Le processus de deuil est un long et mystérieux processus. J'imagine que les psychologues peuvent l'expliquer en mot, mais chaque personne a l'air de vivre ça de manière différente et prendre un délai différent pour réapprendre à vivre dans le monde (l'univers) qui a été redéfini par le départ définitif d'une personne chère.
Pour ma part, c'est surtout une grande tristesse et un sentiment d'inutilité, puis un manque d'intérêt pour à peu près tout ce qui m'entourre, qui caractérise ces périodes de redéfinitions. Je marche dans les rues de Montréal en me sentant triste sans aucune raison immédiate identifiable...
Puis, un beau jour, en marchant sur la rue, justement, c'est la curiosité envers la vie, qui l'emporte, sans raison aucune. Oui, je suis inutile sur un plan global, mais vous savez quoi? J'aimerais ça savoir ce qui va se passer ensuite.
Si la vie est un film ou une très longue télé série, je veux voir le prochain épisode, même si le dernier était à chier, et qu'un de mes personnages préférés a quitté le show. C'est platte, mais c'est ça, je veux juste connaître la suite.
Je veux savoir qui sera le prochain premier ministre du Canada, je veux revoir l'Équateur et savoir si le pays s'en sortira mieux avec un gouvernement de gauche, je veux revoir mon amie Tamy, je veux savoir ce qu'il adviendra de Cuba après Fidel, je veux voir le prochain James Bond, je veux savoir si le Québec règlera un jour la question constitutionnelle d'un bord ou de l'autre, je veux savoir si les catalans finiront la Sagrada Familia, je veux savoir si Harry Potter va survivre à sa dernière aventure, je veux connaître ce que la technologie nous réserve après l'internet, les iPod et les Blackberry, je veux savoir si le Cinéma Chaplin va encore exister dans 15 ans, je veux lire les prochains romans de Sernine et Champetier, je veux que mes amies Kumiko et Ryoko me fasse découvrir le Japon de leur point de vue, je veux savoir ce que c'est de vivre dans cette culture paradoxale, je veux savoir ce que mon amie Suzie fera de beau dans la vie, je veux savoir si les humains seront assez intelligent pour s'occuper sérieusement de leur planète à temps, je veux publier mon premier roman, je veux voir encore pleins de films avec Scarlett Johannson, je veux savoir si elle gagnera un Oscar un jour, je veux voir les jeux olympiques de Vancouver, je veux voir les toiles de Vermeer que je n'ai pas encore vues, je veux que mon amie Evelyn visite Montréal avec moi, je veux goûter à ce porto que j'ai rapporté de Porto, je veux encore manger des sushis, je veux voir le monde du sommet du Cotopaxi...
Bref, je veux vivre encore une peu.
Et malgré le deuil, malgré la tristesse, malgré les doutes et les douleurs, malgré la grisaille de l'automne, malgré tout cela, eh bien ça fait du bien de s'en rendre compte. Ça n'enlève pas la douleur, ça ne change pas le fait qu'on préférait le monde antérieur à celui qui nous est maintenant donné, mais ça fait du bien de vouloir tout ça encore, et de le réaliser, pour la première fois depuis deux mois.
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