allait lui faire rencontrer Fidel Castro et son destin. Il allait donc d'abord etre un témoin neutre de cette révolution "tranquille" en Bolivie, puisque comme jeune voyageur, il était très observateur des sociétés qu'il visitait et très intéressé par leur évolution politique. La fameuse révolution débutée en 1952 en Bolivie l'avait été suite à une réelle prise du pouvoir des citoyens contre l'armée au pouvoir. Réforme agraire, réforme des mines, bref, le pouvoir aux peuple...
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Ernesto note: "C'est un pays très intéressant qui passe par un moment agité. Le 2 aout, la réforme agraire va s'appliquer [...] On a vu des marches incroyables [...] la vie humaine a peu de valeur ici [...] C'est une situation profondément intéressante pour l'observateur neutre".

- Ernesto Che Guevara (Lettre à son père, 22 juillet 1953 - ma traduction)
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Je note que mon propre passage en Bolivie se déroule à un moment-clé de son histoire socio-politique et que moi aussi, comme observateur neutre, j'ai trouvé les semaines passés en Bolivie particulièrement intéressantes à ce niveau.
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Après son passage en Bolivie, au Pérou et en Équateur, Ernesto allait aussi observer de près la crise au Guatemala et l'intervention à peine camouflée de la CIA dans les affaires de ce pays.
Plus tard, impliqué dans la guerrilla de la Sierra Meastra de Cuba avec Fidel, il allait etre témoin à distance de l'évolution de la situation bolivienne...
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En 1964, le général Barrientos, issu de la nouvelle génération de millitaires latino-américains entrainés par les USA (via la CIA) pour supporter les gouvernements et partis de droite, se proclame président de la Bolivie après un coup d'état militaire. (La chose n'a rien de surprenant, le Nicaragua a vécu le meme problème quand les USA ont financé les contristes pour faire la guerre au gouvernement sandiniste, démocratiquement élu). Le président Barrientos a rapidement renversé les réformes effectuées par le précédent gouvernement et ramené l'ordre de droite au pays. Sous sa gouverne, les investisseurs américains on vu les frontières s'ouvrir - exploitation des ressources naturelles - dont le gaz naturel et les mines - sans redevances, ou avec des redevances aux hauts placés du pouvoir, et envoi en exil des chefs syndicaux et leaders de groupes du peuple.
Bref, le grand ménage militaire.
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De retour d'une campagne au Congo, Ernesto Che Guevara entrait en Bolivie clandestinement, pour y mener une guerrilla en relation avec le Parti communiste bolivien contre le gouvernement Barrientos. Nous sommes le 3 novembre 1966.
J'ai 6 mois.
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La campagne de Ñancahuazú allait durer près d'un an avant que le gouvernement Barrientos n'y mette fin.
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50 ans après son arrivée en Bolivie, le peuple bolivien a élu son premier réel gouvernement de gauche, celui d'Evo Moralès et du MAS. Et pour le moment, Evo livre la marchandise, et semble très populaire auprès du peuple, la majorité de la population est encore derrière lui.
Mais, comme Barrientos en 1964, certains leaders de droite veulent l'arreter... Idéologiquement, jamais depuis 50 ans la Bolivie n'a été aussi loin des USA - et les relations entre les deux pays sont au plus froid. Heureusement, pour le moment, la situation économique et politique américaine - et leur enlisement en Irak - semblent les empecher de s'impliquer trop activement en Bolivie, et Evo a le champs libre avec ses nombreuses réformes.

La Bolivie d'Evo (et de son parti, le MAS) - aujourd'hui et telle qu'elle apparait au visiteur et au lecteur de divers journaux au pays - c'est la Bolivie dont le Che a revé et pour laquelle il s'est battu ici-meme.

L'avenir nous dira si Evo arrivera a changer son pays suffisamment pour le rendre plus imperméable aux manigances de coulisses de Washington... Car après tout, il est toujours plus facile de corrompre des gens pauvres et sans éducation et inquiétant de les voir vouloir s'instruire et se gouverner par eux-memes... surtout quand il s'agit d'un pays avec des ressources énergétiques intéressantes dans lequel on avait l'habitude de piger sans gene.
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En Bolivie, El Che est un des plus grands héros nationaux. C'est certainement l'icone la plus représentée au pays. On parle souvent de Bolivar, puis de Che, comme les deux grands leaders ayant combattu pour le peuple bolivien. Si on laisse un peu de temps à Morales, il viendra peut-etre ajouter son nom à l'histoire du pays derrière ceux de Bolivar et Guevara. Et sa révolution, elle se fait de manière tranquille. Che a été un témoin de première main de la répression de la révolution démocratique au Guatemala comme en Bolivie, deux événements qui ont d'ailleurs eu un role important dans sa conviction de la nécessité d'une révolution armée. Je me demande ce qu'il penserait de la "révolution culturelle et démocratique" d'Evo et s'il penserait que la Bolivie a une chance d'y parvenir... finalement.
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Ernesto Che Guevara est mort le 9 octobre 1967, après avoir été capturé le 8 octobre. Son exécution a été ordonnée par le président Barrientos et a été supervisée par un agent de la CIA. [Belle démocratie.]
Che est mort à La Higuera, minuscule pueblo au sud de Vallegrande, près de Cochabamba, où j'ai passé quelques jours récemment.
Il avait 39 ans.
...
J'en ai 41...
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