Trouvez-vous réellement que ce qui se passe sur la scène politique canadienne et québécoise est intéressant?
Moi pas.
Pourtant, nous parlons d’un gouvernement provincial au summum de l’impopularité et d’un parti au pouvoir minoritaire et éclaboussé par un scandale de corruption au fédéral, de tractations de coulisses et de coups de théâtre. Que demander de plus en politique? Eh bien je suis blasé depuis si longtemps… Je me souviens avoir confié à mon amie Ariane il y a un an environ à quel point je n’accordais aucune importance aux élections fédérales (le résultat étant connu d’avance - j'avais raison). J’ai voté lors de plusieurs élections, et ma foi, j’ai le sentiment que rien ne change et ne changera jamais, alors j’ai abandonné l’idée de changer le monde au Canada. Lors des dernières élections au Québec, j’étais à Prague, j’ai pas voté. Dernières élections fédérales, j’ai pas voté, j’étais à Quito. En ce moment-même, je suis de retour à Montréal alors que la campagne électorale bat son plein en BC, ma province d’adoption, c’est dire tout mon intérêt pour le processus électoral au pays... Le seul politicien qui fait du sens au pays en ce moment est Jack Layton, mais il est probablement trop censé pour devenir réellement populaire. À quelque part, je pense qu'il faut avoir l'honêteté élastique pour faire de la politique, et plus élastique encore pour être populaire. Bof, la population a ce qu'elle mérite.
Quoi faire donc pour éviter de se faire rabrouer sans arrêt par les nouvelles, les journaux et tous les médias qui bavent bien stupidement devant toutes les stratégies plus anodines historiquement les unes que les autres des partis politiques en présence?
Se tourner vers la Grande Bretagne et vers la France. Mais pas nécessairement vers leur classe politique.
Ainsi, lundi soir, à Montréal, Ariane et moi sommes allés voir un spectacle au cabaret La Tulipe. C’était la venue à Montréal d’un groupe rock progressif britannique qui s’appelle Porcupine Tree. Je me plaignais justement dans cet Esprit Vagabond (à l’époque où il était publié sur papier) que le rock progressif était malheureusement mort. À peu près au même moment, en Angleterre, un type créait un groupe fictif, dont il prétendait avoir trouvé des enregistrements depuis longtemps perdus. Par un étrange tour du destin, il a réussi à attirer assez l’attention pour qu’un petit groupe d’amateurs de ce band se crée et qu’un disque soit sorti. La vérité, c’est que le gars avait tout fait (les instruments et la programmation) lui-même, il avait inventé le groupe de toute pièce et l’avait baptisé Porcupine Tree. Lorsqu’est venu le temps de faire un autre album (écrit par le même gars) et de monter une tournée, il a finalement crée un réel groupe rock en regroupant des musiciens qui après quelques ajustements devinrent un véritable groupe qui enchaîne depuis albums et succès après albums et succès. Nous parlons de rock progressif, donc de chansons qui ne jouent pas dans les stations de radio. Le rock progressif (pour moi), c’est du rock musclé mais pas métal, lyrique et expérimental mais pas hors-contrôle, un habile mélange de guitares très électriques et d’exploration musicale. Avec un lead vocal à la voix haut-perchée. Porcupine Tree fait cela avec une quasi-perfection qui fait beaucoup plaisir à entendre.
Bref, en un mot comme en cent, j’étais vraiment content lorsqu’il y a un mois, à peine arrivé à Montréal, je vois dans le Voir (avouez…) que Porcupine Tree vient à Montréal et que je peux me procurer des billets.
Lundi soir, donc, après un délicieux repas asiatique en compagnie d’Ariane, je me pointe au la Tulipe, cabaret où je vais pour la première fois. Ancien théâtre (des variétés, je pense bien), le La Tulipe s’est avéré l’endroit parfait pour aller voir Porcupine Tree. Assez grand pour accueillir une bonne foule, mais assez petit pour que tout le monde soit tassé et pour créer une ambiance forte, le La Tulipe a une âme, du vécu, un esprit, qui a ajouté une dimension qui enveloppait parfaitement la musique de Porcupine Tree. Cette chaleur était le parfait contraste à l’habituelle froideur des grands auditoriums comme le centre Bell, par exemple. Pour le groupe qui se produisait hier, le contact avec la foule s’est fait en quelques secondes à peine dès la première interprétation.
Sans vouloir entrer dans les détails (probablement qu’aucun de mes lecteurs habituels ne connaît Porcupine Tree), le groupe a offert un beau mélange de chansons déjà connues et de nouvelles chansons issues de leur tout nouveau CD (qui a eu de très bonnes critiques dans le Voir justement, la semaine dernière), je m’en voudrais de passer sous silence que le spectacle était à guichet fermé, que la foule était très enthousiaste et que j’étais bien content de voir que ce groupe talentueux avait déjà un noyau de fans convaincus à Montréal.
Après cette excellente soirée, j’ai consacré le lendemain soir à l’organisation d’archives sur mon nouvel et génial ordinateur Apple (je vais me mettre à faire des pubs pour Apple) en regardant TV5 puisque la chaîne présentait mardi soir une émission que j’aime beaucoup : Tout le monde en parle.
Bon, tous les Québécois connaissent la version locale, avec le très intéressant Guy A. Lepage, mais j’avoue avoir un faible pour la version originale, même si au début, je n’étais pas un grand fan ni de Ardisson ni de son fou du roi... Évidemment, il faut avoir l’habitude à la fois de la culture française et de la télé française, mais après des années à regarder TV5, lire divers magazines de cinéma français, écouter des films français et fréquenter des Français (sans parler de me rendre deux fois en France), je peux prétendre avoir suffisamment de background (les français adoreraient :) pour apprécier Tout le monde en parle version France.
Comme dans toute diffusion de ce genre d’émission, l’intérêt repose sur un mélange d’habileté de l’animateur et du co-animateur et de l’énergie qui se dégage du groupe d’invités disparates qui partagent le temps d’antenne. Parfois ça fonctionne incroyablement bien, d’autres fois, ça demeure moyen, ce sont les risques de ce concept. Le montage aide parfois (pourquoi pas si c’est meilleur, je ne suis pas un puriste), mais j’aime bien la liberté qui se dégage de l’ensemble. Mardi soir, par exemple, nous avions des interventions de deux journalistes français qui ont été détenus contre rançon en Iraq, une télépathe, le duo britannique Tears For Fears, un acteur français et une actrice espagnole partageant la vedette d’un nouveau film, etc. À ce sujet d’ailleurs, cette actrice espagnole dont j’oublie le nom (amnésie temporaire je vous l’assure), elle était absolument superbe, très jolie, et elle s’est avérée une jeune femme très drôle pendant l’émission. Le moment où elle pleure, puis se mouche et met son mouchoir dans la poche du veston de l’acteur qui l’accompagne, ignorant les réactions de dégoût des autres invités, est un grand moment de télé française! Le meilleur, c’est que par la suite, alors qu’Ardisson lui demande pourquoi elle l’a pas gardé, elle avoue ne pas avoir de place à le mettre sur elle (elle porte une robe rouge, sexy mais pas over the top, mais sans aucune poche, évidemment). Il lui dit alors qu’elle aurait pu le coincer dans l’élastique d’un sous-vêtement et l’on voit à son hésitation et ses yeux qu’elle n’en porte pas. Même Ardisson (pourtant souvent dur à cuire) a eu l’air timide, tout à coup, l’espace de quelques secondes. Puis, il s’est tourné vers son complice en lui disant : je pense pas que je peux continuer à poser des questions, là. Vingt minutes plus tard, nous avions droit à une interview des deux membres de Tears for Fears (duo britannique phare des années 80) fort intéressante et instructive. (J’ai écouté quelques extraits de leur nouvel album et l’influence des Beatles, mais surtout de Paul McCartney, est évidente, un effet de l’âge du duo, probablement, mais c’est tout de même surprenant, nous sommes en 2005, après tout).
Anyway… un million de fois plus intéressant que la politique canadienne, non?
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