samedi 12 avril 2008

Une soirée avec Louis-José Houde

On trouvera probablement étrange qu'en cette période d'euphorie autour des chances des Canadiens de Montréal en série de la coupe Stanley, je me sois retrouvé au Centre Bell deux fois en dix jours... pour d'autres événements qu'un match de hockey...
Après le spectacle d'Avril Lavigne de la semaine dernière, j'étais de retour dans l'amphithéâtre montréalais pour le spectacle d'humour de Louis-José Houde, hier soir.
Louis-José Houde est un humoriste qui s'est développé un créneau à lui, sans créer de personnages, sans faire d'imitations, sans chansons, mais tout simplement en concentrant ses histoires sur les éléments du quotidien. Il n'est certes pas le premier humoriste à utiliser ce genre de sujet et de ressort, mais il le fait avec une originalité certaine.
Son spectacle, intitulé «Suivre la parade», commence avec :
«Mon grand-père a eu mon père quand il avait 20 ans, mon père m'a eu quand il avait 25 ans. Moi, j'ai 30 ans, et j'ai loué Spider-Man 2 hier soir.»
Le spectacle dure environ 2h30 (hier, l'humoriste a ajouté un segment de presque dix minutes supplémentaires), plus un bon 15 minutes d'entracte, et avec la diction de l'humoriste, on peux dire qu'un autre performer aurait probablement fait un show de 3h avec le même texte!
On rit beaucoup dans ce spectacle, mais même dans les moments où on rit moins, on sourit en permanence - c'est donc le genre de soirée qui se termine avec des maux à la mâchoire!
Ce que j'ai bien aimé du spectacle de Louis-José Houde, c'est qu'il s'agit d'un show très bien écrit. On ne parle pas ici d'une simple enfilade de gags, ou d'une plus classique enfilade de sketches, mais bien d'une sorte de longue pièce comique en deux actes, dont plusieurs blagues et effets comiques reposent sur un scénario bien huilé, bien préparé, et définitivement écrit avec talent. Évidemment, l'interprétation est importante, mais j'ai l'impression que le texte est le point fort de ce spectacle.
La seconde partie du spectacle est aussi plus profonde que la première; l'humoriste ose y aborder deux thématiques principales: la séparation de ses parents et l'avortement de sa copine. On a du mal à imaginer comment on peut faire de l'humour convaincant sans tomber dans la facilité; ces deux thématiques sont déjà un point de départ très fort, audacieux même.
C'est aussi pendant cette seconde partie plus intense, que l'humoriste délivre ses gags les plus efficaces; plusieurs des effets trouvent enfin leur conclusion, après avoir été soigneusement préparées depuis le début du spectacle et cette manière de faire amplifie beaucoup le potentiel comique de plusieurs gags. (La réplique «Vous autres non plus vous n'avez pas fait votre stop?» est cent fois plus amusante - et dérangeante - dans ce contexte que si l'humoriste n'avait pas mis la table une heure plus tôt avec l'anecdote de son père sur l'origine de cette réplique, par exemple). J'y ai vu le signe d'un auteur intelligent et d'un professionnel qui sait ce qu'il fait et comprend les mécanismes de l'humour. Cet aspect force l'admiration, de la part du modeste auteur que je suis.
Une autre caractéristique de l'humour de Louis-José Houde, c'est cette habitude qu'il a de prendre, le temps d'une réplique, le point de vue d'objets du quotidien, voire même le point de vue d'un mot, tout simplement. («Même le mot "Va-nu-pieds" s'est demandé: Moi... J'ai été prononcé?»)
Je disais, la semaine dernière, que le Centre Bell n'est pas un amphithéâtre facile à habiter - et c'est d'autant plus vrai avec un humoriste en solo qu'avec un concert musical -, eh bien Louis-José Houde réussit à créer une atmosphère même dans ce lieu immense, ce qui démontre que malgré son gabarit, l'humoriste a une présence sur scène impressionnante. Nous avions beau être six mille personnes, il a réussit à créer un sentiment de connivence et de simples discussions entre amis à peu près tout le long du spectacle. Il accomplit le tout sans aucun effet de scène, à l'exception de son entrée en seconde partie avec un solo de batterie endiablé (permettant ainsi aux retardataires de l'entracte de revenir à leurs sièges et créant un lien avec les derniers moments du premier acte, où il avouait qu'en vacances dans le sud, il voyage sous le nom de Norman et se fait passer pour un batteur de groupe rock).
Après les bons commentaires que je publie régulièrement ici sur divers spectacles, films ou musicals, on me dira bon public (je le suis généralement), mais coup donc, quand c'est aussi bon que le show de Louis-José Houde, je vois mal de quoi je pourrais me plaindre. (Il faut aussi dire que je demeure plutôt sélectif, n'ayant pas tous les soirs à consacrer à une vie culturelle, malheureusement.)
Je vous invite à assister à cet excellent spectacle; la représentation de ce soir a été annulée puisque l'amphithéâtre est occupée par des joueurs de hockey, semble-t-il, mais l'humoriste y revient en mai et en juin prochain.
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