Au lendemain du débat des chefs en français, et alors que les mêmes acteurs débattent dans la langue de Shakespeare - et répètent essentiellement la même chose - je fais ici mon commentaire politique de la campagne électorale fédérale canadienne.
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Comme de la science-fiction.
Imaginez que nous sommes dans l'hémisphère sud de la planète, au Vietnam, par exemple, et que je m'installe à un ordinateur dans un café internet pour publier un commentaire sur mon blog pendant mon voyage... Ah, oui, nous sommes au début de janvier 2009...
Je débute mon billet, puis, j'ai une idée, et tente de retourner dans le passé pour changer les choses... Je m'imagine de retour en octobre 2008, au lendemain du débat électoral en français, le soir du débat en anglais... j'écris quelques lignes, puis publie le commentaire, qui apparait alors sur mon blog le soir du 2 octobre 2008.
L'avenir me dira si j'ai réussi.
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Novembre 2004, Vancouver, BC.
Comme beaucoup de Canadiens et de gens d'un peu partout au monde, en novembre 2004, je n'en reviens pas du résultat des élections présidentielles américaines. George W. Bush viens d'être réélu. Plusieurs de mes amis ne comprennent pas comment la chose est possible, comment une majorité d'Américains a pu voter pour Bush en toute connaissance de cause, avec son lourd bilan de 4 ans de pouvoir. Nous sommes sidérés par ce résultat. Nous questionnons l'intelligence-même des américains.
Une bonne amie à moi, en novembre 2004, me confie qu'heureusement, une telle chose ne peut pas se produire au Canada. Après tout, au Canada, nous avons des médias plus libres, moins orientés, politiquement. Nous sommes donc mieux informés... et avouons franchement que nous sommes plus intelligents et moins manipulables, puisque la campagne républicaine était parfois surréaliste dans les arguments ridicules, et nivelait le débat vers le bas.
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Juin 2005, Santa-Elena, Guatemala.
L'Esprit Vagabond, en voyage en Amérique Centrale, rencontre des voyageurs américains, découragés de leur gouvernement républicain. Certains d'entre eux, pour éviter les problèmes d'opinion à l'étranger et pour éviter d'avoir à se justifier même s'ils n'ont pas voté pour George W. Bush, ont cousu un drapeau du Canada sur leur backpack. Ils me confient qu'ils ont même acheté un "kit Canada" pour les aider à avoir l'air canadien à l'étranger. Je ne peux alors imaginer que l'on puisse ressentir une telle honte envers son pays. Je ne suis pas toujours d'accord avec les politiques canadiennes, mais globalement, je n'ai pas honte au point de me prétendre d'une autre nationalité.
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Septembre 2008, Montréal, Québec.
Eh bien, le moins qu'on puisse dire de la campagne actuelle, c'est que la simple possibilité de voir comme résultat, un gouvernement Conservateur majoritaire, fait comprendre comment la réélection de Bush a pu se produire en 2004.
Nous pensions le Canada à l'abri d'un tel contrôle d'information, d'autant de désinformation, d'absence de plate-forme réelle et de simple "we have a plan"... Force est d'admettre que nous avions tort.
Nous croyions que le Canada était à l'abri de la possibilité qu'un parti avec une aussi forte idéologie de droite puisse prendre le pouvoir... Nous avions tort. Nous pensions qu'au Canada, les divergences d'opinion se situaient sur l'approche centralisatrice ou décentralisatrice, sur les questions d'économie... Nous ne pensions jamais avoir une campagne où l'idéologie de droite serait aussi dominante tout en étant aussi camouflée. Nous ne pensions pas que le débat pouvait être autant nivelé vers le bas. Pas au Canada.
Nous avions tort. Globalement, nous ne sommes pas mieux que les Américains que nous ridiculisions il y a 4 ans.
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Octobre 2008, Québec, Québec.
Il s'écrit énormément d'articles et d'éditoriaux pendant une campagne. J'ai lu la semaine dernière un excellent commentaire de David Desjardins, du Voir Québec, où il fait le lien entre le ton de la campagne et l'intelligence. Je vous invite à lire le texte en question.
Josée Legault, observatrice et chroniqueuse politique pour le Voir parle aussi de l'incroyable tengeante qu'a pris la politique canadienne avec cette campagne.
Ces deux textes illustrent assez bien ce qui me dérange dans la campagne actuelle. Il faut comprendre que c'est la première fois que le Canada se retrouve avec la possibilité réelle qu'un parti idéologiquement autant à droite forme un gouvernement majoritaire (et on ne parle pas ici de simple idéologie économique, on parle d'idéologie anti-scientifique, anti-culturelle, de droite religieuse, de créationisme, de diminution des droits individuels, des droits d'opinion - ce qui est déjà fait dans le financement du cinéma au pays!).
Quand on regarde les dégâts déjà engendrés au niveau environnemental et culturel par le parti au pouvoir, même minoritaire, on est en raison de s'inquiéter de la suite. Bon, on me dira que le Parti Libéral ne s'est pas opposé réellement, et c'est vrai, mais avec une majorité parlementaire, même une opposition acharnée ne pourrait empêcher les idées de droite de prendre le contrôle du pays et de voter des lois en conséquence. Une fois en vigueur, il sera très difficile de revenir en arrière si ces lois viennent contrôler les opinions divergentes au pays.
Quand on voit où cette même idéologie de droite a mené les républicains et les États-Unis en général au cours des huit dernières années, je dois avouer que c'est inquiétant. (On pourrait aussi ajouter que la simple idéologie du libre marché économique a aussi mené les américains à une crise qui aurait pu être évitée autrement, mais vous avez déjà compris ça).
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Novembre 2008, Washington DC, USA.
Les observateurs le prévoyaient depuis le début d'octobre, il semble que les Américains prennent le virage démocrate, et élisent un président centriste, comprenant huit ans plus tard où les a mené l'idéologie de droite des républicains. J'imagine les voyageurs croisés au Guatemala quelques années plus tôt, en train de recoudre des drapeaux américains sur leur backpack. Je suis content pour eux.
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Janvier 2009, Hoi An, Vietnam.
L'Esprit Vagabond, en discussion avec d'autres voyageurs, n'arrive plus à justifier les politiques du Canada. Devant des voyageurs européens, il n'arrive pas à expliquer comment les Canadiens ont pu élire un gouvernement majoritaire conservateur et ainsi permettre de devenir un des pires pays du monde en terme d'environnement alors que le reste du monde industrialisé a pris un tournant plus vert. Je ne peux pas justifier que mon pays émet de plus en plus de gaz à effet de serre alors que l'Europe a sa bourse du carbone.
Quelques minutes après cette discussion avec les touristes européens, sur la rue, j'aperçois un autre voyageur, un des américains croisé à Santa Elena en 2005, qui traverse Phan Dinh Phung, et je vois le drapeau sur son backpack... et je l'envie.
Alors au coin de Hai Ba Trung, j'entre dans le café internet et commence la rédaction de ce billet.
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Comme de la science-fiction.
Je me demande.
Je me demande si les Américains de cet automne 2008 passé, qui n'approuvent pas les politiques de leur gouvernement républicain des 4 années précédentes, pouvaient retourner dans le passé, retourner en novembre 2004, éliraient-ils George W. Bush quand même? La question ne se pose même pas.
Alors je me demande soudain... pourquoi ferait-on la même erreur, nous? A fortiori avec l'exemple que les Américains ont élaborés pour nous de 2000 à 2008! (Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si Stephen Harper a provoqué des élections avant les élections présidentielles américaines).
Nous l'avons, cette possibilité de retourner dans le temps qui a manqué aux Américains!
Allons-nous utiliser ce voyage temporel virtuel pour changer notre futur?
J'espère encore que oui.
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