Suite de mes réflexions sur la coopération internationale, réflexions que j'ai débutées ici par un billet sur le développement humain.
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La coopération internationale.
Sans vouloir m'embourber dans des définitions fastidieuses, je dois tout de même expliquer ce que j'entends par Coopération Internationale. Je fais tout de suite une précision; je ne parle pas - du moins pas directement - dans ces billets, de l'aide humanitaire (qui consiste essentiellement à l'aide aux personnes victimes de catastrophes naturelles ou de conflits).
La Coopération Internationale, c'est un ensemble d'initiatives ayant pour but le développement socio-économique des pays pauvres. Voilà.
Généralement, cette cette coopération prends une double forme. La première est financière, et c'est l'Aide Publique au Développement, qui représente l'ensemble des contributions versées par un état industrialisé aux pays moins développés. La seconde est humaine, et c'est l'envoi de coopérants volontaires par ces mêmes pays. L'encadrement de cet envoi par divers organismes est financé à même l'APD, mais le temps, les efforts et l'expertise de ces coopérants sont offerts sur une base individuelle et volontaire.
Le Canada.
Étant un des pays industrialisé, notre devoir en tant qu'état est de participer au au développement des pays les plus pauvres. Lors de rencontres internationales, un objectif a été instauré pour donner un cadre financier de référence aux pays développés, et cette référence est que l'aide publique au développement devrait se situer à 0,7% du Produit National Brut. Cet objectif de contribution a été fixé en 1970 et n'a jamais été révisé depuis.
Le Canada n'a jamais contribué pour 0,7% de son PNB au développement international. Les meilleures années du Canada sont derrière nous, et il s'agit des années 1970-1995 où nous avons versé entre 0,4% et 0,5% du PNB.
Le dernier rapport de l'ACDI (voir plus bas), publié en mars 2009 et concernant nos activités de 2006-2007 montre que le Canada contribue maintenant de l'ordre de 0,28% de son PNB en aide publique du développement.
L'ACDI.
L'Agence Canadienne de Développement International (ACDI) a été créée en 1968 pour administrer l'essentiel du programme d'aide publique au développement du Canada. Une mesure de sa réussite est sa contribution à l'atteinte des Objectifs de développement du millénaire et des objectifs plus vastes de la politique étrangère canadienne.
L'ACDI est donc l'organe officiel qui finance la grande majorité des projets d'aide humanitaire et de coopération internationale du Canada vers les pays qui en ont le plus besoin.
De manière concrète, l'ACDI finance des projets qui sont généralement pilotés par des organismes non-gouvernementaux (ONG) à la fois au pays et dans les pays en voie de développement.
Afin d'obtenir le financement de l'ACDI, les ONG doivent satisfaire à de nombreux critères élaborés par l'ACDI, qui contrôle donc ainsi l'orientation générale de l'APD au Canada.
Actuellement, l'orientation de l'ACDI est de mettre l'accent sur un groupe de pays précis, afin de concentrer les efforts du Canada dans ces pays.
Gouvernance Canadienne
Le problème principal de l'ACDI, c'est d'être une agence gouvernementale, donc un organe du gouvernement fédéral. Son financement dépend du budget du gouvernement, et sa gouvernance dépend visiblement de l'orientation du gouvernement en place.
Si les gouvernements successifs de Trudeau, Mulroney et Chrétien ont financés l'ACDI plus largement, il n'en est plus de même depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement Harper. Malgré qu'il affirme avoir augmenté les budgets de l'ACDI, le % du PNB que le Canada verse en aide publique au développement ne cesse de chuter depuis son entrée au pouvoir.
Pire encore, le gouvernement Harper intègre aux activités de l'ACDI notre présence en Afghanistan!
En effet - comme le démontre d'ailleurs le lien de l'ACDI vers la page concernant notre présence en Afghanistan - l'Afghanistan est le pays actuel qui reçoit la plus grande part du gâteau de l'ACDI. (On verse carrément 0,1% de notre PNB à l'Afghanistan). Or j'ai du mal à associer présence militaire et coopération internationale. On ne peux pas être en même temps un coopérant volontaire d'une main et un soldat de profession de l'autre. "L'aide", en Afghanistan, est 5 fois plus élevée que celle au Kenya, par exemple, et 10 fois plus que celle en Bolivie. Je ne dis pas que les Afghans n'ont pas besoin d'aide, mais je trouve démesurée la proportion qui leur est consacrée et je trouve paradoxal l'idée que le Canada soit en guerre dans ce pays mais considère ses soldats comme des coopérants.
L'ingérence actuelle du gouvernement Harper va plus loin, puisque l'ACDI ne se gène pas non plus pour faire la propagande des actions de notre gouvernement concernant sa relance économique sur son site web. Pour ma part, un parti au pouvoir qui dépense les fonds publics pour faire de la promotion de son propre budget, c'est déjà un détournement de fonds à des fins partisanes. Lorsque cette propagande apparaît sur le site même de l'organe sensé s'occuper d'aide publique au développement, je trouve que l'on exagère franchement.
Paradoxes et intérêts politiques
Sans vouloir étaler ici toute l'étendue des orientations parfois discutables des agences et des gouvernements, on doit savoir qu'une partie de l'aide publique au développement versée aux pays en voie de développement n'est pas désintéressée. Parfois même, on fait bien pire que si on ne faisait rien, prenant d'une main ce que l'on tend de l'autre. On réalise souvent que du point de vue des politiciens, on ne veut pas vraiment contribuer au développement de ces pays, on veut surtout protéger notre propre développement, même s'il est fait au détriment du reste du monde.
Il n'y qu'à voir où les conditions de financement imposées par la banque mondiale ou le fond monétaire international ont menées des pays d'Afrique comme le Sénégal en terme de crise alimentaire. L'exemple du Programme Alimentaire Mondial, qui s'encadre parfois de conditions d'achats des aliments dans des pays industrialisés est également patent. Heureusement, ces cas ne sont pas la norme, mais il y a de quoi s'inquiéter de voir que l'aide publique au développement dépend toujours autant des politiciens.
Plus près de nous, le Canada tente parfois d'amenuiser les problèmes créés par des industries d'ici, qui n'hésitent pas à procéder à un véritable pillage des ressources naturelles de certains pays. On tourne en rond. Le cas de l'industrie minière canadienne en est d'ailleurs un exemple scandaleux.
Et moi
C'est bien beau de suivre l'orientation de notre agence de développement international - et de dénoncer la position du gouvernement actuel -, reste que l'on peut aussi contribuer, comme citoyen du monde, et cette contribution personnelle, elle peut prendre la forme d'aide individuelle. Ça sera le sujet de mon prochain billet sur la question du développement.
À suivre.
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