En écrivant le billet sur Dédé, à travers les brumes un peu plus tôt, j'ai réalisé que ça faisait un bon bout de temps que je n'avais traité de cinéma sur ce blogue.
La chose n'est pas due au hasard, mais simplement au fait que j'ai vu beaucoup moins de films en 2009 que je n'en voyais auparavant. Évidemment, j'ai débuté l'année à l'étranger, et j'ai voulu rattraper mon retard par la suite en louant quelques films, mais j'ai consacré mes loisirs à d'autres arts, semble-t-il (la photographie étant l'un de ceux ayant pris beaucoup de place).
J'ai tout de même vu plusieurs films cette année, et étrangement (ou non, à bien y penser), j'ai vu plusieurs films québécois.
Je me souviens encore d'une époque ou "film québécois" signifiait plus ou moins "film ennuyant". On connait déjà mon admiration pour Denys Arcand, et je ne nierai jamais l'importance de l'oeuvre de Claude Jutra ou Gilles Carle pour le cinéma québécois, mais je suis heureux de voir que la culture québécoise est rendu à cette étape de la vie culturelle où l'on peut divertir sans culpabilité, et qu'on peut réaliser des films sans obligation sociale ou historique.
Si des films comme Un Homme et son péché sont réalisés avec compétence, en tant que cinéphile, je me sentais un peu las de voir à quel point le cinéma d'ici prenait du temps à passer par-dessus le film social (ce que j'appelle souvent le cinéma "on est né pour un petit pain"). Pour un Maurice Richard qui vaut le détour, on a souvent produit quelques Survenant d'un ennui mortel, pour ne nommer que des grands succès.
Heureusement, en 1995, Jean-Marc Vallée est arrivé comme un rayon de soleil dans le paysage du film québécois, avec un premier film de genre moderne et assumé: Liste Noire. Depuis, s'il n'est plus si rare de voir un film de divertissement (au sens large, allons-y) au Québec, il ne semblait pas, jusqu'à très récemment, que ça soit si habituel que ça.
C'est pourquoi je suis si étonné d'avoir vu sortir sur nos écrans cet été une panoplie intéressante de films diversifiés, que l'on pense à De père en flic, Les grandes chaleurs, Grande Ourse, Les pieds dans le vide, 1981, Les doigts croches ou au récent 5150 rue des ormes.
On parle ici de films touchant divers genres, mais essentiellement de cinéma de divertissement, et de voir une offre aussi large pour un seul été fait plaisir au cinéphile que je suis.
Ainsi, malgré le nombre de film restreint que j'ai vu cette année, plusieurs d'entre eux se sont avérés être des films québécois. Je m'attarde donc ici sur trois d'entre eux, particulièrement bien réussis en ce qui me concerne.
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Le plus récent des trois est l'espèce d'étrange auto-bio-fiction de Ricardo Troggi: 1981.
Je m'attendais à un film portant un regard léger sur les années 80 en utilisant comme décor la cellule familiale du jeune Ricardo. Or le film fait exactement l'inverse: il traite de la cellule familiale et de l'environnement d'une année scolaire vus par la lorgnette biaisée du jeune Troggi à 13 ans, en utilisant les années 80 comme décor.
Si l'approche surprend (et en irritera plus d'un, c'est très égocentrique comme démarche si on y pense), le film réussi à dépasser cette prémisse de base et s'avère un agréable et fort comique film de coming of age. L'ensemble est léger et drôle, et c'est peut-être son (paradoxal) manque de prétention qui rend le film sympathique.
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Le second film que je tenais à souligner est la comédie De père en flic d'Émile Gaudreault. Ici encore, il faut souligner que le film n'est pas ce que laissait croire la promotion effectuée par son distributeur. On comprend bien que celui-ci ait voulu miser sur la popularité de Bon cop bad cop, et présenter le film comme une comédie policière, mais le long métrage de Gaudreault est surtout une comédie sur les relations père-fils, puisque l'enquête policière n'est qu'un prétexte et sert essentiellement de décor. Et comme comédie sur les relations père-fils, le film fonctionne parfaitement. La présence de l'humoriste Louis-José Houde s'avère un plus si on aime son style d'humour et sa manière de rendre ses personnages, puisqu'il ne diffère pas beaucoup de ce style pour camper son personnage et livrer ses répliques.
Le scénario comporte son lot d'idées amusantes - sans être totalement désopilant - et les dialogues sont drôles et bien rendus par les comédiens. On connait déjà le potentiel comique de Michel Côté et il est ici très bien utilisé.
Une fois encore, on ne parle pas d'un film prétentieux, l'intention est claire: on veut faire rire et le résultat est là, on rit, et beaucoup.
Certains seront irrités de la présence d'un humoriste dans un rôle principal (une fois de plus, on peut comparer avec Bon Cop... et Patrick Huard), mais on semble oublier que lorsqu'il ne s'agit pas d'une comédie, on oublie vite ces critiques (peu de gens trouvaient à redire sur la performance de Huard dans Sur le seuil, par exemple). Sans être un gage de succès (voir le box office de Cadavres, d'Érik Canuel), il est évident que la présence d'un humoriste très populaire au générique d'une comédie risque de donner un extra aux recettes du film. Toutefois, le bouche à oreille et la longue carrière du film en salle s'avère une preuve des qualités populaires du film et dépasse la simple présence de Houde au générique.
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Enfin, dernier film sur lequel j'attire votre attention - et non le moindre - c'est le gentil Les Doigts croches, de Ken Scott. Surtout connu comme le scénariste de La Grande Séduction, Scott réalisait donc son premier long métrage avec Les Doigts croches.
Et comme pour les deux films donc j'ai parlé plus haut, j'ai trouvé ce film parfaitement réussi, compte tenu de ses intentions. Tout d'abord, c'est fort bien écrit, les dialogues sonnent justes, sont amusants, et réservent quelques surprises bien trouvées. Les répliques savoureuses pleuvent et on se prend à se croire dans une sorte de film des frères Coen, en plus léger. Plusieurs trames et lignes de dialogues semblent d'abord superflues, mais au final, c'est ce genre de répliques qui donne de la substance aux personnages et qui rend le film aussi réussi. Scott écrit des films personnels, toujours remplis de personnages un peu tordus, mais néanmoins charmants et c'est encore le cas ici.
J'ai lu quelques critiques mitigées et ma foi, dans chaque cas, il semblait que le critique avait voulu voir un film différent de celui que Ken Scott avait décidé de faire. Pour ma part, je n'avais pas réellement d'attentes spécifiques, alors j'ai simplement laissé le cinéaste me raconter son histoire à sa façon et j'ai été fort heureux du résultat.
À la réalisation, Scott a eu l'intelligence de résister à l'envie de trop en faire et s'efface pratiquement, au profit de son groupe d'acteur expérimenté. J'ai parlé un peu plus tôt de Michel Côté, mais on oublie souvent combien Roy Dupuis a un excellent potentiel comique et Ken Scott l'utilise à merveille dans ce film.
Et puis je ne sais pas si c'est dans l'air du temps, mais il m'a semblé que ce film n'était pas prétentieux non plus (pour comprendre ce que je veux dire par là, par opposition, revoir - si vous êtes capable - La Neuvaine, ou Le Survenant, par exemple).
Le résultat est un film délicieux et sympathique, peut-être le meilleur film de mon été en ce qui me concerne. Drôle sans n'être que drôle, soigné sans être trop léché, personnel sans être égocentrique, j'ai trouvé que c'était une réussite à tous les points de vue.
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Bon, sur ce, je vous quitte en vous souhaitant bon cinéma... Il me reste encore à voir le plus récent des films de divertissement à arriver sur nos écrans, 5150 rue des ormes, d'Éric Tessier, sur un scénario de mon ami Patrick Sénécal (adapté de son excellent roman du même titre).
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