mardi 22 novembre 2011

Des traces du passé linguistique à Montréal

Après mes explorations du centre de Montréal via des murales diverses, j'ai remarqué qu'à plusieurs endroits en ville, on peut encore voir ces vieux affichages qui étaient autrefois peints sur les murs des édifices en briques. Personnellement, j'adore ce genre de fenêtre sur le passé de la ville. Déjà, en 2009, lors de mon retour dans le quartier de la Petite Patrie, j'avais noté la proximité de l'ex-St.Lawrence Warehousing Company ainsi qu'un ancien édifice utilisé par Coca-Cola avant de devenir un immeuble du service des incendies de la ville de Montréal. Cette fois-ci, je m'attarde directement à ces vieilles inscriptions, car dans plusieurs cas, elles en disent long sur le passé linguistique de Montréal.


Premier artéfact: J'ai tenté de demander des paquets, mais il y a longtemps que la porte en question n'ouvre plus sur un bureau de douane ou de poste. C'est la seule ancienne inscription en français que j'ai déniché dans mes balades. (Rue de la Commune).


Je ne suis pas certain du nom (Mercator printing), mais on peut lire dans les deux langues qu'ils faisaient de l'édition, de l'impression et de la reliure. (Publicité dans un stationnement entre St-Paul et Notre-Dame, près de St-Laurent).


À deux pas du dépôt de paquet, vous pouviez en expédier, en autant que vous puissiez lire l'anglais, évidemment! (Rue de la Commune).


Marchand de chaussure et bottes, également unilingue anglais. (Près de St-André, soit sur Ontario ou De Maisonneuve, je n'avais pas noté sur le coup).


Il n'est pas étonnant de retrouver la "Commercial Union Assurance Company" unilingue anglaise elle aussi sur la rue St-Jacques. Elle doit dater d'une époque où la rue elle-même d'appelait d'ailleurs St.James Street.


J'avoue avoir été chanceux d'apercevoir cette inscription; la Milton Case Grocery se trouve sur Milton, pas très loin de l'Avenue du Parc, dans le ghetto McGill, un quartier encore très anglicisé aujourd'hui.


Je termine sur une affiche où il n'y a pas prédominance de l'anglais :-). Le fait amusant avec cette publicité de glace, c'est le prix annoncé: 10¢! (Rue St-Denis, quelque part entre Roy et Mont-Royal).
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samedi 19 novembre 2011

L'amour, les émotifs et les débutants anonymes

Le titre de ce billet renvoie directement à un délicieux petit film européen, Les Émotifs Anonymes. Je n'en avais pas parlé ici, par manque de temps et parce que j'avais envie de traiter d'autres sujets au moment où je l'ai vu, mais l'envie de vous en parler a refait surface cette semaine, après avoir vu le film The Beginners, qui m'a rappelé Les Émotifs, sur un autre registre.
Réalisé par Jean-Pierre Améris, Les Émotifs Anonymes raconte l'histoire de Jean-René, propriétaire d'une chocolaterie au glorieux passé qui n'est jamais arrivée à se renouveler. Maladroit, nerveux en présence des autres, célibataire par défaut, il mène une vie de reclus, consulte un psy et cherche à engager un représentant pour éviter que la chocolaterie ne perde ses derniers points de vente. Angélique se présente pour le poste, sur un malentendu: elle croyait que l'on cherchait un chocolatier. Elle est timide et nerveuse, elle n'ose pas avouer qu'elle ne connait rien à la vente, et Jean-René l'engage sur un coup de tête après une timide et brève entrevue. Ils tombent évidemment amoureux l'un de l'autre, mais sont tous deux trop émotifs pour risquer d'avouer leur sentiment envers l'autre. S'en suit un jeu de peut-être, d'avancées légères, d'allusions rétractées aussitôt, de tentatives maladroites, de fuites et d'angoisses grandissantes.
Ce film, qui repose sur les deux comédiens et leur personnage, est un autre bijou de petit film qui, sans grande ambition, vous font passer les meilleurs moments devant un écran. Benoit Poelvoorde et Isabelle Carré forment un couple inhabituel et charmant, touchant et drôle, qui nous rappelle en version intense tout plein de sentiments et d'idées qui nous passent tous par la tête en amour. Leur jeu fin fait de ce film une comédie dramatique où le drame n'est jamais lourd malgré tout, un film dont le scénario n'est pas structuré autour d'une série de rebondissements mais plutôt autour des passions qui nous habitent et des élans qui nous poussent à aller de l'avant, malgré nos dérives intérieures. Jamais burlesque ou grotesque, le film fait toutefois souvent rire, et c'est donc un excellent feel good movie, malgré un sujet plus sérieux qu'il n'y paraît.
Si j'ai repensé à ce film en voyant The Beginners, c'est que cette autre comédie dramatique, américaine, cette fois-ci, est également un film sur les angoisses personnelles reliées aux relations amoureuses. Contrairement aux Émotifs Anonymes, toutefois, The Beginners est plus dramatique, triste même, mais ne tombe jamais dans le mélo ni le tragique. Comme son cousin européen, ce film de Mike Mills ne repose pas sur des rebondissements et de l'action. Au contraire, le scénario est construit autour de la relation hésitante entre Oliver, qui vient de perdre son père, et Anna, actrice constamment en déménagement pour des tournages et qui passe sa vie dans des hôtels. Le film est également déconstruit, puisqu'il explore également la relation d'Oliver avec son père pendant les dernières années de la vie de celui-ci. C'est qu'à la mort de sa mère, Oliver a eu la surprise de voir son père lui avouer qu'il était gai. Ce coming out à 75 ans a remis remettre en perspective les souvenirs d'enfance d'Oliver et ses propres relations amoureuses.
Comme plusieurs films intimistes réussis, The Beginners est rempli de petites trouvailles, de silences importants, de dialogues sensibles et justes, bref, c'est un excellent film pour qui accepte de se laisser porter par les sentiments qu'il explore plutôt que de chercher la course poursuite et la montée d'adrénaline. Le mutisme d'Anna lors de sa première rencontre avec Oliver et ses origines (françaises, donc son accent en anglais et ses expressions françaises) fournissent une touche d'exotisme parfaitement appropriée à son histoire. L'omniprésence d'Arthur, le chien de son père, qu'Oliver a adopté, porte également à la réflexion sur les relations d'amitiés sous une autre forme. Les dialogues entre Oliver et Arthur sont d'ailleurs une des belles trouvailles du film. Dans le rôle d'Oliver, Ewan McGregor offre une interprétation subtile, tout en retenue. Mélanie Laurent, superbe dans sa fragilité, est aussi touchante en Anna, et les scènes entre les deux sont parmi les plus justes du film. Mais The Beginners ne serait pas l'excellent film qu'il est sans Christopher Plummer, qui joue Hal, le père d'Oliver, avec grâce. On ne s'étonnerait pas de le voir nominé aux prochains Oscars.
Les Émotifs Anonymes et The Beginners sont donc deux films qui se répondent parfois, et qui explorent certaines avenues similaires, mais qui réussissent à offrir un traitement personnel et original, l'un dans la comédie l'autre dans le drame, et que je suis bien content d'avoir eu l'opportunité d'apprécier.
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vendredi 18 novembre 2011

The Shock Doctrine (le film)

Dans la foulée de plusieurs documentaires récents dénonçant les excès de notre système capitaliste déréglementé et l'incapacité de notre système politique à en prendre le contrôle, voici un autre film à voir: The Shock Doctrine. Le film est adapté d'un livre homonyme, signé par la canadienne Naomi Klein.
Le film défend l'hypothèse que les tenants du capitalisme ultra-libre ont toujours profité d'un état de choc pour imposer leurs vues sur l'économie. On démontre ensuite les conséquences de ces politiques, dans des lieux que mêmes les néolibéraux ne mentionnent jamais quand ils tentent de démontrer que leurs politiques peuvent réussir. Au final, on se rend bien compte que ces politiques d'extrême droite n'ont réussi nulle part, à part bien entendu réussir à créer une classe de super-riches au détriment de tous les autres citoyens et des états partout où elles ont été appliquées.
Il y a deux éléments importants que ce film nous apprend.
Le premier est l'historique de l'implantation des politiques néolibérales de libéralisation des marchés. On pense souvent que la chose a débuté sous les gouvernements de Thatcher et Reagan, mais le film remonte un peu plus loin dans le temps et rappelle que ces politiques - sous les conseils de leur plus ardent et plus connu défenseur; Milton Friedman - ont été appliquées au Chili, après le coup d'état qui a permis au Général Pinochet de prendre le pouvoir en renversant le gouvernement Allende élu démocratiquement (tuant le président au passage). Nous savons tous à quel point les politiques du Chili ont engendré de le pauvreté et une gigantesque crise économique, problèmes qui ont été "contenus" par Pinochet en établissant un régime totalitariste basé sur la terreur. Le film rappel avec aplomb l'amitié liant Pinochet et Thatcher; certaines scènes donnent d'ailleurs froid dans le dos. The Shock Doctrine rappelle aussi que les mêmes politiques - sous l'influence des mêmes conseillers - ont été appliqués par le régime militaire Argentin ayant renversé le gouvernement d'Isabel Peron... avec les mêmes résultats catastrophiques et menant également à un régime totalitaire, répressif et d'une rare violence (que les argentins appellent aujourd'hui "le génocide civil").
Le second élément nouveau apporté par le film repose sur la théorie développée par Naomi Klein; théorie selon laquelle la Stratégie du Choc (économique) est utilisée de la même manière que celle de la Thérapie du choc étudiée dans les années 50 à l'Université McGill. Ainsi, en faisant le parallèle entre ces deux applications d'un même concept, on nous explique que l'humain est prêt à accepter de collaborer à beaucoup de choses sans trop se poser de questions quand il est en état de choc, ou en état de survie. On le comprend bien quand il s'agit d'un individu (et les camps de tortures de la CIA le montrent bien), mais Klein élargi cette application aux sociétés.
Ce qui nous ramène à l'implantation des politiques néolibérales; qui le sont toujours après qu'une société ait subie un choc; Guerres, catastrophes écologiques, coups d'état, etc. Après un choc, les néolibéraux s'imposent sans que les sociétés n'aient le temps de réagir ou de remettre en question leurs raisonnement ou leurs intentions. Parfois, il s'agit d'opportunisme (catastrophes naturelles), parfois, c'est un choc planifié (coups d'état commandités, guerres). Ce fut évidemment le cas au Chili et en Argentine, et ce fut le cas au Royaume Uni où, par un "heureux hasard", le pays a dû s'unir dans la guerre des îles Malouines au moment où Thatcher imposait ses politiques.
Le film poursuit son exploration d'autres chocs; du tsunami qui a frappé l'Asie à la "war on terror" et l'invasion de l'Irak de Bush, en passant par les changements politiques post-Katrina à la Nouvelle Orléans. On donne les exemples du Sri Lanka qui a chassé les petits propriétaires des rives (par "sécurité") pour vendre les terres à des promoteurs privés immobiliers pour la construction d'hôtels de luxe. On donne l'exemple des politiques économiques imposées à l'Irak par le gouvernement américain avant même les premières élections. On donne des exemples du système d'éducation privatisé à la Nouvelle Orléans après Katrina.
Le film met enfin en parallèle les conséquences de ces politiques; protestations civiles violentes, répression, camps de concentration, etc.
Et ça va plus loin: on illustre comment les États-Unis eux-mêmes sont un régime autoritaire à leur manière: On donne l'exemple de Guantanamo, qui est un véritable camp de concentration où les États-Unis ont ouvertement pratiqué la torture, emprisonnant sans procès pour des mois, voir des années, des innocents qui n'ont finalement jamais été accusés. Guantanamo (ou les prisons d'Iraq sous le régime américain) n'étaient en rien différents des camps de Pinochet ou du régime militaire argentin.
Voilà pour le propos. Côté cinéma, l'ensemble du film est bien ficelé, ne s'éparpille pas, illustre son propos de documents et d'archives visuelles fortes et pertinentes. Si vous voyez le film en DVD, il y a un excellent supplément sous la forme d'un panel de discussion filmé après la projection du documentaire au festival de Sundance. Les réalisateurs y parlent des concepts développés dans le film, en compagnie de l'auteure Naomi Klein et du fondateur de Sundance, Robert Redford. On y apprend entre autres à quel point les penseurs du néolibéralisme réagissent rapidement quand arrive un choc; on y cite le prêt conditionnel qui avait été proposé rapidement à Haïti par le FMI, comme un bon exemple de contrôle outrancier sur une société en état de choc et dans l'incapacité de refuser l'aide, même si cette aide est accompagnée de conditions de libéralisation majeure de l'économie du pays qui ne sert en rien les intérêts d'Haïti.
Naomi Klein souligne que la seule manière de se battre contre un tel état économique est de protester, haut et fort, afin de forcer la main aux élus.
En ce sens, les mouvements "occupy" qu'on voit apparaître un peu partout sont un signe de cette protestation. Et les récents démantèlements et l'adoption graduelle d'une ligne dure envers les manifestants pacifiques commencent à ressembler au contrôle policier/militaire que les régimes ultra-capitalistes doivent mettre en place pour continuer à exploiter les sociétés. Avec l'instauration de ces politiques dans divers pays d'Europe récalcitrants, on pourra voir que les manifestations vont s'accentuer et que les régimes en place adopteront une ligne de plus en plus dure. The Shock Doctrine ne saurait donc être plus actuel.
Pour ma part, comme j'imagine que les cinéastes ont dû faire des choix d'adaptation, je vais jeter un oeil du côté du livre dans les prochaines semaines.
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mardi 15 novembre 2011

Coup d'état européen, ou L'empire des banquiers

L'Europe est en train de vivre un véritable coup d'état et on dirait que relativement peu de gens s'en rendent compte et que la chose ne fasse même pas scandale.
Si je me penche sur ça, c'est qu'un commentaire apparemment anodin entendu de Gérald Fillion au Téléjournal de Radio-Canada avant-hier m'a vraiment étonné. Le chroniqueur financier de la SRC mentionnait que le nouveau premier ministre italien était un ancien banquier de Goldman Sachs, la banque et firme d'investissement américaine. Je me suis mis à creuser la question, car l'information titillait quelques souvenirs de lecture documentaire. Puis, en deux jours, j'ai vu que je n'étais pas le seul à me poser des questions au sujet de cette "prise de l'Italie" par les marchés financiers.

Le cas Étatsunien: un rappel historique
Retour en arrière. Crise financière de 2008. Après la faillite de la banque Leeman Brothers, le gouvernement américain vient en aide au système en donnant des milliards aux banques, dont les 6 principales recevront plus de 150 milliards de dollars US du Troubled Asset Relief Program. Parmi elles, Goldman Sachs versera, en 2008, pour 4,8 milliards de dollars de bonus à ses principaux dirigeants et employés. La banque recevra pourtant 10 milliards d'aide du gouvernement américain. On parle ici de 953 employés qui recevront plus d'un million de dollars de bonus et de 6 dirigeants recevant plus de 10 millions de dollars chacun, en bonus, pour l'année qui a vu la banque frôler la faillite.
Ce véritable coup d'état, grâce auquel les banques ont saigné à blanc l'état (donc les contribuables) américain, est parfaitement documenté dans le film Inside Job, lauréat de l'Oscar du meilleur documentaire en 2010. On y apprend également que le secrétaire du trésor américain sous Clinton, celui qui a déréglementé le système financier américain et mené le monde à la crise financière, était également de chez Goldman Sachs. Tous les observateurs de la crise financière se souviennent évidemment de Hank Paulson, le secrétaire au trésor de G.W. Bush, qui lui aussi était un ancien de Goldman Sachs.
Ce n'est pas un hasard si j'ai décidé de vous parler de Goldman Sachs et de revenir sur le cas du coup d'état américain. Car le nom de cette firme revient le plus souvent quand on observe le coup d'état que Wall Street est en train de réaliser en 2011, en Europe cette fois-ci.

Le cas Grec
Le cas de la Grèce est relativement facile à comprendre. Lors de son entrée dans la zone Euro, l'état grec a menti en trafiquant ses chiffres pour camoufler une partie de sa dette. Cette manipulation a été rendue possible grâce à un stratagème qui lui faisait présenter un financement de plus de d'un milliard d'euros comme étant une opération de change plutôt qu'une dette, amenant les observateurs des finances grecques à sous-estimer la véritable ampleur de la dette nationale. Or, ce "financement problématique", il avait été réalisé sous les conseils de la firme Goldman Sachs (la firme a d'ailleurs touché des honoraires de 300 millions pour ces conseils). Lors de cet "arrangement" des finances grecques, le vice-président de Goldman Sachs pour  l'Europe était Mario Draghi. Le gouverneur de la Banque centrale grecque était alors Lucas Papademos.

Le cas Italien
Je reviens donc au commentaire de Gérald au Téléjournal. Le nouveau premier ministre italien, Mario Monti, est un conseiller de Goldman Sachs depuis 2005. Ce fait qui relèverait presque de l'anecdote dans un autre contexte prend un sens effrayant quand on le replace dans ce que l'on connait du contexte politico-économique européen actuel. On annonçait justement aujourd'hui que son gouvernement ne comportera aucun homme politique, que des banquiers et des hommes d'affaires. Monti assurera non seulement le poste de premier ministre, mais aussi celui de ministre de l'économie italienne, alors qu'un super-ministère regroupant Infrastructures, Développement et Transport est confié... à un banquier.
Le magazine Time rapportait d'ailleurs, un peu avant la confirmation de la nomination de Mario Monti, que "many in parliament have spent the week whispering that Berlusconi's ouster amounts to a "banker's coup. 'Yesterday, in the chamber of deputies we were bitterly joking that we were going to get a Goldman Sachs government' says a parliamantarian".

Le triangle Grèce-Italie-BCE
Il ne faut pas oublier que l'Italie n'est pas le seul pays à se voir "imposer" un nouveau premier ministre par le groupe G20/BCE/FMI. Car avant l'Italie contrôlée par Monti; la Grèce venait tout juste de subir le même sort. Et qui est le nouveau premier ministre grec, sinon Lucas Papademos, ex-gouverneur de la banque centrale grecque lors du "contrat" avec Goldman Sachs. Entre ses deux postes, il a été vice-président de la Banque Centrale Européenne (BCE).
Quand à la BCE, son président a quitté dans la foulée de la crise de l'Euro, et vient - lui aussi - d'être remplacé. Par Mario Draghi, l'ex vice-président pour l'Europe de Goldman Sachs alors que le "contrat" grec était conclu. Entre les deux, il a été gouverneur... de la Banque d'Italie.

Et la démocratie?
On regarde cette prise de contrôle d'états par les banquiers, et on se dit que tout cela se fait à la barbe (ou avec la complicité de) Nicolas Sarkozy et Angela Merkel. Ces deux présidents étaient pourtant parmi les premiers à réclamer une réforme en profondeur du système financier et des marchés mondiaux de la finance lors de la crise en 2008. L'Europe avançait des idées comme des taxes sur les transactions financières et plus de réglementation. On ne parle plus du tout de ces choses-là aujourd'hui, alors que les banquiers (et Goldman Sachs) prennent effectivement le contrôle des finances européennes, et placent deux de leurs collaborateurs à la tête des états récalcitrants avec le troisième à la tête de la banque centrale européenne.
La prochaine étape semble être la France. Le chroniqueur Fillion en parle déjà sur son blogue à Radio-Canada. "Il y aura des élections en France dans six mois et les marchés financiers ont commencé à donner leurs indications. (...) Le gouvernement Fillon a déjà annoncé deux plans d’austérité, dont un il y a à peine quelques jours". Les français auront beau user leur droit de vote à la corde, à gauche comme à droite, la politique économique néolibérale est déjà tracée d'avance.

Conclusion
Certaines personnes avaient identifiées les politiques néolibérales et la dérégulation bancaire comme les principaux facteurs de la crise mondiale et s'imaginaient que les gouvernements s'en rendraient compte et agiraient en conséquence. Après tout, le modèle est simple: en créant un maximum de richesses, on créé aussi un maximum de dettes. Les richesses sont de plus en plus concentrées entre un petit groupe privé, les dettes sont essentiellement publiques, menant les états à la faillite. La solution est là.
Mais les banquiers en ont décidé autrement et en contrôlant les gouvernements, ils s'assurent qu'ils ne seront pas importunés par ceux-ci.
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Sources
"Mario Monti à la tête du gouverment italien et de l'Économie", Françoise Kadri, Agence France-Presse / cyberpresse.ca, 16 novembre 2011.
"Wall St. Helped to Mask Debt Fueling Europe’s Crisis" By Louise Story, Landon Thomas Jr. and Nelson D. Schwartz, New York Times, February 13, 2010
"Our friends from Goldman Sachs", Marc Roche, presseurope.eu/Le Monde, 16 novembre 2011.
"Un gouvernement de technocrates formé en Italie", Frances D'Emilio et Coleen Barry, Associated Press, 16 novembre 2011.
"Profile: Lucas Papademos", BBC News Europe, 10 novembre 2011.
"Enquête dans le temple de l’euro", Antoine Dumini et François Ruffin, Le Monde Diplomatique, novembre 2011.
"Regime Change in Europe: Do Greece and Italy Amount to a Bankers' Coup?", Stephan Faris, Time, 11 novembre 2011.
"Europe: la loi du marché", Gérald Fillion, le Blogue Économie, radio-canada.ca, 14 novembre 2011.
"Inside Job", film écrit et réalisé par Charles Ferguson, Representational Pictures / Sony Pictures, 2010.
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lundi 14 novembre 2011

Ma singularité climatique (Solaris 180)

Je lis de la science-fiction depuis environ trente ans. J'ai connu des périodes plus calmes, des périodes endiablées, mais je lis assez régulièrement de la SF, parmi le corpus de lecture qui occupe mon temps annuellement.
Pourtant, il y a moins de deux semaines, j'ai ressenti un choc pour la première fois.
Je vous parlais l'autre jour de la sortie de Solaris 180.
Quelques jours plus tard, je parcourais ses pages avec bonheur sans me douter de ce qui m'attendait.
J'avais d'abord lu l'excellente et exotique nouvelle d'Alain Bergeron ainsi que l'étonnante nouvelle lauréate du prix Solaris 2011 (un très bon texte de Josée Lepire). La curiosité m'a porté ensuite vers une nouvelle d'Yves Meynard, qui - oh surprise - reluque plus vers le fantastique que la SF. Une thématique très classique mais l'écriture d'Yves est efficace et toujours agréable à lire.
Puis, je me suis penché du côté de la toujours intéressante rubrique de Mario Tessier, qui cette fois, signe un passionnant article sur l'hypothèse Sapir-Whorf en SF, article qui a réveillé mon envie de relire 1984 d'Orwell.
Puis, de retour à la fiction, j'ai lu la nouvelle du même Mario Tessier, un texte original et ludique, intitulé Lettre à mon arrière-arrière-grand-père.
Et c'est là que c'est arrivé. J'ai frappé ce que j'appelle maintenant ma singularité climatique de lecteur SF. Et même si la nouvelle de Mario Tessier n'est pas responsable de ce fait, c'est en lisant celle-ci que je l'ai réalisé.
Lettre à mon arrière-arrière-grand-père emprunte un style que je trouve assez typique de l'âge d'or de la SF. En ce sens - et c'est un compliment - le texte m'a rappelé quelques textes d'Arthur C. Clarke. On parle presque d'un petit traité de futurologie présenté sous forme de littérature de SF, bien mené, rempli de petites trouvailles scientifiques agréables à lire, et avec une jolie conclusion.
Le problème avec la SF qui couvre une partie du monde tel qu'on le connaît (l'aïeul en question est décédé en 1998) et une partie du monde situé dans un futur proche, c'est que cette SF ne m'apparaît plus crédible. En tout cas plus crédible si l'auteur ne fait pas un effort considérable pour rendre ce futur proche (un demi à un siècle dans notre futur, disons) crédible compte tenu de ce que nous savons sur l'écologie, l'économie et la population planétaire actuelle. Sans entrer dans le détail, disons qu'une histoire de SF se déroulant en tout ou en partie en 2045, par exemple, peut difficilement éviter ces questions ou les reléguer au second plan en une phrase, sinon, je n'accepte pas le postulat qui veut que l'humanité telle que nous la connaissons ait simplement continué son chemin en évoluant mine de rien.
Malgré mon appréciation littéraire du texte de Mario Tessier, je n'ai pas pu embarquer réellement dans l'histoire, et donc y croire, puisque je n'ai pas réussi à suspendre suffisamment mon incrédulité pour accepter le postulat de la société qu'elle évoque (à peine), entre 2010 et 2100. On mentionne 2034, des guerres et des catastrophes écologiques, mais on n'explique pas de manière satisfaisante pour ce lecteur-ci comment on a réussi en tant qu'espèce à survivre ce passage autrement qu'en migrant sur la Lune ou ailleurs. Compte tenu de ce que je connais de la société actuelle, impossible, me dis mon cerveau, à moins que l'on me donne des éléments me montrant comment ça a pu se faire.
Bref, j'ai frappé un mur comme lecteur, ma singularité de lecteur SF: Le point (2011 dans mon cas) à partir duquel les auteurs de SF doivent imaginer l'inimaginable pour permettre de situer leur histoire dans un futur relativement proche du nôtre. Et justifier leur approche sans contredire ma connaissance de la situation mondiale. J'appelle ça ma singularité climatique, mais le concept englobe à la fois les criants problèmes climatiques de la planète, les problèmes démographiques et les problèmes économiques, puisque les écarts entre riches et pauvres vont finir par causer des crises sociopolitiques bien plus violentes que ce que l'on voit actuellement.
Cette réalisation a été un choc, au sens où je n'avais jamais véritablement réfléchi spécifiquement à cette question. Je remarque que c'est peut-être aussi un peu la faute de Daniel Sernine, qui, dans La Suite du temps, offre un panorama SF de cette période tellement crédible que la réalité rattrape lentement, mais sûrement, sa fiction. Difficile après ça d'accepter un postulat complètement différent.
L'ironie de cette réalisation à la lecture d'un numéro historique où Solaris devient la revue qui détient un record de longévité ne m'a pas échappé, mais n'a en rien calmé mon énervement face à ma nouvelle situation de lecteur SF... singulier.
J'ai ensuite songé aux nouveaux lecteurs, les jeunes qui découvrent les auteurs de l'âge d'or, comme je l'ai moi-même fait au milieu des années 80... Ces jeunes qui lisent Clarke ou Isaac Asimov arrivent-ils à y croire compte tenu du monde d'aujourd'hui? J'imagine que j'y arriverais toujours, en sachant que je lis des textes écris des décennies avant que la situation devienne ingérable, ou même critique, mais je n'ai pas eu le courage de vérifier. J'ai bien trop peur de gâcher mes excellents souvenirs de certains de ces romans pour tenter le coup.
Ainsi, pour le moment, j'en suis à me demander si je suis le seul lecteur de SF à avoir atteint ce mur de la singularité climatique. Je me dis que non. Je me dis que des lecteurs comme Sernine, justement, ont peut-être atteint ce point il y a longtemps, car il dépend de la croyance (la foi, allais-je écrire) que l'on a en l'humain de survivre à lui-même. Et dans mon cas, cette croyance, qui s'émiette depuis des années, s'est vraiment effondrée en 2011. Il faudrait bien qu'un écrivain/essayiste plus talentueux et connaisseur que moi en la matière s'attaque au problème, ça ferait un article intéressant... Quelqu'un comme Mario Tessier, peut-être?
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mardi 8 novembre 2011

Allons-vous survivre au progrès?

Soyons ambitieux; dans la question posée dans le titre de ce billet, le "nous", c'est l'espèce humaine.
- L'humain survivra-t-il?
- À quoi, me demandez-vous?
- À lui-même.
Et je ne parle pas de guerres, même si cet aspect finira bien par arriver quand les ressources limitées de la planète que nous occupons seront (vraiment) en trop petites quantités pour la population mondiale (l'occident).
Le réalisateur Mathieu Roy est venu traiter de cette question à l'émission Tout le monde en parle il y a quelques semaines dans le cadre de la sortie du film documentaire Surviving progress, qu'il a co-réalisé avec Harold Crooks. Le film pose un constat plus qu'alarmant au sujet de l'utilisation des ressources de la terre, actuellement, et de la dégradation des capacités de celle-ci à renouveler la plupart de ces ressources.
Bien qu'il soit basé sur le livre de Ronald Wright, A short history of progress, le film fait également place aux interventions du généticien David Suzuki, de la primatologue Jane Goodall, de l'écrivaine Margaret Atwood et même du physicien Stephen Hawking.
Sous la ligne directrice de l'exploration des conséquences du progrès de l'humanité sur son seul habitat, le film pose la question de sa survie en faisant quelques plongeons dans quelques histoires locales; une en Chine et une dans la forêt amazonienne au Brésil par exemple, en plus de mettre en parallèle la situation mondiale actuelle à celle des civilisations du passé, avec les exemples de Rome ou de la civilisation Maya. Le message est simple: la fin d'une civilisation, ça s'est déjà passé avant, mais avant, il y avait d'autres espaces pour recommencer ou continuer l'expérience humaine. Cette fois-ci, la terre est utilisée à pleine capacité, il n'y a pas d'après, si ça échoue. Le propos est clair: on ne parle pas d'une éventuelle extinction dans mille ans ou dans 500 ans; on parle d'une extinction d'ici cent ans, et probablement moins.
Ce film souffrira d'être vu par une audience déjà convaincue des problèmes qu'il aborde. On y dénonce évidemment le modèle néolibéral de croissance à tout prix, expliquant que ce modèle pousse à la surconsommation, laquelle nous a lancé à vitesse grand V vers le mur que l'on commence à voir venir devant nous.
«Dans le film, nous évoquons ce concept de pathologie idéologique propre aux civilisations qui se sont effondrées par le passé parce que leurs dirigeants, leurs élites, ont été aveuglés par de fausses idéologies. Or, aujourd’hui, nos élites adhèrent à cette croyance au progrès, au néo-libéralisme économique, à cette croissance à tout prix. Et ça, c’est une illusion! C’est une pathologie idéologique.»
- Mathieu Roy, co-réalisateur, au journaliste André Duchesne, de La Presse. 30 octobre 2011.
Surviving Progress, dans la mouvance de nombreux documentaires récents sur la situation mondiale, sera probablement judicieusement évité par les grands décideurs de ce monde, et probablement évité par ignorance par les masses qui préfèrent se mettre la tête dans le sable et poursuivre leur recherche de bonheur dans la consommation à grande échelle.
Parmi les nombreux intervenants du film, j'avoue avoir été particulièrement touché par Vaclav Smil, un professeur spécialiste en énergies. Sa vigueur et ses convictions sont contagieuses; les raisonnements soutenant le film sont si simples, souligne-t-il, qu'il a peine à croire que les gens ne réalisent pas qu'ils sont vrais. L'évidence est tellement frappante qu'il ne comprend pas comment les gens font pour l'ignorer encore et ne peut s'empêcher de ne pas rester calme devant ce qui devient de plus en plus inévitable.
Les spectateurs au courant de la situation mondiale n'apprendront pas beaucoup de nouvelles choses avec ce film, mais il a le mérite de présenter beaucoup d'informations de manière claire, bien documentée et bien vulgarisée.
Et si vous n'avez pas encore compris, alors allez voir ce film... avant que le monde dans lequel vous ne vivez ne vous permette plus de le faire. Vous aurez compris que malgré ses quelques rares pistes de solutions peu convaincantes (déménager sur Mars, se transformer grâce aux manipulations génétiques, etc.), le film peut avoir un effet assez déprimant pour les spectateurs n'ayant pas encore compris la gravité de la situation. Un des intervenants de Surviving Progress cite George Lucas, qui mentionnait qu'une des solutions possibles serait de se trouver une autre planète au plus vite, puisque celle-ci achève de pouvoir nous faire vivre. Quand même le réalisateur de rêveries comme Star Wars dit ça...
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Monsieur Lazhar

On a déjà beaucoup parlé du dernier film de Philippe Falardeau, Monsieur Lazhar. Et avec raison, car le film de Falardeau est un des plus beaux films de l'année. Un des plus fins aussi.
Le monsieur Lazhar du titre, c'est Bashir Lazhar, qui se fait engager comme enseignant dans une classe primaire en remplacement d'une enseignante décédée. La mort de cette dernière a laissé les enfants de la classe en situation de détresse et poursuivre leur enseignement est donc une tâche délicate. Bashir, originaire d'Algérie et en attente de son statut permanent au Canada, va les mener sur le chemin de la guérison. En plus d'être une belle histoire de rencontres des bonnes personnes aux bons moments, Monsieur Lazhar est aussi une étude sur l'éducation primaire au Québec, de même qu'une exploration de la découverte de l'autre, de la tolérance et des différences culturelles. Car ce professeur particulier, si étrange aux yeux des élèves dans son approche (qui donne des dictées tirées de Balzac, par exemple), a lui aussi certaines difficultés d'adaptation à la réalité québécoise.
S'ils sont le moindrement intelligent, les spectateurs qui sont des parents ne pourront s'empêcher de réfléchir à leurs vues sur l'éducation et à leur rôle (et modifier leur attitude); les constats posés par le film sont parfois consternants, comme celui sur l'absence absolue de contact ou le pouvoir des parents sur l'enseignant et la direction, par exemple.
Le spectateur ne pourra éviter non plus la réflexion sur le système d'immigration québécois, dont nous voyons ici un aspect peu reluisant et très peu humain (pour ne pas dire paranoïaque) dans son approche bureaucratique.
Monsieur Lazhar est donc un film sur les relations humaines et l'importance de celles-ci dans notre vie et notre équilibre psychologique. Comment les enseignants traitent les enfants, comment les parents traitent les enseignants, comment les fonctionnaires traitent les immigrants, voilà diverses questions explorées par le film. Si la réponse du film est que la plupart des gens semblent avoir perdu de vue l'importance des relations humaines, Falardeau arrive quand même à signer un film serein et qui favorise l'émergence des meilleurs sentiments à cet égards. Il réussit un film parfaitement équilibré où le drame est omniprésent mais jamais mélo, et où le sourire et même le rire sont ne sont jamais loin, sans jamais tomber dans le ridicule ou l'humour inutile. Son talent est de nous présenter un film qui a l'air léger sur des sujets pourtant profondément sérieux. On espère que des millions de personnes verront le film et en comprendront son propos, sa portée.
La publicité à la sortie en salles fait grand état des prix remportés un peu partout - et fort mérités - incluant la sélection pour représenter le Canada dans la course aux prochains Oscars. Ne retenez pas votre souffle, toutefois, car si Incendies avait un aspect international et exportable, c'est moins le cas de Monsieur Lazhar qui, malgré sa thématique universelle, traite souvent d'une réalité trop locale pour être appréciée largement dans d'autres cultures. Ceci ne devrait en rien vous priver de voir cet excellent film, bien entendu. Vous vous priveriez d'un grand film.
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lundi 7 novembre 2011

Cinq politiques révélatrices du nouveau (rest of) Canada

Note: Le P.S. a été ajouté le 8 novembre après publication original du billet le 7 novembre 2011.
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Parmi les nombreuses politiques idéologiques que le gouvernement du Canada a adopté depuis que les Conservateurs sont au pouvoir, on en note cinq récentes qui montrent comment ils traitent le pays, et comment ils traites les opinions des citoyens de ce pays.
1. Excuse my french
Tout le monde a parlé de la nomination du vérificateur unilingue (anglais); selon l'argument de la compétence; on n'est pourtant incapable d'imaginer la violente réaction qu'aurait le ROC et les Conservateurs si un unilingue francophone s'était avéré le plus "compétent" en la matière...compétent étant défini nonobstant la capacité à utiliser les deux langues officielles, s'entend. Remarquez que cette nomination ne surprend pas ceux qui suivent le dossier linguistique des Conservateurs depuis des années.
2. Détournement de fonds
Mon ami et blogueur Jean-Louis Trudel s'est penché sur les nouvelles règles de financement des partis politiques au pays et comment l'argument principal des Conservateurs est fallacieux, comme de coutume, et leur profitera encore plus que dans le système actuel et permettra d'augmenter le pouvoir qu'on les riches sur les politiques gouvernementales via le financement des partis.
3. Insécurité partisane
Côté finances publiques, alors qu'ils nous martèlent sans cesse qu'ils donnent de l'importance au contrôle des dépenses publiques, le projet de loi omnibus sur la "sécurité" coûtera une fortune supplémentaire à administrer et on ne se prive plus pour consacrer des sommes faramineuses à la sécurité à Ottawa. D'ailleurs, si la sécurité était si importante aux yeux des Conservateurs, ils ne détruiraient pas les données du registre des armes à feu qui est encensé par les policiers comme un excellent outil de travail et de prévention. Ce parti, qui n'en est pas à une contradiction près prouve une fois de plus qu'il gouverne à l'idéologie plus qu'à la raison.
4. Je (ne) me souviens (plus)
Jean-Louis Trudel parle également de la stratégie de destruction de la mémoire collective que représentent les archives bien tenues et des statistiques accessibles. On pourrait ajouter toute la panoplie de mesures "royales" qui ramènent au premier plan la vénération de la monarchie et l'esprit colonialiste qui permettent au gouvernement actuel de redéfinir à sa manière l'identité nationale.
5. Siège éjectable
Mais la palme de la politique antidémocratique revient définitivement à la réaction du gouvernement du ROC à l'accession de la Palestine à l'Unesco, où le gouvernement va à l'encontre de l'opinion publique et coupe sa contribution financière à l'organisme. On voit bien où se trouve son respect des règles démocratiques. Certains se souviendront peut-être d'une ancienne promesse conservatrice d'offrir un siège à l'Unesco pour le Québec... Ce siège, à l'intérieur de la délégation canadienne, semble éjectable; en effet, je me demande quel a été le poids du "passager" québécois à l'Unesco dans la décision du Canada de retirer son financement à cette agence de l'ONU. Remarquez que l'Unesco s'occupe de culture, d'éducation et de science, trois sujets très éloignés des priorités conservatrices et vues par ceux-ci comme des domaines coûteux et improductifs.
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En attendant De Gaulle
Je ne peux m'empêcher de relier ces cinq dossiers, pour voir à quel point le gouvernement actuel mène sa barque dans une direction totalement opposée à ce qui préoccupe le Québec. Le fait français dont on se préoccupe de l'érosion, le financement des partis (que l'on parle de rendre encore plus public et moins privé au provincial), les données sur le registre que l'on voudrait rapatrier, l'importance de notre histoire et de laisser la monarchie là où elle se trouve, et la politique internationale et l'importance de l'éducation, de la culture et de la science.
J'ai souvent dit que si le Québec devenait un jour souverain, ça ne serait pas vraiment à cause des efforts des souverainistes purs et durs, mais que la souveraineté du Québec serait réalisée par des fédéralistes. C'est ce qui risque de se passer avec le gouvernement actuel, qui éloigne dramatiquement le Canada des valeurs québécoises. Même l'enfant battu qui aime son père fini par le quitter quand il comprend que celui-ci le méprise. J'avais mentionné lors des élections que ce Canada n'était plus mon pays et ne représentait plus le pays où j'avais grandi et évolué. Je constate que je ne suis pas le seul à le penser, même chez les fédéralistes.
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P.S. Le lendemain de la publication de ce billet, j'ai eu la surprise de lire cet article publié par un blogueur Albertain... qui abonde dans le même sens que moi!
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dimanche 6 novembre 2011

Murales montréalaises (3)

Je n'ai pu résister à capter quelques murales supplémentaires lors de mes errances dans les quartiers de Montréal non loin de chez moi. Ce billet, qui fait suite aux deux autres billets similaires, devrait donc être le dernier du genre (il ne faut pas abuser).


Voici, en plein coeur du quartier latin, une oeuvre qui s'intitule "The society for the reform of the golden rule". Votre interprétation vaut certainement la mienne. 


"Organic fresh heroes" découvert sur le Boulevard St-Laurent, près du coin Sherbrooke. Je n'avais jamais remarqué ce segment de murale avant de tomber dessus par hasard la semaine dernière.


Celle-ci, sur la rue St-Denis sur le Plateau Mont-Royal, a ceci de particulier: Elle est la seule de toutes les murales de mes pérégrinations montréalaises à se trouver en façade d'immeuble, et donc, à être percée de fenêtres qui trouent le dessin. Même si ce n'est pas la plus belle chose au monde, l'effet n'est pas si mal.


Le centre communautaire Patro Le Prévost affiche cette murale basse qui s'appelle "Isocèle". Les triangles semblent illustrer le lien entre les communautés et le centre...


Le même centre Le Prévost a aussi cette murale sur le côté de l'édifice faisant face à Everett, au coin Christophe Colomb, où on peut plus facilement comprendre l'illustration des liens culturels du centre avec les communautés du quartier.


Une autre oeuvre amateure qui avait une thématique naturelle (on distingue encore des arbres), mais malheureusement, l'affaire a été vandalisée par des graffitis. Aperçu par hasard sur Roy, près du coin Mentana.


Cette immense murale couvrant un immeuble de 5 étages est facile à trouver; sur Lajeunesse à la sortie du métro Jean-Talon. De loin, on dirait presque une oeuvre religieuse, mais en s'approchant (ou en cliquant sur la photo pour voir plus de détails), on se rend compte qu'il s'agit d'un tableau de diverses cultures historiques du monde (au sens large). On peut reconnaître des glyphes anciens, un morceau de colonne grecque qui côtoient des scènes désertiques ou un dragon asiatique. "La 6e sphère de la culture", peut-on y lire en bas à gauche, en guise de titre.
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vendredi 4 novembre 2011

Le nom des gens (et autres films étrangers)

J'ai récemment vu quelques films étrangers; je fais en quelque sorte le plein de cinéma international avant l'arrivée de la double vague de films américains; les blockbusters des fêtes et les films indépendants qui espèrent être dans la course aux Oscars.
Les films étrangers, à part quelques exceptions, nous parviennent souvent avec un certain décalage après leur sortie locale. Le résultat est que souvent, les médias en parlent peu lors de leur sortie ici et que l'engouement provoqué lors de leur sortie initiale a disparu ou que les prix remportés datent déjà d'une saison ou deux. On peut heureusement (re)découvrir de véritables bijoux en DVD.

Le nom des gens
Le nom des gens est un film qui a remporté la palme du meilleur scénario aux Césars l'an dernier.
Il raconte l'histoire d'Arthur Martin, un tranquille fonctionnaire de gauche travaillant à la santé publique, dont la vie est chamboulée par la rencontre avec Bahia Benmahmoud, fille d'un immigrant maghrébin et d'une anarchiste française ayant tourné le dos à la bourgeoisie de ses parents. Pour Bahia, la plupart des gens sont trop à droite, et doivent être ramenés dans le droit chemin, ce qu'elle se propose de faire en utilisant sa beauté et son corps comme arme politique. Elle obtient toujours d'excellents résultats, jusqu'au jour où elle rencontre Arthur, qu'elle trouve à droite avec son principe de précaution appliqué aux dangers d'épidémies.
On aura compris que cette toile de fond sert un propos qui est tout autre, puisque Arthur Martin tient son nom d'un père que sa mère était heureuse de marier pour se débarrasser de son nom dont les origines grecques et juives sont relativement floues parce qu'elles sont taboues dans sa famille. Bahia, qui n'a pas du tout les traits maghrébins de son père, étonne toujours ses interlocuteurs quand elle prononce son nom.
Si ce film est parmi les meilleurs que j'ai vu cette année, c'est en grande partie grâce à son scénario intelligent, mais aussi grâce à l'incroyable performance de Sara Forestier en Bahia. L'actrice a d'ailleurs remporté le César de la meilleure actrice en 2010 pour ce rôle, qui est un peu comme une sorte d'Amélie Poulain exotique classée 16 ans et plus. C'est un film militant bien que divertissant, intelligent bien que d'allure aussi légère que les moeurs de Bahia. Un coup de coeur définitif, à voir absolument.

Horrible bosses
Dans un tout autre registre, cette comédie américaine un peu décalée est étonnante. L'idée à l'origine du film est pourtant assez convenue; trois amis sont aux prises avec des patrons épouvantables. Le premier travaille dans la finance aux ordres d'un patron autocratique et arrogant se montrant odieux à tous les niveaux sachant que les employés auraient de la difficulté à se trouver un emploi alternatif pendant la crise. Le second se retrouve à travailler pour le fils haineux et irresponsable du patron récemment décédé qu'il vénérait. Quand au troisième, il assiste une dentiste nymphomane qui ne cesse de le harceler sexuellement. Au fil des frustrations partagées autour de quelques bières, ils en viennent à la conclusion qu'ils devraient faire assassiner leurs patron pour régler leurs problèmes. S'en suit une série d'imbroglio et de scènes qui vont du loufoque au délirant et utilisent une bonne partie de la panoplie classique des comédies de situation. Si le film vaut son pesant de rires, c'est surtout par ses dialogues qui font mouche, et l'interprétation de ses acteurs. On remarque surtout les méchants patrons joués par Kevin Spacey, Colin Farrell (méconnaissable) et Jennifer Aniston (tordante en dentiste nymphomane), mais Jamie Foxx, en consultant en assassinat est aussi délirant dans un second rôle.

Mine Vaganti
Ce film italien est distribué ici sous le titre anglophone Loose Canons ou le titre francophone Le premier qui le dit. Il raconte la tentative de coming out de Tomasso Cancone, un des deux fils héritiers d'une famille d'entrepreneurs italiens possédant une petite usine de fabrication de pâtes alimentaires. Il prévoit annoncer son homosexualité lors d'un souper réunissant la famille avec celle d'un autre entrepreneur qui vient de fusionner son entreprise avec celle des Cantone. Or ses plans sont bouleversés par son frère Antonio, qui annonce à tous qu'il est lui-même homosexuel. Devant la réaction de son père, qui le renie sur le champs, il quitte l'entreprise et Tomasso se retrouve à la tête de celle-ci, en compagnie de Alba, la jolie fille de l'autre entrepreneur, plutôt que d'être avec son amoureux à Rome.
Mine Vaganti est un délicieux petit film qui traite avec subtilité des relations familiales, sociales et amoureuses. Les crises qui secouent la famille Cantone seraient inexistantes sans un bagage de préjugés qui découlent de pressions sociales; le père se souci bien plus du regard des autres dans sa petite communauté que de ses sentiments pour son film Antonio, par exemple. Le film réussi à maintenir un équilibre fragile entre comédie et drame, sans jamais perdre de son charme; les personnages sont tous attachants - même le père, obstiné. Enfin, l'ensemble du scénario est d'ailleurs encadré par l'histoire d'amour impossible vécue par la grand-mère de Tomasso, ce qui lui donne un aspect intemporel et universel.

El secreto de sus ojos
Si les comédies ne vous tentent pas, peut-être que ce suspense argentin le fera. Le film s'ouvre sur les nombreuses ouvertures possibles qu'envisage Benjamin Esposito, un procureur à la retraite qui tente d'écrire un livre sur un dossier laissé en plan qui l'a obsédé pendant toute sa carrière. Alors qu'il discute de son livre et du dossier avec son ancienne collègue Irene, maintenant juge, le passé refait surface lentement. Benjamin tentera d'aller au bout de cette histoire, ainsi que de celle de son amour pour Irene, jamais déclaré.
Ce n'est pas un hasard si ce film extrêmement bien ficelé à remporté l'oscar du meilleur film étranger il y a deux ans. J'ai vu des centaines de polars et de suspenses, et peu ont réussi à maintenir un tel climat de tension et arriver à étonner avec une chute imprévisible et crédible à la fois. La vie dans le système de justice argentin vient ajouter une profondeur à un récit déjà riche en éléments étrangers et la narration déconstruite et qui alterne les époques joue pour beaucoup dans l'ambiance glauque qui règne sur tout le film. L'interprétation nuancée des acteurs donne encore plus de substance à ces personnages - qui sont peut-être aussi crédibles parce que joués par des acteurs qui nous sont inconnus pour la plupart. La réalisation relativement lente pour un suspense, sait jouer sur la tension plutôt que sur les effets faciles, ce qui est tout à l'honneur du réalisateur de film diablement efficace.

Les invités de mon père
Un vieux docteur militant ayant fait la guerre et ayant été de la lutte pour la légalisation de l'avortement, vient en aide aux immigrants sans papiers. Un jour, il décide d'héberger une jeune moldave et sa fille, au grand désespoir de ses enfants. Ce film français m'a agréablement surpris. je m'attendais à une histoire un peu convenue, dont la morale serait évidemment de laisser vivre sa vie au père/grand-père de l'histoire, et où les préjugés contre les immigrants profiteurs seraient déboulonnés au détriment des opinions du fils nouveau riche, par exemple. Et bien non. Il s'avère que Les invités de mon père est plus subtil dans son traitement d'un problème difficile que sont les relations avec les étrangers au sens large, même si ce thème est ici exploré via les relations avec une immigrante et sa fille et l'impact sur une famille assez classique.
Des opinions tranchées et souvent clichés du fils, qui s'avèrent souvent vraies, aux motifs et réactions de la jeune femme moldave, qui sont parfois plus déroutantes et obscures que prévu, le film prend des avenues inattendues et vous mène rarement là où vous pensiez aller. En ce sens, c'est une très belle réussite, qui n'empêche pas ses créateurs de vous offrir des excellentes scènes de comédie malgré le sérieux du propos général, qui vous invite à questionner vos propres idéaux et réactions au passage.
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jeudi 3 novembre 2011

JQSI: De Tunis à Wall Street

Depuis le début du mois, ce sont les Journées Québécoises de Solidarités Internationales.
À chaque année, l'AQOCI organise cet événement qui varie beaucoup en terme d'activités, selon les organismes collaborateurs et les thématiques abordées.
Si vous avez lu quelques uns de mes précédents billets sur la situation économique mondiale, vous comprendrez que cette année, la conférence d'ouverture avait de quoi attirer mon attention. Elle était livrée par Serge Halimi, le directeur de l'hebdo français indépendant Le Monde Diplomatique. Cette conférence, intitulée « De Tunis à Wall Street : la mondialisation des luttes citoyennes » était donc présentée mardi soir, devant plusieurs centaines de personnes. Dans sa présentation, M. Halimi s'est arrêté à analyser les éléments qui relient les revendications et manifestations que l'on observe un peu partout dans le monde, depuis les débuts du printemps arabe jusqu'aux suites du mouvement Occupy Wall Street, en passant par les manifestation de la Puerta del Sol à Madrid.
Le conférencier fait remarquer que le point commun à tous ces groupes est la demande de changement (de politiques et d'économie mondiale) suite à l'augmentation accélérée de l'écart entre riches et pauvres. Que se soit les dirigeants autocratiques en Tunisie ou en Égypte, ou les oligarchies néolibérales Américaines, Européennes ou Canadiennes, la conclusion reste la même; la démocratie n'existe plus.
Car en plus de s'attaquer à démontrer ces liens, M. Halimi montre du doigt des systèmes politiques désuets et aux mains des grands financiers internationaux pour expliquer que même dans les soi-disant démocraties, le citoyen qui cherche du changement n'en trouvera pas. La perte de souveraineté des états est selon lui un des grands maux auxquels les politiques néolibérales ont menées; la finance et l'économie sont mondialisées et devenues maîtres des règles qui régissent les états et ceux-ci n'ont plus de pouvoirs souverains. Il n'y a qu'à regarder ce qui se passe avec la Grèce pour comprendre que malgré l'élection d'un gouvernement de gauche, ce dernier n'a aucun pouvoir face aux conditions imposées par le FMI ou la BCE. L'élection ne signifie rien puisque les élus n'ont pas de marge de manoeuvre.
Il est évidemment impossible de résumer en quelques lignes l'argumentaire élaboré et bien documenté développé avec crédibilité par M. Halimi dans sa conférence, et c'est bien dommage, car sa démonstration était exceptionnelle et agrémentée de nombreux exemples tirés du contexte politique et historique partout au monde. Pour le moment, on ne peut malheureusement pas trouver le texte de cette conférence en ligne. Claude Lévesque du Devoir a toutefois rencontré le conférencier. Son article est très sommaire et réduit parfois le propos de M. Halimi, mais il demeure intéressant à parcourir. J'en retiens d'ailleurs la conclusion, où il explique en quoi la crise financière et économique qui prouve hors de tout doute les effets pervers et néfastes du néolibéralisme a paradoxalement engendré un renforcissement de ces politiques:
«En 2008, après la faillite Lehman Brothers, certains ont cru à la fin des politiques néolibérales, au retour de Keynes et même à une résurrection de Marx, puis, l'année suivante, on a eu la crise de la dette souveraine qui a obligé les États à adopter des politiques encore plus libérales. On assiste à des indignations récurrentes qui peuvent à terme discréditer un peu plus un système politique qui se présente chaque fois comme médecin du mal économique et qui, un mois plus tard, se révèle être celui qui a aggravé l'état du patient.»
(Le cas de la Grèce, qui fait les manchettes quotidiennes ces jours-ci, est le parfait, et désespérant exemple de cette conclusion).
Reste à espérer, pour l'avenir du monde, que le patient se réveillera et s'opposera à cette médecine, avant d'y succomber.
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mercredi 2 novembre 2011

Sur la ligne rouge du palais des congrès

Je ne sais pas quand la chose s'est produite, mais si vous passez au Palais des Congrès de Montréal, vous noterez qu'on a retiré les parois de verre que l'on voyait le long du corridor principal (et que l'on peut apercevoir sur la seconde photo de ce billet datant de 2009).


On a remplacé la paroi de verre par une ligne rouge.


Cette ligne rouge porte plusieurs inscriptions, à partir de son extrémité ouest, inscriptions qui soulignent les principaux grands événements qu'a accueillis le Palais des Congrès au fil des ans.


Et c'est avec plaisir que j'y ai retrouvé la mention d'Anticipation et son coordonnateur René Walling.
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mardi 1 novembre 2011

Une visite dans le village


Voici une scène intéressante. Il ne s'agit pas d'un camping en région ou dans la forêt.


Il s'agit du Square Victoria, en plein centre des affaires de Montréal *.
La place sise au pied de l'ancienne Tour de la Bourse de Montréal.


La Place Victoria est devenue, depuis plusieurs semaines maintenant, le Village des indignés. Même s'ils ne sont que quelques centaines à y habiter (on parle d'environ 400 résidents), ils sont aussi la voix de plusieurs indignés qui se joignent à eux lors des marches, même s'ils n'ont pas pris la décision de résider dans le Village.


Le mouvement "Occupons Montréal" semble donc là pour rester, et j'ai fait une petite visite au village en fin de semaine. J'ai assister à quelque réunion, puisque le village est un endroit très démocratique, et qui est de plus en plus organisé.


Les médias semblent avoir compris que les indignés n'avaient pas de revendications spécifiques, et n'étaient pas un groupe homogène ou organisé a priori. Le mouvement s'exprime aussi bien par des blogues que par des pétitions, des supports à d'autres organisations plus structurées comme Avaaz ou via des entrevues avec les médias afin de faire réaliser au grand public que notre système actuel est une impasse et doit être changé en profondeur. La revendication principale du mouvement se trouve là: conscientiser le public au problème afin que le poids de la masse engendre éventuellement des changements au niveau politique.


Si certains le font avec humour, et que nombres de revendications disparates individuelles se mélangent et se recoupent parfois, ça n'empêche pas le calme de régner dans le village, d'après ce que j'en ai vu pendant ma visite.


Le contraste de l'installation de ces résidents au centre d'affaire en une sorte de village de la simplicité volontaire est fascinant. Tentes et abris, bacs de recyclage et de compostages, font face à de grands hôtels comme le W ou encore des sièges sociaux représentatifs de la pensée économique de droite comme les grandes banques ou encore Québécor.
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* J'ai évidemment pris ces photos pour illustrer mon propos et surtout au profit des lecteurs qui n'habitent pas Montréal.

Gentils Alouettes

Je n'ai vu personne d'autre lire Orwell au stade,
cet après-midi là
Ce n'est pas parce qu'on n'est pas un maniaque de sport, qu'on ne lit jamais les centaines de pages des sports des quotidiens publiées un jour où les Canadiens ne jouent même pas, ou qu'on n'écoute aucune émission de télé ou de radio consacrée au sports sans se tordre de rire que l'on ne peut pas apprécier un bon match sportif à l'occasion.
La preuve, cet excellent après-midi passé au Stade Percival-Molson pour assister au match opposant les Alouettes de Montréal aux Stampeders de Calgary. Malgré la défaite de l'équipe locale, nous avons eu droit à un beau match, très serré, et ce jusqu'à la dernière seconde de jeu, littéralement.
Ce qui est intéressant avec un match live, c'est évidemment que l'on voit le jeu dans son ensemble tout le temps, avec personne pour attention notre attention sur le ballon, le porteur de celui-ci ou le receveur de telle ou telle passe. On peut ainsi profiter un peu plus du jeu lui-même.
Antony Calvillo, le corps arrière des Alouettes est maintenant une célébrité puisqu'il a récemment battu un record de tous les temps concernant la distance gagné par la passe, record qu'il continue à rendre plus inaccessible dans les derniers matchs de la saison. Dimanche, il a livré certains jeux spectaculaires, au grand plaisir des 24 000 fans présents. D'ailleurs, si le match a été si intéressant, c'est en partie à cause de jeux enlevants que les Alouettes ont réussis; revirement avec course de plus de 40 verges, touché après une course de plus de 50 verges sur un troisième essais et une feinte de botté de dégagement, longue passe spectaculaire pour un touché au quatrième quart, etc.
Mais la raison principale de l'intérêt du match demeure le jeu lui-même, qui est un jeu intéressant à regarder. Malgré le fait qu'il s'agisse d'un sport de contact assez physique, l'ensemble est très civilisé, pas du tout violent; bien moins violent que le hockey, par exemple, et même que le hockey dont on n'autoriserait que les mises en échecs. En assistant à un match de football canadien, on n'a pas du tout l'impression d'assister à un affrontement de gros bras ou à une guerre d'intimidation physique.
Pub, mascotte, caméras de télé et cheerleaders.
Enfin, pour les amateurs de sport, disons que dimanche, les Alouettes se sont montrés faibles à trois niveaux; attaque au sol, qui n'allait nulle part, défense, qui a été une passoire pendant la première demie, et bottés, dont l'importance était évidente dans ce match où tous les bottés (envois comme dégagement) des Alouettes étaient inférieurs à ceux de l'adversaire. A la longue, ça fait de la distance à récupérer sans arrêt.
Si jamais vous avez l'occasion d'assister à une partie des Alouettes, n'hésitez pas, c'est un après-midi fort agréable à passer sous le soleil - même froid - de Montréal à l'automne.
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Quelques photos supplémentaires:

Les cheerleaders sont un des aspects du football qui
fait sourire. Malgré leurs bonnes intentions, ça fait
 "vieux mononcle" comme  activité. Avec la saison, celles de
Montréal  sont plus habillées que la norme américaine, au moins.
L'accès au stade permet d'apprécier certains édifices des
 environs, comme ceux du Royal Victoria, par exemple.
Sinon, les édifices de la rue Sherbrooke pouvaient
aussi être admirés - ici par réflexion dans une
 voiture de police du SPVM.
Une observation anecdotique: on avait droit à 7 fois plus
de policiers pour assurer la circulation  que
lors de la traversée des zombies de la rue St-Denis.

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